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N° 3663

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 décembre 2020.

PROPOSITION DE LOI

facilitant la création d’un centre départemental unique
de réception et de régulation des appels d’urgence et de secours,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Guillaume LARRIVÉ, André VILLIERS, Constance LE GRIP, Arnaud VIALA, Éric WOERTH, JeanPierre DOOR, JeanCarles GRELIER, Robin REDA, MarieChristine DALLOZ, Virginie DUBYMULLER, Marc LE FUR, Emmanuel MAQUET, Pascal BRINDEAU, JeanMarie SERMIER, Josiane CORNELOUP, JeanLouis THIÉRIOT, Jacques CATTIN, Laurence TRASTOURISNART, Marianne DUBOIS, Bernard DEFLESSELLES, Bernard BOULEY, Christophe NAEGELEN, Michel ZUMKELLER, Emmanuelle ANTHOINE, Sylvie BOUCHET BELLECOURT, Meyer HABIB, Bernard PERRUT, JeanJacques FERRARA, Bérengère POLETTI, JeanFrançois PARIGI, Stéphane VIRY, Guy BRICOUT, Maxime MINOT, JeanLuc BOURGEAUX, Didier QUENTIN, Bernard BROCHAND, Bernard REYNÈS, Thibault BAZIN,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Cette proposition de loi est née d’une expérience de terrain, vécue dans le département de l’Yonne.

Depuis plus de trois ans, le directeur général de l’agence régionale de santé de Bourgogne Franche Comté – qui est l’agent du Gouvernement nommé pour diriger les services administratifs territoriaux du ministère de la santé – s’obstine, malgré l’opposition unanime des acteurs de terrain, à vouloir supprimer le centre de réception et régulation des appels d’urgence situé au sein du centre hospitalier d’Auxerre, afin de le transférer au centre hospitalier universitaire de Dijon.

Médecins hospitaliers et libéraux, infirmiers, pompiers… Aucun professionnel de santé, aucun professionnel de l’urgence, du soin ou du secours n’accepte la fermeture du « centre 15 » du SAMU de l’Yonne. Membres de l’Assemblée nationale et du Sénat, président et membres du conseil départemental, maires d’Auxerre et de toutes les communes de l’Yonne, président du conseil d’administration du service départemental d’incendie et de secours… : aucun élu de l’Yonne, national ou territorial, n’accepte la fermeture du « centre 15 » du SAMU de l’Yonne. Toutes les instances professionnelles et démocratiques compétentes se sont prononcées en ce sens. C’est le cas, en particulier, de l’organe qui est censé exprimer la voix de la démocratie sanitaire : à l’unanimité, le conseil territorial de santé de l’Yonne a voté une motion demandant à « corriger le plan régional de santé » pour « maintenir le CRRA 15 d’Auxerre » et, « pour défendre la qualité des secours envers la population et l’attractivité médicale du territoire », à « travailler collectivement à une plateforme commune, 15 – 18 – ambulanciers privés – médecine libérale, sur un même plateau situé à Auxerre. »

Cette mobilisation est pleinement justifiée. Le « centre 15 » fonctionne parfaitement à l’hôpital d’Auxerre, gère près de 300 000 appels chaque année et permet d’apporter une réponse médicale rapide à nos concitoyens au plus près du terrain, y compris par hélicoptère. Si le « centre 15 » devait être transféré demain à Dijon, ce serait une catastrophe sanitaire pour le département rural qu’est l’Yonne, lequel souffre déjà d’un nombre insuffisant de personnels soignants. Concrètement, il y aurait encore moins d’urgentistes et moins d’internes à Auxerre, le SAMU serait fragilisé, la permanence des soins serait désorganisée, le centre hospitalier d’Auxerre serait déclassé et, à terme, il ne saurait être exclu que l’hélicoptère actuellement localisé à Auxerre subisse le même sort que le centre de régulation et soit lui aussi transféré à Dijon. Les arguments que s’obstine à avancer le directeur de l’agence régionale de santé (ARS) pour justifier la suppression du « centre 15 » d’Auxerre sont inopérants, tant ils sont démentis par l’expérience et l’analyse des acteurs de terrain. Il prétend, en effet, que cette fermeture permettrait de libérer du temps d’intervention pour les urgentistes. Il feint ainsi d’ignorer qu’il y aurait alors immédiatement moins d’urgentistes, qui quitteraient l’hôpital d’Auxerre, mais aussi moins de futurs urgentistes, puisque l’hôpital serait moins attractif pour les internes. En réalité, l’approche bureaucratique de l’ARS consiste à penser que, plus on retire des moyens hospitaliers à Auxerre et plus on les concentre à Dijon, mieux on se porte. C’est totalement inepte.

Ce conflit persistant entre les acteurs de terrain et la bureaucratie de l’ARS est extrêmement dommageable. D’une part, il fait peser sur le département de l’Yonne la menace désormais imminente d’une fermeture du « centre 15 » et d’un déclassement durable de l’hôpital d’Auxerre. D’autre part, il prive les habitants de l’Yonne de pouvoir bénéficier du projet alternatif ambitieux et réaliste qui est porté par les acteurs de terrain : la création d’« une plateforme commune, 15 – 18 – ambulanciers privés – médecine libérale, sur un même plateau situé à Auxerre », c’est‑à‑dire un centre de traitement des appels permettant la réception et la régulation de tous les services d’urgence, d’accès aux soins et de secours (SAMU, sapeurs‑pompiers, ambulanciers, libéraux…). Les professionnels de santé, les élus et les usagers veulent que l’Yonne bénéficie de cette nouvelle organisation, qui existe déjà dans 20 départements de France, et qui permettra le maintien des urgentistes, une meilleure formation des internes, une meilleure maîtrise des transports sanitaires, une meilleure permanence des soins, une meilleure coordination des urgences, des soins et des secours, au service de la population.

Aussi la présente proposition de loi est‑elle guidée par un objectif simple : faire confiance aux acteurs de terrain, en leur donnant enfin la liberté de créer, au service des habitants, un centre départemental unique de réception et de régulation des appels d’urgence et de secours.

À cette fin, l’article unique de la proposition de loi propose que :

– à l’échelle d’un département, des professionnels de santé (regroupés à cette fin dans une communauté professionnelle territoriale de santé) et le service départemental d’incendie et de secours aient désormais le droit de créer, par une convention, un centre départemental unique de réception et de régulation des appels d’urgence et de secours ;

– ce centre départemental reçoive et régule tous les appels adressés au numéro unique des appels d’urgence et de secours, qui se substituerait alors, dans ce département, au numéro d’aide médicale urgente, au numéro de permanence des soins ainsi qu’au numéro dédié aux secours ;

– lorsque ce projet serait soutenu par les professionnels de santé, les élus et les usagers et qu’il ferait ainsi l’objet d’un avis favorable du conseil territorial de santé, le directeur général de l’agence régionale de santé ne pourrait s’y opposer : la démocratie sanitaire triompherait alors de l’obstruction bureaucratique.


proposition de loi

Article unique

Le chapitre Ier du titre Ier du livre III de la sixième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 6311‑2‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 631121.  Par dérogation à l’article L. 6311‑2, un centre départemental unique de réception et de régulation des appels d’urgence et de secours peut être créé, à l’échelle d’un département, par une convention entre des professionnels de santé regroupés à cette fin en communauté professionnelle territoriale de santé et le service départemental d’incendie et de secours mentionné à l’article L. 1424‑1 du code général des collectivités territoriales. Cette convention prévoit que le centre départemental reçoit et régule les appels qui sont adressés au numéro unique des appels d’urgence et de secours, qui se substitue alors, dans ce département, au numéro d’aide médicale urgente, au numéro de permanence des soins ainsi qu’au numéro dédié aux secours. Le directeur général de l’agence régionale de santé ne peut s’opposer à la création de cette communauté et à cette convention lorsqu’elles font l’objet d’un avis favorable du conseil territorial de santé mentionné à l’article L. 1334‑10. »