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N° 4444

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 septembre 2021.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

en faveur de la protection des mers et des océans,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Karine LEBON, Fabien ROUSSEL, Moetai BROTHERSON, Alain BRUNEEL, MarieGeorge BUFFET, André CHASSAIGNE, Pierre DHARRÉVILLE, JeanPaul DUFRÈGNE, Elsa FAUCILLON, Sébastien JUMEL, Manuéla KÉCLARD–MONDÉSIR, JeanPaul LECOQ, JeanPhilippe NILOR, Stéphane PEU, Hubert WULFRANC,

Député‑e‑s.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France est la deuxième puissance maritime mondiale. Avec près de 11 millions de kilomètres carrés, le domaine maritime français relève à 97 % des territoires d’outre‑mer. Du fait de sa présence sur plusieurs océans, il se caractérise par une multitude d’espaces et une grande diversité.

Pendant longtemps, la France n’a pas pris suffisamment la mesure de son statut de grande puissance maritime et de la responsabilité qui est la sienne dans la préservation des mers et des océans.

L’économie maritime française représente certes 14 % du PIB et 340 000 emplois, mais ces espaces maritimes restent encore méconnus, leur potentiel non valorisé et leurs ressources naturelles exceptionnelles insuffisamment protégées. 

De manière fort révélatrice, les mots «  mers  » et « océans » sont absents de notre loi fondamentale. Ils n’y ont jamais figuré, pas plus que dans la Charte de l’environnement.

Le temps est pourtant venu pour notre pays de prendre en compte solennellement sa dimension maritime de la France.

Les députés du Groupe GDR avaient proposé, dès juillet 2018, lors de la discussion du projet de loi constitutionnelle en faveur d’une démocratie plus représentative, responsable et efficace, de modifier l’article 34 de la Constitution pour étendre aux mers et aux océans les principes fondamentaux de préservation de l’environnement que la loi détermine.

L’amendement proposé par Huguette BELLO avait été adopté par une majorité de députés de toutes sensibilités. Mais l’abandon par l’exécutif de son projet de réforme constitutionnelle n’a pas permis à cette avancée d’aller à son terme.

Aujourd’hui les initiatives internationales qui se multiplient, sous l’égide des Nations Unies, tentent de mettre un terme au terrible cycle de déclin des mers et océans, où la communauté scientifique appelle à la protection d’au moins 30 % des océans de la planète, l’opportunité nous est offerte de consacrer l’importance vitale des mers et océans.

Ceux‑ci fournissent la moitié de l’oxygène que nous respirons et nourrissent plus d’un milliard de personnes.

Or le réchauffement climatique et l’élévation du niveau des océans menacent directement les écosystèmes, les moyens de subsistance et les infrastructures des zones côtières de basse altitude où vivent 680 millions de personnes. L’acidification des océans menace quant à elle l’ensemble de la chaîne alimentaire marine, fragilisant le plancton, les coraux et les mollusques.

Les quelque 8 millions de tonnes de déchets plastiques déversés en mer chaque année représentent un défi non moins considérable. Les océans contiendraient déjà a minima 150 millions de tonnes de déchets plastiques, dont une grande partie sous forme de microparticules absorbées par le zooplancton puis par les poissons. Outre la pollution physique et l’ingestion par les animaux marins, le plastique entraîne aussi une pollution chimique liée aux adjuvants et additifs ajoutés lors de sa fabrication. Il faut encore compter avec les autres pollutions aux hydrocarbures et la prolifération d’algues invasives liées aux effluents agricoles, qui favorisent l’eutrophisation et l’apparition de zones mortes toujours plus vastes, de la mer Baltique au golfe du Mexique.

La surpêche occasionne enfin de graves dégâts écologiques et représente une lourde menace économique pour notre modèle de pêche à taille humaine pourvoyeuse de nombreux emplois. D’après la FAO, une espèce de poisson sur trois serait aujourd’hui au bord de l’extinction, tandis que 7 des 10 espèces de poissons les plus importantes pour l’écosystème sont en voie de disparition. Si la surpêche n’est pas enrayée, les scientifiques s’entendent à dire que les principales ressources halieutiques seront épuisées d’ici 2050.

L’abstention de la France, à l’issue du congrès de l’IUCN à Marseille, sur le vote de la motion en faveur d’un moratoire sur les exploitations minières dans les grands fonds marins, ne rend que plus urgente l’inscription des mers et océans dans notre loi fondamentale. Celle‑ci constituerait un geste fort en faveur d’une réponse politique qui soit enfin à la hauteur des enjeux et du rang de puissance maritime de la France.

Cette inscription apparaît d’autant plus nécessaire que les appétits financiers qu’aiguise l’or bleu imposent une réaction collective d’ampleur afin de préserver pour l’avenir les richesses inouïes et le fantastique potentiel de développement que représentent les mers et les océans. C’est à cette condition que l’humanité pourra répondre durablement aux grands défis auxquels elle est confrontée.

Nous proposons ainsi dans l’article unique de la présente proposition de loi constitutionnelle de compléter le quinzième alinéa de l’article 34 de notre Constitution relatif aux principes fondamentaux que la loi détermine en matière de préservation de l’environnement par les mots « des mers et des océans ».

 

 

 


PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Le quinzième alinéa de l’article 34 de la Constitution est complété par les mots : « , des mers et des océans ; ».