Description : LOGO

N° 2803

_____

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 avril 2020.

PROPOSITION DE LOI

portant création du concept d’état de catastrophe sanitaire,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut
de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Pierre MOREL‑À‑L’HUISSIER, Arnaud VIALA, Corinne VIGNON, Francis VERCAMER, Didier LE GAC, Stéphane DEMILLY, Geneviève LEVY, PierreYves BOURNAZEL, PierreYves BOURNAZEL, PierreYves BOURNAZEL, Éric STRAUMANN, Yves DANIEL, Véronique LOUWAGIE, Christophe NAEGELEN, Maud PETIT, Sébastien NADOT, Frédérique TUFFNELL, Laure de LA RAUDIÈRE, Sophie AUCONIE, Thibault BAZIN, FrançoisMichel LAMBERT, Patrice VERCHÈRE, Jacques CATTIN, Thierry BENOIT, Philippe VIGIER, Guy BRICOUT, Antoine HERTH, Philippe GOSSELIN, Meyer HABIB, JeanChristophe LAGARDE, Frédérique DUMAS, Stéphane PEU, Isabelle VALENTIN, Philippe DUNOYER, Michèle TABAROT, Lise MAGNIER, AnneFrance BRUNET, Paul MOLAC, Sandrine MÖRCH, 

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le risque sanitaire est défini, selon les sites du Gouvernement, comme « la probabilité que des effets sur la santé des populations surviennent à la suite d’une exposition de l’homme ou de l’animal à une source de contamination et nécessitant une réponse adaptée du système de santé. »

Les contaminants peuvent être classés en trois familles :

– les contaminants biologiques, appelés aussi agents pathogènes, tels que les champignons, les bactéries, les virus, les parasites ;

– les contaminants chimiques tels que les métaux lourds, les hydrocarbures ou les dioxines ;

– les contaminants physiques tels que les rayonnements ionisants, les rayons ultraviolets, les champs électromagnétiques, le bruit et les températures extrêmes.

On entend par catastrophe sanitaire tout événement entraînant une crise majeure pendant laquelle la réponse sanitaire en place n’est plus suffisante pour prendre en charge l’afflux de victimes. Cette situation entraîne inexorablement une désorganisation du système de soin habituel. Une catastrophe sanitaire se distingue à la fois par le nombre de victimes et par le délai réduit de leur apparition.

Les origines sont multiples et peuvent être le fait de catastrophes technologiques, naturelles, terroristes et enfin épidémiques. Quelle qu’en soit l’origine, la catastrophe sanitaire appelle à une réponse forte et immédiate nécessitant des moyens spécifiques et exceptionnels pour lesquels notre État de droit doit prévoir des dispositions extraordinaires et temporaires.

La gestion de situations d’urgence comprend deux grandes étapes, la première de coordination et de conduite d’opération de secours nécessitant globalement un renforcement des moyens humains dans les secteurs touchés, une production massive des produits et équipements sanitaires requis, la mise en place d’outils logistiques et coordonnés entre différents services ; la seconde d’appui, de soutien et de relances auprès des familles et du tissu économique dont l’activité a été impactée par la crise.

La crise du covid‑19 a mis en exergue que face à une pandémie et aux mesures de confinement obligatoire, une crise sanitaire se transforme sans délai en crise économique impactant immédiatement et très violement l’ensemble des acteurs économiques, notamment les TPE, PME, artisans, associations. L’ensemble des acteurs les plus fragiles du tissu économique se retrouve pour beaucoup face au risque de la perte de leur exploitation.

L’article L. 125‑1 du code des assurances dispose que « si l’assuré est couvert contre les pertes d’exploitation, cette garantie est étendue aux effets des catastrophes naturelles, dans les conditions prévues au contrat correspondant. » Aujourd’hui, cette prise en charge par les assureurs n’existe pas dans le cadre de catastrophes sanitaires.

L’État est aujourd’hui la seule sécurité financière. Pourtant face à ce type de situation, l’ensemble des acteurs doit être solidaires.

L’instauration d’un état de catastrophe sanitaire, sur la base de l’état de catastrophe naturelle permettrait, en plus de préparer mieux notre pays à ce type de crise par une coordination renforcée, d’apporter une sécurité financière à tout notre tissu économique, particulièrement le plus fragile.

L’article 1er vise à étendre le Chapitre V du Titre II du Livre Ier du code des assurances aux risques de catastrophes sanitaires.

L’article 2 vise de la même façon à étendre l’article L. 125‑1 du code des assurances aux risques de catastrophes sanitaires.

Cet article vient également encadrer juridiquement les effets des catastrophes sanitaires aux seules « pertes économiques directes ayant eu pour cause déterminante la présence d’agent pathogène indépendant de toute action humaine délibérée, et pour lequel les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises. »

Enfin l’article vient restreindre les délais de reconnaissance de l’état de catastrophe sanitaire dans le temps à dix‑huit mois après le début de l’évènement sanitaire, délai équivalent à la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle.

Ce délai s’applique aux événements sanitaires à partir de la promulgation de la présente loi.

L’article 3 est un article rédactionnel qui vise à étendre l’article L. 125‑2 du code des assurances aux risques de catastrophes sanitaires.

L’article 4 est un article rédactionnel qui vise à étendre l’article L. 125‑5 du code des assurances aux risques de catastrophes sanitaires.

L’article 5 apporte des éléments de sécurité pour les entreprises d’assurances dans le cadre d’un état de catastrophe sanitaire, excluant du dispositif les « sociétés en procédure de redressement judiciaire, en procédure de sauvegarde ou en liquidation, à l’exception, toutefois, de celles en capacité de démontrer qu’elles sont tombées sous ces régimes du fait de l’état de catastrophe sanitaire. »

Il y est précisé que les sociétés faisant l’objet d’une procédure préventive de type conciliation ou mandat ad hoc sont bien incluses au dispositif.

Enfin il permet par un décret en Conseil d’État de fixer le pourcentage ainsi que les modalités de répartition du fonds de réassurance prévu à l’article L. 151‑1 entre les entreprises impactées sur le territoire.

Si l’apparition du covid‑19 nous a montré que le risque sanitaire peut être source de crises nationales et internationales majeures, qu’une crise sanitaire appelle à une réponse forte et immédiate nécessitant des moyens spécifiques et exceptionnels de l’État incluant des mesures d’appui, de soutien et de relances auprès des particuliers et des professionnels dont l’activité a été impactée par la crise, tout particulièrement les plus fragiles et les plus démunies qui sont les plus fortement touchés, et que ces crises sanitaires conduisent inexorablement à une crise économique, elle nous a surtout montré qu’un État de droit protecteur ainsi que la solidarité nationale de tous et pour tous sont les seules voies permettant de protéger les français et notre tissu économique. 

Aussi c’est pourquoi, afin de couvrir les pertes d’exploitation comme c’est déjà le cas dans le cadre d’une catastrophe naturelle définie à l’article L. 125‑1 du code des assurances, il est nécessaire de légiférer pour créer un état de catastrophe sanitaire sur la base de l’état de catastrophe naturelle et de permettre la prise en charge par les assureurs de la couverture de perte d’exploitation.

Tel est l’objet de la présente loi.


proposition de loi

Article 1er

L’intitulé du Chapitre V du Titre II du Livre Ier du code des assurances est complété par les mots : « et sanitaires ».

Article 2

L’article L. 125‑1 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Au deuxième alinéa, après le mot : « naturelles », sont insérés les mots : « et aux effets des catastrophes sanitaires » ;

2° Après le troisième alinéa, il est inséré  un alinéa ainsi rédigé : « Sont considérés comme les effets des catastrophes sanitaires, au sens du présent chapitre, les pertes économiques directes ayant eu pour cause déterminante la présence d’agents pathogènes indépendants de toute action humaine délibérée, et pour lequel les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises. »

3° Aux deux premières phrases du quatrième alinéa, après le mot : « naturelle », sont insérés les mots : « ou l’état de catastrophe sanitaire » ;

4° Après le cinquième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé : « Aucune demande communale de reconnaissance de l’état de catastrophe sanitaire ne peut donner lieu à une décision favorable de reconnaissance de l’état de catastrophe sanitaire par arrêté interministériel lorsqu’elle intervient dix‑huit mois après le début de l’événement sanitaire qui y donne naissance. Ce délai s’applique aux événements sanitaires faisant suite à la promulgation de la loi n°        du          portant création du concept d’état de catastrophe sanitaire. »

Article 3

L’article L. 125‑2 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa,  les mots : « au troisième alinéa », sont remplacés par les mots : « aux troisième et quatrième alinéas » ;

2° La première phrase des quatrième et cinquième alinéas sont complétés par les mots : « ou l’état de catastrophe sanitaire » ;

Article 4

Aux premier et deuxième alinéas de l’article L. 125‑5 du code des assurances, les mots : « du présent chapitre » sont remplacés par les mots « des risques de catastrophe naturelle » ;

Article 5

L’article L. 125‑6 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Au début, il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Eu égard à l’état de catastrophe naturelle : »

2° Après le quatrième alinéa, sont insérés quatre alinéas ainsi rédigés :

« Eu égard à l’état de catastrophe sanitaire :

« L’obligation prévue au premier alinéa de l’article L. 125‑2 du présent code ne s’impose pas aux entreprises d’assurance à l’égard des sociétés en procédure de redressement judiciaire, en procédure de sauvegarde ou en liquidation, à l’exception, toutefois, de celles en capacité de démontrer qu’elles sont tombées sous ces régimes du fait de l’état de catastrophe sanitaire.

« L’obligation prévue au premier alinéa de l’article L. 125‑2 s’impose néanmoins aux entreprises d’assurance à l’égard des sociétés faisant l’objet d’une procédure préventive de type conciliation ou mandat ad hoc.

« Le pourcentage de la garantie de l’assuré prévue à l’article L. 125‑1 ainsi que les modalités de sa répartition entre les entreprises impactées par l’état de catastrophe sanitaire sur le territoire sont fixés par décret en Conseil d’État. »

Article 6

La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création de taxes additionnelles aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.