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N° 3560

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 novembre 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à interner les Français fichés au fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste en centre de rétention administrative,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Guillaume PELTIER,

député.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Alors que le terrorisme islamiste a fait, en seulement 5 ans, près de 250 victimes en France, les pouvoirs publics tardent à mesurer l’ampleur de ce phénomène.

Une guerre nous est livrée, au nom d’une idéologie ; mais les responsables politiques n’ont pas toujours pas pris les mesures fortes qui s’imposent pour combattre nos ennemis. Notre cadre juridique, conçu pour être efficace en période de paix, doit être adapté au plus vite ; sinon, la barbarie s’abattra de nouveau sur nos compatriotes.

Chacun l’a constaté, de nombreux terroristes islamistes qui combattent notre pays sont de nationalité française, ce qui rend de fait leur expulsion impossible malgré la menace qu’ils représentent pour l’ordre public.

Par ailleurs, bien que ces individus soient connus et surveillés des services de renseignement, il est en l’état quasiment impossible de prévenir le passage à l’acte terroriste, à moins que les conditions de l’article 421‑2‑1 du code pénal, ne soient réunies en amont soit « le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels ». Malheureusement, les dernières années écoulées nous ont démontré que ce dispositif, bien qu’indispensable, n’est pas suffisamment efficace face au danger terroriste.

Surtout, nos compatriotes sont excédés de découvrir, attentat après chaque attentat, que le terroriste en cause était généralement fiché, et faisait donc l’objet d’un suivi par les services de renseignement.

À l’inverse de la fiche « S », qui n’est pas uniquement destinée aux individus radicalisés susceptibles de commettre un attentat, le « Fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste » est lui un outil dédié à la lutte antiterroriste, crée en 2015 au lendemain des attentats de Charlie Hebdo et de l’HyperCacher.

Selon le Ministère de l’Intérieur, ce fichier  « recense et centralise des informations relatives aux personnes qui, engagées dans un processus de radicalisation, sont susceptibles de vouloir se rendre à l’étranger sur un théâtre d’opérations de groupements terroristes ou de vouloir prendre part à des activités à caractère terroriste ». Des profils variés, repérés à partir de « signaux faibles » sont ainsi intégrés dans ce fichier, puis classés et suivis en fonction de leur degré de dangerosité.

Selon les chiffres du Ministre de l’Intérieur, Gérard Darmanin, près de 80% des personnes suivies au FSPRT sont de nationalité française, sur un total d’environ 22 000 personnes.

Or il est matériellement impossible de surveiller quotidiennement autant d’individus, malgré leur extrême dangerosité, en raison des effectifs limités de nos services de renseignement.

En conséquence, la présente proposition de loi vise à interner les Français fichés au « FSPRT » en centre de rétention administrative.

Ainsi, le Ministre de l’Intérieur serait seul habilité à procéder à une telle mesure individuelle de contrôle administratif et de surveillance, dans le respect de strictes garanties procédurales


proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 228‑2 du code de la sécurité intérieure, sont insérés des articles L. 228‑2‑1 à L. 228‑2‑6 ainsi rédigés :

1° « Art. L. 22821. ‑ Le ministre de l’intérieur peut, après en avoir informé le procureur de la République antiterroriste et le procureur de la République territorialement compétent, placer la personne mentionnée à l’article L. 228‑1 en rétention par l’autorité administrative dans des locaux spécialisés ne relevant pas de l’autorité administrative. »

2° « Art. L. 22822. ‑ Quand un délai de trente jours s’est écoulé depuis la décision de contrôle administratif, le juge des libertés et de la détention est saisi aux fins d’une prolongation de la décision mentionnée à l’article L. 228‑2‑1 qui ne peut excéder quatre‑vingt‑dix jours. Le juge statue dans les vingt‑quatre heures de sa saisine par ordonnance au siège du tribunal judiciaire dans le ressort duquel se situe le lieu de résidence de la personne mentionnée à l’article L. 228‑2‑1, sauf exception prévue par voie réglementaire, après audition du représentant de l’administration, si celui‑ci, dûment convoqué, est présent, et de l’intéressé ou de son conseil, s’il en a un. La personne mentionnée à l’article L. 228‑2‑1 peut demander au juge des libertés et de la détention qu’il lui soit désigné un conseil d’office. »

3° « Art. 22823. ‑ Quand un délai de quatre‑vingt‑dix jours s’est écoulé depuis l’expiration du délai de trente jours mentionné à l’article L. 228‑2‑2, le ministre de l’intérieur peut prendre une nouvelle décision prononçant les obligations prévues aux articles L. 228‑2 et L. 228‑3. »

4° « Art. L. 22824. ‑ Les décisions prononçant les obligations prévues à l’article L. 228‑2‑1 sont écrites et motivées. Le ministre de l’intérieur ou son représentant met la personne concernée en mesure de lui présenter ses observations dans un délai maximal de huit jours à compter de la notification de la décision. Cette personne peut se faire assister par un conseil ou représenter par un mandataire de son choix.

Les décisions prononçant les obligations prévues à l’article L. 228‑2‑1 sont levées aussitôt que les conditions prévues à l’article L. 228‑1 ne sont plus satisfaites.

La personne faisant l’objet d’obligations fixées en application de l’article L. 228‑2‑1 peut, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision ou de son renouvellement, demander au Conseil d’État l’annulation de cette décision. Le Conseil d’État statue dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine. Ces recours s’exercent sans préjudice des procédures prévues aux articles L. 521‑1 et L. 521‑2 du code de justice administrative. En cas de recours formé sur le fondement de l’article L. 521‑2 du même code, la condition d’urgence est présumée remplie, sauf à ce que le ministre de l’intérieur fasse valoir des circonstances particulières. »

5° « Art. L. 22825. ‑ Lorsque des poursuites judiciaires sont engagées à l’encontre d’une personne faisant l’objet d’obligations fixées en application du présent chapitre, le ministre de l’intérieur abroge les décisions fixant ces obligations.

6° « Art. L. 22826. ‑ Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de mise en œuvre du présent chapitre ».

Article 2

À l’article L. 228‑7 du code de la sécurité intérieure, après le mot : « articles » sont insérés les mots : « L. 228‑2‑1 et ».

Article 3

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.