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N° 3367

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 29 septembre 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer les moyens de lutte contre les squatteurs,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Brigitte KUSTER, Damien ABAD, Annie GENEVARD, Marc LE FUR, Édith AUDIBERT, Émilie BONNIVARD, JeanYves BONY, Ian BOUCARD, JeanLuc BOURGEAUX, Fabrice BRUN, Jacques CATTIN, MarieChristine DALLOZ, Fabien DI FILIPPO, JeanPierre DOOR, JeanJacques GAULTIER, Michel HERBILLON, Mansour KAMARDINE, Constance LE GRIP, Frédérique MEUNIER, Maxime MINOT, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Robert THERRY, Charles de la VERPILLIÈRE, Michel VIALAY, Guillaume PELTIER, Martial SADDIER, Emmanuelle ANTHOINE,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La propriété est un « droit naturel et imprescriptible de l’Homme ». C’est ce que formule d’ailleurs la Déclaration universelle des droits de l’homme et du citoyen de 1789 dans ses articles 2 et 17. Ainsi, ‘inviolable et sacré » nul ne doit en être privé, sinon lorsque la nécessité publique, légalement constatée l’exige évidemment et sous la condition d’une juste et préalable indemnité.

Pourtant, le nombre de propriétaires qui voient leur logement squatté en violation des lois de notre pays ne cesse de se multiplier. L’affaire Maryvonne en 2015 ou encore celle de Théoule‑sur‑Mer en septembre 2020 sont parmi les plus emblématiques des dérives et de l’inadéquation de notre droit avec la réalité vécue par plusieurs propriétaires.

Il apparaît que les squatteurs jouissent de nombreux droits par rapport aux propriétaires, quand bien même ils se seraient installés illégalement dans un bien immobilier.

Ainsi, un propriétaire qui déciderait de les évacuer lui‑même par la force encourait ainsi jusqu’à trois ans de prison et 30 000 euros d’amende, contre seulement un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende pour les squatteurs. Cette dichotomie dans le traitement de ce type d’affaires se révèle inacceptable.

De plus, alors que l’article 38 de la loi n° 2007‑290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale permet l’application de la procédure d’expulsion sans jugement, cette dernière n’est valable que dans le cas des résidences principales.

Or il apparaît que la majorité des cas d’occupation sans droit ni titre, de squats, frappe plutôt des résidences secondaires. Dans ce cas de figure, il appartient au propriétaire de faire constater sous 48 heures une occupation illégale de son bien pour faire valoir la flagrance et donc la procédure de l’article 38 de la loi dite DALO. S’agissant de résidences secondaires, donc occupées moins régulièrement que le domicile, il est difficile de constater une flagrance en seulement deux jours. Dès lors, il faut au propriétaire engager une procédure judiciaire, par nature longue et coûteuse.

Enfin, si la loi n° 2018‑1021 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique a permis des avancées notables comme la non‑opposition de la trêve hivernale aux squatteurs, cette disposition législative de 2018 ne s’applique que dans les cas où les occupants illégaux se sont introduits par voie de fait dans le logement, c’est‑à‑dire par effraction.

Droit à valeur constitutionnelle, la propriété privée doit être mieux protégée contre ces phénomènes pour permettre d’accélérer les procédures d’expulsion mais aussi rendre plus dissuasive la loi quant à l’occupation sans droit ni titre de lieux habités ou de locaux à usage professionnel.

Reprenant l’amendement déposé dans le cadre du projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique, cette proposition de loi entend, à son article premier, durcir la peine applicable aux squatteurs en cas d’occupation sans droit ni titre d’un lieu habité ou d’un local à usage professionnel en la portant à 3 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Il n’est en effet pas logique, ni même acceptable, qu’un propriétaire faisant évacuer de son chef son bien des squatteurs encoure une peine plus sévère que ceux bafouant un droit à valeur constitutionnelle.

L’article procède à une précision de l’article 38 de la loi n° 2007‑290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale en fixant à trois jours maximum le délai d’expulsion sur décision préfectorale des occupants sans droit ni titre et permet aux maires qui constateraient l’occupation du domicile d’un de ses administrés ou de l’occupation d’un logement vacant de saisir le préfet pour qu’il mette en demeure l’occupant de quitter les lieux, puis de l’expulser, le cas échéant.

Enfin, l’article 3 réduit les délais applicables dans le cadre du code des procédures civiles et d’exécutions lors des procédures judiciaires, tout en supprimant la trêve hivernale pour les squatteurs. Lorsque l’occupation sans droit ni titre occasionne des dégradations volontaires dans le bien d’autrui, le juge judiciaire condamne l’occupant illégal à indemniser le propriétaire. Il s’agit ici de rendre cette indemnisation automatique.

 


proposition de loi

Article 1er

À la fin de l’article 226‑4 du code pénal, les mots : « d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende » sont remplacés par les mots : « de trois ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende ».

Article 2

L’article 38 de la loi n° 2007‑290 du 5 mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale est ainsi modifié :

1° Après le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le cas échéant, lorsque le maire a connaissance de l’occupation du domicile d’un de ses administrés ou de l’occupation d’un logement vacant, dans les conditions déterminées au premier alinéa, il peut, après avoir cherché par tous moyens à contacter le propriétaire ou le locataire du logement occupé, demander au préfet de mettre en demeure l’occupant de quitter les lieux. »

2° Au deuxième alinéa, à la fin de la première phrase, les mots : « qui ne peut être inférieur à » sont remplacés par le mot : « de » ;

3° Au troisième alinéa, les mots : « doit procéder » sont remplacés par les mots : « procède dans un délai maximal de 48 heures ».

Article 3

Le code des procédures civiles d’exécution est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa de l’article L. 412‑1 est ainsi rédigé :

« Si l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, elle ne peut avoir lieu qu’à l’expiration d’un délai d’un mois qui suit le commandement, sans préjudice des dispositions des articles L. 412‑3 à L. 412‑7. Toutefois, lorsque la procédure de relogement effectuée en application de l’article L. 442‑4‑1 du code de la construction et de l’habitation n’a pas été suivie d’effet du fait de l’occupant sans droit ni titre, le juge supprime ce délai. »

2° Après le premier alinéa de l’article L. 412‑1, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’il résulte de l’occupation sans droit ni titre une dégradation telle que définie à l’article L. 322‑1 du code pénal, le juge condamne l’occupant sans droit ni titre à indemniser le propriétaire du bien ayant subi des dégradations à hauteur des dommages causés ».

3° L’article L. 412‑2 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Les dispositions de l’alinéa précédent ne s’appliquent pas lorsque la personne concernée occupe un lieu habité ou un local à usage professionnel sans droit ni titre. »

4° Après le mot : « être », la fin de la première phrase de l’article L. 412‑4 est ainsi rédigée : « supérieure à trois mois. »

5° À la fin du deuxième alinéa de l’article L. 412‑6, les mots : « par voie de fait » sont supprimés.