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N° 4397

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 juillet 2021.

PROPOSITION DE LOI

visant à modifier les modalités et les délais de désignation des assesseurs afin d’assurer la sérénité des scrutins,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)mmission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mmes MarieFrance LORHO et Emmanuelle MÉNARD,

députées.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les dernières élections régionales ont été marqués du sceau de l’approximation et du manque de fluidité. Si l’absence de distribution des professions de foi et de la propagande électorale a fait grand bruit, ce n’est pas le seul cafouillage que l’on a pu constater lors des dernières échéances électorales.

La majorité en place n’est pas seule responsable des approximations ayant entouré le scrutin. L’organisation même des opérations de vote, inscrite au sein de notre code électoral, présente des défaillances structurelles.

L’une d’entre elles a particulièrement été constatée lors des dernières élections régionales : la difficulté de rassembler suffisamment d’assesseurs dans un délai raisonnable afin de garnir les bureaux de vote. Le calendrier, la crise sanitaire ainsi que la forte abstention qui a caractérisé cette élection, ont compliqué la mobilisation de nos concitoyens pour assurer la sérénité des scrutins.

Pour cette élection en particulier, qui regroupait un scrutin régional et un départemental, deux fois plus d’assesseurs étaient nécessaires pour assurer la bonne tenue des bureaux de vote. Dans une ville moyenne comme La Rochelle, on compte, par exemple, 57 bureaux de vote, ce qui nécessite plus de 400 assesseurs sur l’ensemble de la journée de vote. À la veille du scrutin, la ville de Poitiers recherchait 212 assesseurs pour tenir les 53 bureaux de vote de la commune.

C’est une situation que l’on ne peut laisser perdurer au sein d’une nation précurseur en terme de démocratie. La désignation des assesseurs doit faire l’objet d’une organisation plus claire et davantage en phase avec les réalités du terrain.

L’état actuel du droit prévoit que les assesseurs doivent être désignés au plus tard à dix‑huit heures le troisième jour précédant le scrutin. C’est le sens de l’article R. 46 du code électoral qui dispose dans son alinéa 1 que : « les nom, prénoms, date et lieu de naissance et adresse des assesseurs et de leurs suppléants désignés par les candidats, binômes de candidats ou listes en présence, ainsi que l’indication du bureau de vote auquel ils sont affectés, sont notifiés au maire au plus tard à dixhuit heures le troisième jour précédant le scrutin. »

Afin de garantir la pluralité démocratique, l’article R. 44 du code électoral prévoit que ces assesseurs sont désignés par chaque candidat, binôme de candidats ou liste en présence, ou, à défaut, par le maire, parmi les conseillers municipaux dans l’ordre du tableau, puis, le cas échéant, parmi les électeurs de la commune.

Ce même article R. 44 du code électoral prévoit que, à titre de mesure de secours, si le jour du scrutin, les assesseurs se trouvent être inférieurs à deux, les assesseurs manquants sont pris parmi les électeurs présents sachant lire et écrire le français, du plus jeune au plus âgé. Ces mesures « bouche‑trou » ne sont pas suffisantes et ressemblent plus à un bricolage de dernière minute qu’à l’organisation apaisée d’un scrutin démocratique.

Ce point de vue est conforté par la jurisprudence du juge électoral qui a considéré que la circonstance que des assesseurs aient été en nombre insuffisant dans un bureau de vote est sans incidence sur la validité du scrutin si cette irrégularité n’a pas eu pour effet de permettre des manœuvres et de porter atteinte à la liberté et à la sincérité du scrutin dans ce lieu de vote (décision n° 135966 du Conseil d’Etat du 28 décembre 1992 ; décision AN n°78883 du Conseil constitutionnel « HauteCorse, 1re  circonscription » du 11 juillet 1978).

Pas de véritable règle donc, quant à la désignation des assesseurs et à leur nombre, pour autant que des manœuvres visant à porter atteinte à la liberté et à la sincérité du scrutin ne sont pas rendus possibles par les circonstances.

Ce flou est d’autant plus préoccupant que les articles précités sont des dispositions communes visant à s’appliquer aussi bien pour l’élection des députés que pour l’élection des conseillers départementaux, des conseillers métropolitains de Lyon, des conseillers municipaux ou des conseillers communautaires.

En Espagne par exemple, les assesseurs sont tirés au sort et ne peuvent se soustraire à leur obligation, sous peine de sanction judiciaire, sauf s’ils justifient d’un motif impérieux. Si ce texte n’a pas vocation à aller aussi loin dans la coercition, il vise malgré tout à prévoir un délai suffisamment long pour anticiper les besoins d’assesseurs, mais qui soit également suffisamment court pour que lesdits assesseurs puissent avoir une bonne visibilité quant à leur disponibilité le jour du scrutin.

Afin d’améliorer l’organisation des scrutins, ce texte vient proposer que soient désignés dix jours avant le jour du vote les assesseurs devant composer les équipes assurant le bon fonctionnement des bureaux de vote. En permettant plus d’anticipation, cette disposition facilitera et garantira la présence de suffisamment d’assesseurs le jour du scrutin.

 


proposition de loi

Article unique

Après l’article L. 56 du code électoral, il est rétabli un article L. 57 ainsi rédigé :

« Art. L. 57.  Chaque candidat, binôme de candidats ou chaque liste en présence doit désigner un assesseur et un seul, pour chaque bureau de vote, pris parmi les électeurs du département.

« Si les candidats, binômes de candidats, ou listes en présence ne sont pas en mesure de fournir un assesseur par bureau de vote, ils fournissent au minimum 15 % des assesseurs requis sous peine d’une amende de cinquième classe en application de l’article L. 131‑13 du code pénal pour le candidat.

« En cas de besoin, des assesseurs supplémentaires peuvent être désignés par le maire, parmi les conseillers municipaux dans l’ordre du tableau puis, le cas échéant, parmi les électeurs de la commune.

« Les éléments d’identification des assesseurs et de leurs suppléants, ainsi que l’indication du bureau de vote auquel ils sont affectés, sont notifiés au maire au plus tard à dix‑huit heures le dixième jour précédant le scrutin.

« Passé ce délai, et s’il manque encore des assesseurs, le maire les désigne parmi les personnes prévues au troisième alinéa du présent article.

« Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État. »