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N° 4011

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 mars 2021.

PROPOSITION DE LOI

relative à la lutte contre le frelon asiatique,

(Renvoyée à la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Fabrice BRUN, Robert THERRY, Jérôme NURY, Vincent ROLLAND et Mme Véronique LOUWAGIE, Alain RAMADIER, Émilie BONNIVARD, Antoine SAVIGNAT, Bernard BROCHAND, JeanCarles GRELIER, Emmanuelle ANTHOINE, Bernard PERRUT, Ian BOUCARD, Vincent DESCOEUR, Thibault BAZIN, Valérie BEAUVAIS, Édith AUDIBERT, JeanMarie SERMIER, Patrick HETZEL, Marc LE FUR, Brigitte KUSTER, Didier QUENTIN, Philippe MEYER, JeanFrançois PARIGI, Isabelle VALENTIN, Michel HERBILLON, JeanClaude BOUCHET, JeanYves BONY, JeanLuc BOURGEAUX, Laurence TRASTOURISNART, JeanLuc REITZER, Bernard REYNÈS, Julien RAVIER, Julien DIVE, Sylvie BOUCHET BELLECOURT, Raphaël SCHELLENBERGER, Nathalie SERRE, Arnaud VIALA, Stéphane VIRY, Frédéric REISS,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le frelon asiatique (vespa velutina) espèce d’hyménoptère de la famille des vespidae originaire d’Asie aurait été introduit en France en 2004 via des importations de poteries chinoises. Observée pour la première fois en Lot‑et‑Garonne, l’espèce a peu à peu colonisé le territoire français et a commencé à s’étendre en Europe.

La prolifération de ce frelon représente un danger pour l’apiculture et plus globalement la culture fruitière. En effet, la prédation de l’abeille, qui constitue environ les 2/3 du régime alimentaire du frelon asiatique, a un effet direct sur la population de la ruche. De plus, la présence du frelon autour de la colonie occasionne un stress pour les abeilles, conduisant à un dépérissement de la ruche.

À ce jour, il n’existe pas de mesure permettant d’éradiquer ce fléau – étant donné la forte présence du frelon asiatique sur le territoire national.

Leur présence et leur propagation exponentielle en font un problème global pour notre société.

Il s’agit d’abord d’un enjeu de santé publique, la piqûre du frelon asiatique étant potentiellement mortelle pour l’homme. Plusieurs dizaines de décès leur sont imputés en France sur la seule année 2018.

C’est ensuite un problème de pérennité de la production apicole qui se trouve posé. Les abeilles sont une source d’alimentation privilégiée pour les frelons asiatiques, les attaques de ruches ont déjà entraîné l’anéantissement de nombreuses colonies et préoccupent les apiculteurs depuis plusieurs années.

Derrière l’activité apicole, c’est la biodiversité et la production agricole qui sont impactées. Les arbres à fruit peuvent notamment voir leur rendement chuter du fait d’une mauvaise pollinisation de leurs fleurs.

Aussi, afin de lutter contre cette menace, plusieurs dispositions ont d’ores et déjà été adoptés au niveau national et communautaire. Le frelon vespa velutina a été classé nuisible de catégorie 2 (arrêté du 26 décembre 2012) et le code rural prévoit qu’il peut « être nécessaire, dans un but d’intérêt collectif, de mettre en œuvre des mesures de prévention, de surveillance ou de lutte ».

En 2017, le ministère de l’environnement, dans un rapport portant sur la stratégie nationale concernant les espèces exotiques envahissantes, considérait comme nécessaire l’adoption de « mécanismes nationaux » pour répondre à l’invasion des frelons asiatiques.

Dans son rapport pour avis n° 266 du 10 octobre 2017 sur les crédits de la mission « Protection de l’environnement et prévention des risques », l’auteur de la présente proposition de loi faisait état de travaux financés par Commission européenne, dans le cadre du 7e programme d’action pour l’environnement (PAE), et partiellement par le ministère de l’agriculture et de l’alimentation visant à de développer des substances nocives exclusivement sur les frelons ainsi que des méthodes innovantes de destructions des nids.

Le 4 novembre 2019, dans sa proposition de résolution n° 2370 invitant le Gouvernement à engager un plan de lutte, de surveillance et de prévention contre les espèces exotiques envahissantes l’auteur de la proposition de loi proposait d’engager un plan de lutte, de surveillance et de prévention contre les espèces invasives fondé sur :

– un programme de recherche alternatif aux traitements pesticides s’appuyant sur les prédateurs naturels autochtones des dites espèces invasives exotiques ;

– des programmes coordonnés de lutte, mettant en synergie les différents services de l’État concernés pour développer des techniques de piégeage et de destruction ;

– une stratégie de communication et d’information des populations, des communes des professionnels et des particuliers ;

– la révision et la mise à jour de la liste des dangers sanitaires au titre du code rural afin de permettre à l’autorité administrative de définir des actions de surveillance, de prévention et de lutte comme le prévoient les articles L. 201‑4 et L. 201‑5 du code rural et de la pêche maritime ou d’approuver dans les conditions prévues à l’article L. 201‑12 un programme volontaire collectif d’initiative professionnelle.

Or, dans les faits, ces propositions concrètes tardent à être mise en œuvre.

Sans méconnaître les initiatives qui ont déjà pu être prises dans certains départements, le plus souvent à l’initiative des collectivités locales, force est de constater que la propagation du frelon asiatique est aujourd’hui plus rapide que la montée en puissance et l’efficacité d’un plan de lutte qui demeure désordonné.

Il est indispensable que l’État organise dans chaque département une réponse coordonnée avec l’ensemble des parties prenante : filière apicole, groupements de défense sanitaire, collectivités locales, Etablissements Publics de Coopération Intercommunale…

Cette proposition de loi vise donc à enclencher simultanément un ensemble de dispositifs qui, combinés, permettront de lutter plus efficacement contre ce fléau que constitue le frelon asiatique.

L’article 1 constate que l’arrêté du 26 décembre 2012 classant le frelon asiatique comme nuisible de catégorie 2 n’est aujourd’hui plus suffisant et propose de procéder au classement en nuisible de catégorie 1 du frelon asiatique afin de doter de moyens juridiques adaptés ceux qui ont la charge de lutter contre.

L’article 2 désigne l’État comme acteur principal et responsable de la lutte contre le frelon asiatique et les espèces invasives exotiques en lien avec la filière apicole, les groupements de défense sanitaire, les collectivités locales et les Établissements Publics de Coopération Intercommunale.

L’article 3 permet à tout particulier de signaler la présence d’un nid de frelons asiatiques sur sa parcelle et de demander à la préfecture sa destruction.

Les articles 4 et 5 concernent la mise en place de plan de lutte au niveau de chaque département.

Ces articles proposent de fixer des plafonds de déclenchement à la fois pour le plan de lutte collective, mais aussi pour le plan de lutte obligatoire. Ces plafonds ont volontairement été positionnés à un nombre de nids rapidement atteint car les signataires de cette proposition de loi considèrent que le dispositif de lutte obligatoire, contraignant à la déclaration du nid et ensuite à l’organisation de sa destruction, doit être privilégié pour parvenir à l’efficacité recherchée.

L’article 6 met les frais engendrés par cette lutte contre le frelon asiatique à la charge de l’État.

L’article 7 propose de faire de l’année 2022, l’année où la lutte contre le frelon asiatique sera considérée comme une grande cause nationale afin d’accélérer la prise de conscience par nos concitoyens des enjeux y afférant.

L’article 8 vise à associer la jeunesse de notre pays à l’effort de sensibilisation qui doit s’opérer. L’Éducation nationale sera mobilisée à cet effet afin que les programmes scolaires soient adaptés en conséquence.

Les articles 9 et 10 consacrent la désignation d’un délégué interministériel chargé de coordonner la lutte contre le frelon asiatique et les espèce exotiques invasives, afin de fluidifier la prise de décisions cohérentes dans le cadre de cette lutte. La Représentation nationale aura à connaître, tous les semestres, l’évolution des initiatives prises.

Tels sont, Mesdames, Messieurs, les objectifs de la présente proposition de loi.

 

 


proposition de loi

Article 1er

Le frelon asiatique peut être classé en animal nuisible de première catégorie.

Article 2

L’État s’engage, par l’intermédiaire du délégué interministériel chargé de coordonner la lutte contre le frelon asiatique et les espèces exotiques invasives, à mettre en œuvre, en lien avec la filière apicole, les groupements de défense sanitaire, collectivités locales et établissements publics de coopération intercommunale, des mesures préventives visant à faciliter la lutte biologique.

Les mesures susceptibles d’être prises pour lutter contre la prolifération du vespa velutina nigrithorax sont les suivantes :

1° La surveillance de la présence de cette espèce sur le territoire et l’évaluation de son impact sur la santé humaine et les milieux ;

2° La prévention du développement et de la prolifération de cette espèce ;

3° La gestion et l’entretien de tous les espaces où se développe ou peut se développer cette espèce ;

4° La destruction de spécimens de cette espèce sous quelque forme que ce soit au cours de leur développement, dans des conditions permettant d’éviter leur dissémination et leur reproduction ;

5° L’information du public, notamment sur les résultats de la surveillance mentionnée au 1°, sur les effets sur la santé humaine associés à cette espèce et sur les mesures de prévention et de lutte contre cette espèce ;

6° La valorisation et la diffusion des connaissances scientifiques relatives à cette espèce et à son impact sur la santé humaine et les milieux ainsi que la réalisation des travaux et recherches et, le cas échéant, de leurs applications ;

7° La valorisation, la diffusion et la coordination des actions de prévention, de lutte, de formation et d’information menées sur l’ensemble du territoire.

Article 3

Tout occupant légal d’une parcelle au sein de laquelle se trouve un nid de frelons asiatiques est tenu de procéder à la déclaration de ce nid auprès de la préfecture.

Article 4

Dans chaque département, le préfet peut déclencher un plan de lutte collective contre le frelon asiatique lorsque 500 nids sont détectés sur le territoire départemental.

Article 5

Dans chaque département, le préfet peut déclencher un plan de lutte obligatoire contre le frelon asiatique lorsque 1 000 nids sont détectés sur le territoire départemental.

Article 6

Les frais engendrés par les mesures de police administrative prises en application de la présente loi, notamment les mesures de destruction, sont à la charge de l’État.

Article 7

La lutte contre le frelon asiatique est déclarée « grande cause nationale 2022 ».

Article 8

Les programmes scolaires des classes des écoles élémentaires, des collèges et des lycées comportent, à compter de la rentrée 2019‑2020, un module de sensibilisation sur les conséquences de la propagation du frelon asiatique sur la biodiversité et sur la société. L’initiation à la fabrication et à l’installation de pièges sélectifs à frelon asiatique est encouragée dans chacun des établissements d’enseignement.

Article 9

Un délégué interministériel chargé de coordonner la lutte contre le frelon asiatique et les espèces invasives exotiques, directement rattaché au Premier ministre, peut être nommé. Les fonctions de ce délégué peuvent prendre fin lorsque le développement du frelon asiatique est endigué dans notre pays.

Article 10

Le délégué interministériel chargé de coordonner la lutte contre le frelon asiatique et les espèces exotiques invasives rend compte au Parlement, tous les six mois, de l’avancée des démarches entreprises.

Article 11

La charge résultant pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.