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N° 3107

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 juin 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à lattribution exceptionnelle dun chèque énergie aux ménages
les plus précaires,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Mathilde PANOT, Clémentine AUTAIN, Ugo BERNALICIS, Guy BRICOUT, MarieGeorge BUFFET, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Caroline FIAT, Sébastien JUMEL, Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Jean LASSALLE, JeanLuc MÉLENCHON, Sébastien NADOT, Danièle OBONO, Matthieu ORPHELIN, Loïc PRUDHOMME, Adrien QUATENNENS, JeanHugues RATENON, Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, François RUFFIN, Bénédicte TAURINE,

député.e.s.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Nul dans notre pays ne doit faire le choix entre se nourrir, s’habiller, ou régler la facture d’énergie.

Personnes âgées, familles aux revenus très faibles ou avec des emplois précaires, personnes isolées, personnes malades, habitant‑e‑s de passoires énergétiques : en France, 7 millions de personnes sont en situation de précarité énergétique. Ce phénomène les rend plus vulnérables à des pathologies respiratoires comme de l’asthme ou des bronchites chroniques.

En cette période de crise sanitaire, les plus précaires de ces ménages subissent à la fois les difficultés de paiement des factures d’énergie et le risque d’aggravation de leur état de santé. Ils vont souffrir durablement de la crise sanitaire, du confinement dans des logements à risque pour leur santé et des diminutions de revenus dans les prochains mois du fait des difficultés accrues à reprendre leur emploi ou retrouver du travail.

Le montant des factures d’énergie génère déjà un surendettement et peut conduire à des arbitrages parmi leurs besoins vitaux, comme celui de se chauffer ou de se nourrir dignement. En Seine‑Saint‑Denis, par exemple, entre 15 000 et 20 000 personnes auront du mal à se nourrir dans les prochaines semaines selon le préfet du département qui craint des « émeutes de la faim ». À cet égard, la presse se fait l’écho de la terrible crise sociale qui a lieu dans notre pays :

« Des parents me disent quils jeûnent depuis des jours, une mère est anémiée, une autre na plus de lait pour son bébé qui boit de la tisane en attendant, une troisième ma demandé du sel car elle fait des économies sur tout et que ça coûte 50 centimes, mais elle est à 50 centimes près ([1]) ».

Les chèques énergie dont près de 6 millions de ménages sont destinataires permettent de payer une partie des factures et varient de 48 à 277 euros maximum par an. Cependant, la facture moyenne d’un ménage en précarité énergétique s’élève à 1 850 euros, contre 1 500 euros pour un ménage français moyen.

Ces aides sont très insuffisantes compte‑tenu de la diminution des ressources à venir de ces ménages du fait de la crise économique annoncée. Les conséquences seront notamment beaucoup plus fortes pour les non‑salariés, dont l’activité s’est arrêtée brusquement, qui n’ont pu anticiper les effets de la crise et ne peuvent l’amortir. Les personnes occupant des emplois non déclarés seront également fortement touchées : des femmes de ménage aux jobs étudiants, ils se retrouveront sans ressources. Ces ménages doivent d’ores‑et‑déjà composer avec l’augmentation déjà observée des budgets familiaux pour se nourrir, liée pour partie à l’indisponibilité des lieux de solidarité habituels comme les épiceries solidaires ou points de distribution de l’aide alimentaire, ou au surcoût causé par la fermeture des cantines dans les écoles.

Si la crise sanitaire est l’urgence absolue, il faut dès maintenant anticiper les effets économiques et sanitaires pour les ménages en situation de précarité énergétique les plus démunis afin de leur venir en aide. Cette proposition de loi vise, en cette période de crise sanitaire et sur la base d’une initiative du collectif Rénovons, à l’attribution exceptionnelle d’un second chèque énergie d’un montant de 300 euros à destination des bénéficiaires les plus précaires du versement du premier chèque énergie en vigueur, au titre de l’article L. 124‑1 du code de l’énergie.

Ainsi, cette aide serait adressée aux trois premiers déciles de revenus éligibles au premier chèque énergie. Le coût de cette aide serait d’un milliard d’euros. Ce chèque exceptionnel permettra de couvrir deux mois de besoins en énergie pour ces 3,5 millions de ménages les plus précaires. Cette mesure leur permettra de consacrer une part accrue de leurs faibles revenus aux achats alimentaires qui augmentent, notamment au sein des familles comportant des enfants scolarisés ou celles bénéficiant d’aides alimentaires.


proposition de loi

Article 1er

I. – À titre exceptionnel et pour faire face à l’épidémie de covid‑19, l’État délivre aux trois premiers déciles de revenus éligibles au dispositif défini à l’article L. 124‑1 du code de l’énergie, un second chèque énergie d’un montant de 300 euros.

II. – Un décret  détermine les modalités d’application du présent article.

Article 2

La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.


([1]) Le confinement affame les enfants de familles pauvres, Mediapart, 21 avril 2020.