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N° 4458

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 septembre 2021.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer l’arsenal législatif face à la multiplication d’actions d’entrave
à des activités agricoles, cynégétiques, d’abattage ou de commerce
de produits d’origine animale,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Xavier BRETON, Damien ABAD, Édith AUDIBERT, Thibault BAZIN, Valérie BAZINMALGRAS, Philippe BENASSAYA, AnneLaure BLIN, Émilie BONNIVARD, JeanYves BONY, JeanClaude BOUCHET, Bernard BOULEY, JeanLuc BOURGEAUX, Bernard BROCHAND, Fabrice BRUN, Jacques CATTIN, Gérard CHERPION, Dino CINIERI, Josiane CORNELOUP, Pierre CORDIER, MarieChristine DALLOZ, Rémi DELATTE, Fabien DI FILIPPO, Julien DIVE, Virginie DUBYMULLER, Claude de GANAY, JeanJacques GAULTIER, Philippe GOSSELIN, Victor HABERTDASSAULT, Patrick HETZEL, Mansour KAMARDINE, Guillaume LARRIVÉ, Marc LE FUR, Véronique LOUWAGIE, Emmanuel MAQUET, Gérard MENUEL, Jérôme NURY, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Bérengère POLETTI, Nathalie PORTE, Didier QUENTIN, Julien RAVIER, Frédéric REISS, JeanMarie SERMIER, Guy TEISSIER, Robert THERRY, Laurence TRASTOURISNART, Isabelle VALENTIN, Pierre VATIN, Charles de la VERPILLIÈRE, JeanPierre VIGIER, Stéphane VIRY,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis quelques années, nous assistons à une multiplication d’actions d’entrave à certaines activités comme l’agriculture, l’élevage, l’abattage, la transformation, le transport et le commerce de viande et de produits d’originale animale et la chasse : à titre d’exemple, 15 000 infractions dans des propriétés agricoles ont été recensées depuis novembre 2019 et 240 sabotages liés à la chasse enregistrés lors de la saison 2019‑2020. 

L’incendie d’un abattoir à Haut‑Valromey dans le département de l’Ain en septembre 2018 témoigne de la virulence de ces actions et de la radicalisation de certains militants. Cet incendie avait conduit 80 employés au chômage et entraîné plusieurs millions d’euros de préjudice.

Ces entraves, qui consistent à gêner, contraindre ou empêcher le déroulement normal d’activités pourtant autorisées, portent une atteinte à certains droits fondamentaux, tels que le droit de propriété.

Dans ce contexte, pour ne pas laisser la situation s’envenimer et dégénérer, a été créée une mission d’information qui s’était fixée pour objectif d’évaluer la réalité de ces phénomènes d’entrave et renforcer l’effectivité de la réponse pénale.

Les auditions auxquelles la mission a procédé ont mis en exergue un développement des entraves exercées par des militants animalistes. Ces entraves prennent des formes nouvelles (dégradations, intrusions, utilisation malveillante des réseaux sociaux, etc.). Elles sont aussi difficiles à appréhender pour les pouvoirs publics : par conséquent, peu de plaintes sont déposées et peu de condamnations sont prononcées. Les différentes infractions définies par le code pénal n’offrent que des outils incomplets pour les sanctionner.

Aussi, pour mieux lutter contre ces phénomènes d’entrave, il convient d’apporter une évolution à l’arsenal juridique existant, en modifiant le délit d’entrave, en créant un délit d’introduction illicite et enfin en élargissant la discrimination à l’exercice d’une activité professionnelle ou d’un loisir. Tel est l’objet de cette proposition de loi.

L’article 1er ajoute les actes d’intrusion et d’obstruction à la liste des moyens par lesquels le délit d’entrave puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende peut être commis ;

Il supprime la condition de concertation aujourd’hui nécessaire à la qualification du délit d’entrave, qui empêche actuellement la sanction d’une action d’entrave réalisée par un individu isolé.

Il introduit un nouvel alinéa visant à punir d’une peine de six mois d’emprisonnement et de 5 000 euros d’amende les actes de menaces, d’obstruction et d’intrusion ayant pour effet ou pour objet d’empêcher le déroulement d’activités sportives ou de loisir autorisées et exercées conformément à la loi ou au règlement.

L’article 2 introduit un délit punissant d’un an d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende l’introduction sans droit dans un lieu où sont exercées, de façon licite, des activités commerciales, industrielles, artisanales, agricoles ou de loisir, dans le but de troubler la tranquillité ou le déroulement normal de l’activité qui y est exercée. Cela faciliterait la qualification pénale d’actes d’intrusion dans certains établissements professionnels, en particulier agricoles, pour lesquels une infraction de violation de domicile ne peut être qualifiée du fait du caractère non clos de la propriété.

Ce délit peut être accompagné de circonstances aggravantes :

– lorsque les activités concernées sont soumises au respect de prescriptions sanitaires prévues par le droit de l’Union européenne, la loi ou le règlement et que l’introduction dans le lieu présente un risque sanitaire pour l’homme, les animaux ou l’environnement ;

– lorsque le but de l’introduction est de filmer ou capter les paroles prononcées dans ces lieux aux fins d’espionner autrui ou l’activité d’autrui ou de rendre publiques les images ou paroles captées.

L’article 3 ajoute l’activité professionnelle à la liste des mobiles constitutifs de discriminations, afin de punir de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende, en application de l’article 225‑2 du même code, les discriminations entravant l’exercice d’activités économiques sur le fondement de l’activité professionnelle exercée.

Il procède en conséquence à une modification afin d’exclure du champ des infractions les cas où l’activité professionnelle exercée constitue un motif légitime de discrimination.

L’article 4 introduit un délit punissant d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende la diffamation publique commise à l’encontre d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de l’activité professionnelle ou des loisirs des personnes diffamées.

L’article 5 introduit un délit punissant d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende la provocation à la discrimination à l’encontre d’une personne sur le fondement de son activité professionnelle ou de ses loisirs.


proposition de loi

Article 1er

L’article 431‑1 du code pénal est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa, les mots : « d’une manière concertée et » sont supprimés.

2° Au même alinéa, après les mots : « à l’aide de menaces », sont insérés les mots : « par des actes d’intrusion ou d’obstruction ».

3° Est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Les actes de menaces, d’obstruction et d’intrusion ayant pour effet ou pour objet d’empêcher le déroulement d’activités sportives ou de loisir autorisées et exercées conformément à la loi ou au règlement sont punis d’une peine de six mois d’emprisonnement et de 5 000 euros d’amende. »

Article 2

La section 1 du chapitre Ier du titre III du livre IV du code pénal est complétée par un article 431‑3 ainsi rédigé :

« Art. 4313. – Le fait de s’introduire sans droit dans un lieu où sont exercées, de façon licite, des activités commerciales, industrielles, artisanales, agricoles ou de loisir, dans le but de troubler la tranquillité ou le déroulement normal de l’activité qui y est exercée est puni d’un an d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende. Des circonstances aggravantes sont prévues :

« Lorsque les activités concernées sont soumises au respect de prescriptions sanitaires prévues par le droit de l’Union européenne, la loi ou le règlement et que l’introduction dans le lieu présente un risque sanitaire pour l’homme, les animaux ou l’environnement ;

« Lorsque le but de l’introduction est de filmer ou capter les paroles prononcées dans ces lieux aux fins d’espionner autrui ou l’activité d’autrui ou de rendre publiques les images ou paroles captées. »

Article 3

I. – Au dernier alinéa de l’article 225‑1 du code pénal, après le mot : « syndicales », sont insérés les mots : « , de l’activité professionnelle exercée ».

II. – L’article 225‑3 du code pénal est complété par un 7° ainsi rédigé :

« 7° Aux discriminations fondées sur l’activité professionnelle exercée. »

Article 4

La section 1 du chapitre V du titre II du livre II du code pénal est complétée par un article 225‑5 ainsi rédigé :

« Art. 2255. – Est punie d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ou de l’une de ces deux peines seulement, la diffamation publique commise à l’encontre d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de l’activité professionnelle ou des loisirs des personnes diffamées. »

Article 5

I. – Au septième alinéa de l’article 24 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, après le mot : « déterminée », sont insérés les mots : « de l’activité professionnelle ou des loisirs, ».

II. – La section 1 du chapitre V du titre II du livre II du code pénal est complétée par un article 225‑6 ainsi rédigé :

« Art. 2256.  Sont punis d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ou de l’une de ces deux peines seulement ceux qui, par l’un des moyens énoncés à l’article 23 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ont provoqué à la discrimination, à la haine ou à la violence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes sur le fondement de son activité professionnelle ou de ses loisirs. »