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N° 3412

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 octobre 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à rendre incompressibles les peines pour viol prévues
par le code pénal et à mieux prévenir la récidive,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Fabien DI FILIPPO, Valérie BEAUVAIS, Dino CINIERI, Éric DIARD, Annie GENEVARD, Virginie DUBYMULLER, Laurence TRASTOURISNART, Josiane CORNELOUP, Émilie BONNIVARD, JeanClaude BOUCHET, Robin REDA, JeanLuc REITZER, Arnaud VIALA, Guillaume PELTIER, Didier QUENTIN, Valérie BAZINMALGRAS, Bernard PERRUT, JeanPierre VIGIER, Fabrice BRUN, Gérard MENUEL, Thibault BAZIN, Véronique LOUWAGIE, Pierre CORDIER, Ian BOUCARD, Maxime MINOT, Raphaël SCHELLENBERGER, PierreHenri DUMONT, Marine BRENIER,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En 2019, selon le ministère de l’intérieur, 22 900 viols ont été commis en France, un chiffre en hausse de 19 % par rapport à l’année 2018. Au total cette année‑là, 52 000 plaintes pour des viols ou des agressions sexuelles ont été enregistrées par les services de police et de gendarmerie français. C’est 10 000 de plus qu’en 2017 et c’est la première fois qu’autant de plaintes sont déposées dans l’hexagone sur un an.

Aujourd’hui, selon le Haut Conseil à l’égalité, moins de 10 % des femmes qui se disent victimes d’un viol ou d’une tentative de viol ont déposé plainte et seule une plainte sur dix aboutit à une condamnation.

Ce manque de sanction envers les coupables explique sans doute en partie pourquoi un tel sentiment d’impunité règne et pourquoi tant de femmes qui en sont victimes renoncent à porter plainte pour viol.

Pour dissuader les passages à l’acte et pour encourager les victimes à dénoncer leurs agresseurs, il est indispensable qu’une réponse pénale forte soit apportée lorsqu’un viol est commis.

Le viol est défini comme tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui ou sur la personne de l’auteur par violence, contrainte, menace ou surprise.

Le code pénal dispose que ce crime est passible de quinze ans de réclusion criminelle.

Il est en revanche passible de vingt ans de réclusion criminelle lorsqu’il s’accompagne de circonstances aggravantes (lorsqu’il a entraîné une mutilation ou une infirmité permanente, qu’il a été commis sur une personne vulnérable ou encore sous la menace d’une arme...), de trente ans de réclusion criminelle lorsqu’il a entraîné la mort de la victime, et de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu’il est précédé, accompagné ou suivi de tortures ou d’actes de barbarie.

Malheureusement, à ce jour, nous ne pouvons que constater que ces peines sont insuffisamment appliquées, ce qui conduit à un sentiment d’impunité pour les auteurs et de profonde injustice pour les victimes.

Pire encore : des individus dangereux sont ainsi relâchés dans la société, bien avant d’avoir purgé l’intégralité de la peine prévue par le code pénal, et récidivent, parfois de manière encore plus grave et violente.

Les exemples ont malheureusement été très nombreux ces dernières années, le plus récent porté à la connaissance du grand public étant celui d’une adolescente de 15 ans à Nantes, violée et tuée par un homme coupable de 12 viols et tentatives de viol entre 2001 et 2003. Cet homme avait été condamné en 2005 à dix‑huit ans de réclusion criminelle et était sorti de prison en février 2016 grâce à une remise de peine.

Selon le ministère de la justice, sur la période allant de 2007 à 2016, 3,7 % des individus condamnés pour viol étaient en état de récidive légale.

Il est indispensable de prendre enfin des décisions fermes et d’appliquer de façon systématique, sans aucune remise de peine ni aménagement possible, les sanctions prévues par le code pénal en cas de viol. C’est ce que prévoit la présente proposition de loi dans ses articles 1er à 4.

En cas de récidive, des mesures radicales doivent également être prises. L’article 5 dispose donc que toute personne en état de récidive ne pourra être libérée qu’à condition de se soumettre à un important suivi psychiatrique mais aussi à une castration chimique qui inhibera sa libido. Ce traitement pourra commencer pendant l’exécution de la peine et si le violeur récidiviste refuse de se le voir administrer à la fin de sa période d’emprisonnement, il devra rester en prison ou en rétention de sûreté.

La castration chimique (aussi appelée traitement inhibiteur de la libido) est une technique de diminution de l’appétence sexuelle par l’administration de substances hormonales. Elle est aujourd’hui employée aux États‑Unis et dans certains pays d’Europe (Belgique, Allemagne, Danemark, Espagne…) pour lutter contre la récidive des délinquants sexuels et s’avère efficace lorsqu’elle s’accompagne d’un suivi psychiatrique. Il convient de préciser que ces mesures de diminution temporaire des hormones sont réversibles.

La castration chimique des personnes ayant récidivé dans la commission d’un acte de viol doit devenir systématique, et tout violeur récidiviste qui refuse de s’y soumettre doit être incarcéré ou hospitalisé dans un établissement de santé spécialisé, pour une meilleure protection des victimes.

Face aux violeurs, la protection des victimes doit être une priorité absolue.


proposition de loi

Article 1er

Le deuxième alinéa de l’article 222‑23 du code pénal est complété par la phrase suivante : « Ces quinze années de réclusion criminelle s’appliquent de façon systématique : aucun aménagement ni aucune remise de peine ne sont possibles. »

Article 2

L’article 222‑24 du code pénal est complété par l’alinéa suivant :

« Ces vingt années de réclusion criminelle s’appliquent de façon systématique : aucun aménagement ni aucune remise de peine ne sont possibles. »

Article 3

Le second alinéa de l’article 222‑25 du code pénal est ainsi rédigé :

« Ces trente années de réclusion criminelle s’appliquent de façon systématique : aucun aménagement ni aucune remise de peine ne sont possibles. »

Article 4

Le second alinéa de l’article 222‑26 du code pénal est ainsi rédigé :

« Cette réclusion criminelle à perpétuité s’applique de façon systématique : aucun aménagement et aucune remise de peine ne sont possibles. »

Article 5

L’article 131‑36‑4 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque la personne est en état de récidive pour une infraction définie aux articles 222‑23 à 222‑26 du code pénal, la juridiction ordonne le suivi d’un traitement utilisant des médicaments qui entraînent une diminution de la libido, et un accompagnement psychiatrique. Ce traitement peut commencer pendant l’exécution de la peine.

« Si le violeur refuse ce traitement, il devra rester en prison ou en rétention de sûreté.

« Lorsque la peine d’emprisonnement se termine pendant la période de traitement du condamné, celui‑ci doit se présenter dans un hôpital ou un lieu agréé pour continuer de recevoir le traitement sous forme d’injections. Le non‑respect de ces obligations entraîne la possibilité par le juge d’application des peines de remettre le criminel sexuel en prison ou dans un hôpital spécialisé fermé pendant une durée déterminée. »