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N° 3765

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 19 janvier 2021.

PROPOSITION DE LOI

visant à rappeler les devoirs des élèves et de leurs parents envers le personnel de l’Éducation nationale ,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Emmanuelle MÉNARD,

députée.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’objectif de cette proposition de loi est de rappeler que si l’éducation est la “première priorité nationale” et que le “droit à l’éducation est garanti à chacun”, les élèves et parents ont également des obligations et devoirs envers l’ensemble du personnel exerçant au sein des établissements.

Le 16 octobre 2020, le professeur d’histoire‑géographie Samuel Paty était victime d’un attentat terroriste islamiste devant son établissement scolaire. Au‑delà de l’effroi de cet acte barbare et la décapitation d’un enseignant en France au XXIe siècle, les premiers éléments de l’enquête semblent indiquer que ce professeur a été victime, dans un premier temps, d’un acharnement sur les réseaux sociaux de la part d’un parent d’une élève de son collège, pour avoir dispensé un cours sur la liberté d’expression.

Il faut clairement rappeler dans la loi que, si les élèves et leurs parents ont des droits, ils ont aussi bien évidemment des devoirs. Or, depuis de nombreuses années, sur l’ensemble du territoire national, les incivilités comme les insultes verbales, voire les menaces sont devenues monnaie courante de la part d’élèves comme de parents. Le contenu éducatif est régulièrement remis en cause par des parents, et parfois des communautés tout entières.

En outre, des faits plus graves sont aussi le quotidien de nombreux enseignants, actes de violence physique mais également des vols et dommages aux biens allant de la malheureusement « classique » dégradation de véhicule au vol d’objet personnel ou d’argent dans les sacs et cartables.

Enfin, le cyber‑harcèlement s’est particulièrement développé en quelques années. Les actes d’homophobie, de sexisme, de racisme à l’encontre des professeurs sur les réseaux sociaux sont devenus un véritable fléau pour le corps enseignant. D’ailleurs, selon un sondage réalisé pour « Le Journal du dimanche » en 2019, le nombre de violences envers les professeurs a augmenté de 7 % entre 2017 et 2018. Ces agressions verbales et physiques sont particulièrement déstabilisantes pour le professeur.

Il est donc urgent de mettre un terme à cette évolution délétère. La République le doit d’abord à Samuel Paty, qui en est mort, mais aussi à l’ensemble des professeurs, qu’elle ne peut charger de la mission essentielle d’instruire sans leur en donner tous les moyens, et l’ensemble des personnels éducatifs, administratifs et techniques qui peuvent eux aussi se retrouver confrontés à des actes de violences au sein des établissements.

Ainsi, le respect qui leur est dû doit être inscrit dans la loi.

Un respect qui ne doit être en aucun cas la récompense de l’engagement ni la contrepartie à l’exemplarité du personnel. Il est un devoir, ce qui signifie qu’il est dû a priori. Or, en disant que « l’engagement et l’exemplarité des personnels de l’éducation nationale confortent leur autorité dans la classe et l’établissement et contribuent au lien de confiance qui doit unir les élèves et leur famille au service public de l’éducation », puis en ajoutant subsidiairement que « ce lien implique le respect des élèves et de leur famille à l’égard des professeurs, de l’ensemble des personnels et de l’institution scolaire », l’article 1er de la loi pour une école de la confiance du 26 juillet 2019 soumet explicitement le respect des usagers à l’égard des personnels à « l’engagement et l’exemplarité » de ces derniers, leur donnant ainsi l’illusion qu’ils pourraient en être juges.

En cela, l’article 1er de la « loi pour une école de la confiance » en contredit même l’intitulé car, dès que l’exemplarité ou l’engagement ne sont pas présupposés par l’État comme les vertus de leurs serviteurs mais exigés comme des conditions proportionnant leur autorité et déterminant le respect qui leur est dû, c’est en réalité la méfiance qui règne et non plus la confiance.

L’objectif de cette proposition de loi est donc non seulement de clarifier le sens de la loi mais surtout de rétablir l’ordre véritable entre les notions. Les professeurs ont été recrutés sur concours : leur compétence a donc été vérifiée ; ils connaissent les programmes ; ils ont été titularisés à la suite d’une inspection ; ils sont évalués tout au long de leur parcours professionnel ; il va donc de soi qu’on doit respecter leur autorité pour qu’ils puissent effectuer leur travail dans les meilleures conditions. Le respect qui est dû aux professeurs ainsi qu’à tout le personnel éducatif par les élèves et leur famille est donc bien la base du lien de confiance qui doit unir les membres de la communauté éducative, et non un résultat ni un produit de celuici.

L’article 1er permet de rappeler les devoirs des élèves et de leurs parents envers les personnels.

L’article 2 vise à supprimer l’article L. 111‑3‑1 du code de l’éducation qui, dans sa rédaction actuelle, peut laisser penser que c’est « l’engagement et l’exemplarité » de l’enseignant qui justifie son droit au respect et donc, indirectement, induit de fait un droit aux élèves et leurs parents d’émettre un avis sur les compétences mêmes de l’enseignant.


proposition de loi

Article 1er

Après le cinquième alinéa de l’article L. 1111 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les élèves et leur famille ont le devoir de respecter les personnels en charge de la formation scolaire ainsi que l’ensemble des personnels éducatifs, administratifs, techniques, sociaux et de santé œuvrant à la vie de l’établissement. Ce respect contribue au lien de confiance qui unit les élèves et leur famille au service public de l’éducation. »

Article 2

L’article L. 111‑3 du code de l’éducation est abrogé.