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N° 3608

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er décembre 2020.

PROPOSITION DE LOI

visant à territorialiser la gouvernance
des agences régionales de santé,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution
d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

MM. JeanCarles GRELIER, Patrick HETZEL, Michel HERBILLON,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Chacun l’aura constaté, à l’occasion de la crise de la Covid‑19, l’administration territoriale de la santé est souvent apparue très enfermée dans ses procédures et sa doctrine, donnant le sentiment de n’être pas en prise avec la réalité, de n’être pas en prise avec les besoins et attentes des territoires.

Il appartient donc à la présente proposition de loi de favoriser les liens, le partage, l’échange d’informations et la prise de décision entre les élus des territoires et les services déconcentrés du ministère de la santé afin de définir une organisation des soins et de la prise en charge la mieux adaptées aux contraintes des territoires mais aussi la plus efficace pour les patients en termes de délai comme de distance.

Pour cela, le texte prévoit d’inclure dans la gouvernance des agences régionales de santé (ARS) les élus régionaux et départementaux. Cette voix des élus, corps intermédiaire s’il en est, doit favoriser l’adaptation de notre système de santé aux contraintes, aux exigences et aux réalités des territoires. De chaque territoire.

Chaque Français doit pouvoir lire et trouver dans l’organisation comme dans la gouvernance territoriales de notre système de santé la certitude d’une prise en charge au plus près de son domicile et dans les meilleures conditions sanitaires, au cœur des villes comme dans les lieux les plus reculés.

Pour ce faire, l’article 1er vise à ouvrir grand le dialogue entre les agences régionales de santé et les territoires. Répondant à un objectif de transparence et de transversalité, l’article modifie la gouvernance des agences régionales de santé, via la création d’un conseil d’administration en remplacement du conseil de surveillance existant. Ce conseil d’administration sera composé d’un collège d’élus régionaux et départementaux, d’un collège des établissements de santé et médico‑sociaux, d’un collège des personnels, d’un collège des patients et usagers et d’un collège des professionnels de santé.

Ce conseil d’administration dispose d’une compétence générale de droit commun pour régler par ses délibérations les affaires de l’agence. En intégrant en son sein les différentes parties prenantes à la définition des projets régionaux de santé et au fonctionnement de l’agence, cette nouvelle organisation porte l’ambition d’une plus grande démocratie sanitaire et rapproche les agences régionales de santé des territoires et de leurs habitants.

L’article 2 crée, sur le modèle des contrats de plan État‑région, des contrats pluriannuels de programmation et d’investissement en santé (CPPIS), négociés et conclus entre la région et l’agence régionale de santé.

Ces CPPIS constitueront des outils de développement particulièrement importants pour les territoires, à travers la définition et le financement de projets structurants. Au même titre que les CPER, ils renforcent le politique d’aménagement du territoire en matière sanitaire et médico‑sociale au service de l’égalité des territoires.

Dans une logique ascendante et descendante, les régions pourront également consulter et associer les départements au financement de projets entrant dans le champ du médico‑social puisqu’il est de la compétence de ces derniers. Enfin, régions et départements pourront associer sur la base du volontariat et par voie de fonds de concours les collectivités du bloc communal.

Les CPPIS sont donc construits pour associer l’ensemble des Collectivités territoriales aux orientations quinquennales fixées entre les régions et l’État par le truchement des agences régionales de santé tant dans le secteur sanitaire que dans le secteur médico‑social.

Enfin, l’article 3 crée un principe général de substitution obligatoire dès lors qu’une agence régionale de santé envisage la fermeture d’un établissement, d’un service ou de lits d’hospitalisation. Ce principe général de substitution vise à proposer des solutions concrètes afin de maintenir pour chaque usager les meilleures conditions d’accès aux soins sur les territoires.

Si ces suppressions peuvent se justifier en fonctions des circonstances locales, l’article vise à lutter contre les disparités territoriales en matière d’accès aux soins et de prise en charge, et ainsi à limiter le sentiment d’abandon et d’isolement des populations concernées.

Les mesures de substitution seront discutées dans le cadre d’un dialogue ouvert entre l’agence régionale de santé et les élus du territoire concerné par ladite fermeture ou suppression et devront déboucher sur la ratification d’un protocole. L’absence d’accord interdit la mise en œuvre de la mesure de suppression.

proposition de loi

Article 1er

L’article L. 1432‑3 du code de la santé publique est ainsi rédigé :

« Art. L. 14323. – I. – Les agences régionales de santé sont administrées par un conseil d’administration. Le président du conseil régional préside de droit le conseil d’administration de l’agence ;

« Ce conseil d’administration est constitué de cinq collèges dont la composition est la suivante :

« 1° Un collège des élus. Siègent au collège des élus, quatre représentants du conseil régional et un représentant pour chacun des départements du ressort territorial de l’agence ;

« 2° Un collège des établissements composé de trois représentants des fédérations d’hospitalisation et trois représentants des fédérations du secteur médico‑social ;

« 3° Un collège des personnels, composé de six représentants des organisations représentatives des personnels des établissements de santé et des établissements médicaux‑sociaux publics et privés ;

« 4° Un collège des patients composé de six représentants des patients et usagers parmi les associations représentatives de patients et d’usagers présentes dans les établissements de santé et médico‑sociaux du ressort de l’agence ;

« 5° un collège des professionnels de santé composé de six membres représentants des professions médicales et paramédicales désignés par les unions régionales des professionnels de santé ;

« La composition du conseil d’administration est fixé par arrêté du directeur général de l’agence ;

« II. ‑ Dès sa première réunion, le conseil d’administration élit en son sein deux vice‑présidents, l’un appartenant au collège des représentants des personnels, l’autre appartenant au collège des patients et usagers et il se dote d’un règlement intérieur ;

« III. – Le conseil d’administration se réunit au moins une fois par trimestre sur convocation de son président ou sur demande d’au moins la moitié de ses membres. Le directeur général de l’agence siège au conseil d’administration avec voix consultative. Il propose l’ordre du jour au président. Le conseil d’administration délibère à la majorité de ses membres présents ou représentés, nul ne pouvant détenir plus d’un pouvoir. En cas de partage des voix, la voix du président est prépondérante ;

« Il est tenu un registre des délibérations du conseil d’administration. Les délibérations du conseil d’administration sont portées à la connaissance du public par tous moyens et sans délais ;

« Le conseil d’administration a une compétence générale pour régler par ses délibérations les affaires de l’agence, dans le respect des compétences confiées par la loi et les règlements aux agences régionales de santé. Les délibérations du conseil d’administration sont susceptibles de recours dans les conditions du droit commun ;

« Le conseil d’administration est notamment chargé :

« 1° D’adopter le budget annuel de l’agence et ses éventuelles décisions modificatives ;

« 2° D’adopter le compte administratif annuel

« 3° D’arrêter le tableau des effectifs

« 4° De déléguer au directeur général de l’agence tous les matières qu’il pourrait décider à l’exception de celles visées aux 1°, 2° et 3° du présent article ;

« 5° D’autoriser la signature des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens entre l’agence et les établissements ;

« 6° D’autoriser toutes les aides financières allouées aux établissements hors celles visées dans le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens ;

« 7° D’adopter le contrat pluriannuel de programmation et d’investissement en santé mentionné à l’article L. 4251‑1‑1 du code général des collectivités territoriales. »

Article 2

Après l’article L. 4251‑1 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 4251‑1‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 425111. – I. – La région signe un contrat pluriannuel de programmation et d’investissements en santé avec l’agence régionale de santé territorialement compétente ;

« Ce contrat pluriannuel de programmation et d’investissement en santé est conclu et adopté suivant les règles de forme et de procédure applicables aux contrats de plan État‑région définis aux articles L. 4251‑1 et suivants ;

« II. – Les départements sont associés à la négociation et à la conclusion du contrat pluriannuel de programmation et d’investissement en santé dans le cadre des orientations et de la stratégie territoriale relative au champ médico‑social ;

« III. – Ce contrat, d’une durée maximale de cinq années, encadre la participation financière des collectivités territoriales au financement des investissements des établissements de santé et médico‑sociaux, publics et privés, selon les objectifs et priorités définis par les parties et sans méconnaître les compétences de l’État ;

« IV. – Les régions et les départements peuvent associer par la voie de fonds de concours les collectivités du bloc communal qui souhaiteraient participer à cette programmation et ce financement des investissements des établissements sanitaires et médico‑sociaux. »

Article 3

Après l’article L. 1434‑15 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1434‑16 ainsi rédigé :

« Art. L. 14341. – I. – Chaque fois qu’une agence régionale de santé envisage la suppression d’un établissement, d’un service ou de lits d’hospitalisation, elle doit au préalable, après dialogue avec les élus des territoires concernés, proposer des mesures de substitution permettant aux habitants desdits territoires de conserver les meilleures conditions d’accès aux soins et de prise en charge, en terme de qualité et de délai notamment ;

« Cette proposition doit faire l’objet d’un protocole d’accord ratifié par les collectivités territoriales du ressort de l’établissement concerné ;

« La mesure de fermeture reste suspendue dès lors que le protocole mentionné au deuxième alinéa n’a pas été ratifié ;

« Un décret fixe les conditions de la discussion et de la ratification du protocole mentionné au deuxième alinéa. »

Article 4

La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par l’augmentation de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.