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N° 4550

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2021.

PROPOSITION DE LOI

visant à supprimer les droits de succession et les droits de donations
et à favoriser les transmissions du patrimoine,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire,
à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Éric CIOTTI, Nathalie SERRE, Charles de la VERPILLIÈRE, Valérie BEAUVAIS, Bernard PERRUT, Raphaël SCHELLENBERGER, JeanLouis THIÉRIOT, Robin REDA, Marc LE FUR, Josiane CORNELOUP, Guillaume PELTIER, Virginie DUBYMULLER, Éric PAUGET, JeanLuc BOURGEAUX, Laurence TRASTOURISNART, Frédéric REISS, Didier QUENTIN, JeanJacques GAULTIER, Bérengère POLETTI, Isabelle VALENTIN, JeanClaude BOUCHET, Vincent ROLLAND, Pierre VATIN, Vincent DESCOEUR, Frédérique MEUNIER, Thibault BAZIN, Édith AUDIBERT, Véronique LOUWAGIE, Michel VIALAY, Jacques CATTIN, Nathalie PORTE, Alain RAMADIER, Bernard BOULEY, PierreHenri DUMONT, Emmanuel MAQUET, Philippe BENASSAYA, JeanMarie SERMIER,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La fiscalité sur les donations et les successions nécessite d’être réformée pour favoriser les transmissions intergénérationnelles de patrimoine.

Avec un taux de taxation allant jusqu’à 45 % en ligne directe, la France est le pays qui taxe le plus lourdement les successions en Europe et le 3e dans le monde après le Japon et la Corée du Sud. Notre pays concède par ailleurs un des abattements en ligne directe les plus faibles du monde : 100 000 euros contre 1 million d’euros en Italie et désormais 11,2 millions de dollars aux États‑Unis. Concernant les donations, seul un abattement de 100 000 euros est accordé tous les 15 ans en ligne directe et de 31 865 euros entre grands‑parents et petits‑enfants.

Les tarifs élevés des « droits de mutation à titre gratuit » (DMTG) dissuadent aujourd’hui beaucoup de Français à effectuer des donations, réduisant ainsi la mobilité intergénérationnelle du capital qui n’échoit aux plus « jeunes » qu’au terme de la succession. Alors que l’âge moyen d’héritage ne cesse de croître (environ 52 ans en 2020), une manne importante échappe au pouvoir d’achat, régulièrement mis à mal, des jeunes générations, aux âges où elles sont le mieux en situation d’entreprendre et d’investir.

D’autre part, la fiscalité sur les donations n’encourage pas une transmission précoce du patrimoine à la génération suivante. En d’autres termes, le dispositif actuellement en vigueur est inefficient sur le plan économique puisqu’il concentre les capacités d’investissement sur des personnes âgées qui investissent moins.

Cette problématique se trouve accentuée par la crise sanitaire, avec une accumulation d’épargne conséquente (la Banque de France a estimé le 7 septembre 2021 le surplus d’épargne constitué en raison de la crise à 157 Mds€). Alors qu’une relance de notre économie est nécessaire, libérer cette épargne accumulée en la réorientant vers les générations ayant la forte propension à consommer et à investir est plus que jamais nécessaire.

Enfin, sur un plan plus conceptuel, cette lourde fiscalité sur les donations et les successions ne valorise pas suffisamment les valeurs de filiation et de transmission, pourtant au cœur de notre société. La notion d’héritage renvoie à notre enracinement et il est profondément injuste, après avoir acquitté toute une vie des impôts pour la constitution de son patrimoine, de devoir en payer de nouveau pour le transmettre à ses descendants.

Les Français souscrivent à cette démarche : comme le révèle une récente étude de France Stratégie, les impôts sur les successions et les donations font, plus qu’aucune autre imposition peut‑être, l’objet d’une hostilité unanime de la part des Français et ce quelle que soit leur situation socio‑économique (Document de travail de France Stratégie, La fiscalité des héritages : connaissances et opinions des Français, janvier 2018).

Afin de stimuler, la consommation pour relancer notre économie après la crise sanitaire et d’éviter de faire peser, sur les classes moyennes, de lourdes impositions sur le patrimoine issu du travail de toute une vie, l’imposition des transmissions à titre gratuit doit demeurer rigoureusement contenue.

Destinée à réformer le régime tarifaire des DMTG, cette proposition de loi vise à simplifier radicalement le barème appliqué aux transmissions en ligne directe.

Afin de prémunir les classes moyennes des effets délétères de ces impositions, tout en faisant contribuer les plus fortunés, de nouveaux abattements en ligne directe sont déterminés de façon à exonérer de tous droits, les successions dont la valeur nette totale de l’actif transmis est inférieure à 5 millions d’euros.

Dans le même but, l’abattement dont bénéficient, dans le cadre des donations, les petitsenfants est augmenté à 150 000 euros.

Enfin, dans le but de dynamiser la circulation intergénérationnelle des patrimoines, le délai de rappel fiscal des donations est porté à 5 ans.

L’article 1er modifie le tarif appliqué aux transmissions en ligne directe. Pour les successions en ligne directe, aucune fiscalité ne sera appliquée sur l’ensemble de l’actif successoral jusqu’à 5 millions d’euros. À cette fin, un abattement global de 5 millions d’euros sera réparti entre chacun des héritiers en ligne directe, au prorata de leur part dans l’ensemble de l’actif transmis.

Au‑delà de ce montant, le tarif sera de 20 % par part jusqu’à 5 millions d’euros puis de 30 % par part au‑delà de 5 millions d’euros. L’impôt sur les successions ne visera donc plus que les plus gros patrimoines

Concernant les donations en ligne directe et entre conjoints, le même barème est retenu, après application d’un abattement de 5 millions d’euros par donataire.

L’article 2 porte de 31 865 euros à 150 000 euros le montant de l’abattement appliqué pour une donation aux petits‑enfants.

L’article 3 réduit de 15 à 5 ans le délai dit de « rappel fiscal des donations », au‑delà duquel il n’est plus tenu compte, pour la liquidation des DMTG, des donations passées.

L’article 4 prévoit une compensation de la perte de recettes, résultant pour l’État, de cette réforme des droits de successions et donations par la création d’une taxe additionnelle à la taxe sur la valeur ajoutée.

 

 


proposition de loi

Article 1er

I. – Le C du VI de la section II du chapitre premier du titre IV de la première partie du code général des impôts est ainsi modifié :

1° L’article 777 est ainsi modifié :

a) Le tableau du quatrième alinéa est ainsi rédigé :

  

«

Fraction de part nette taxable

Tarif applicable en %

 

 

Jusqu’à 5 000 000 €

20

 

 

Au‑delà de 5 000 000 €

30

» ;

 

b) Le tableau du septième alinéa est ainsi rédigé :

 

«

Fraction de part nette taxable

Tarif applicable en %

 

 

Jusqu’à 5 000 000 €

20

 

 

Au‑delà de 5 000 000 €

30

» ;

 

c) Après le même tableau, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Pour établir les fractions de parts nettes taxables mentionnées dans les tableaux I et II, il est réparti, à proportion de la part nette revenant à chaque héritier ou donataire, un abattement de 5 000 000 € sur la valeur nette totale des biens transmis. »

d) Au neuvième alinéa, après le mot : « droits », sont insérés les mots : « de succession » ; e) Après le dixième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Il est appliqué aux donations réalisées entre collatéraux ou non‑parents un tarif unique de 20 %. »

2° L’article 779 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa du I, les mots : « un abattement de 100 000 € » sont remplacés par les mots : « l’abattement mentionné au huitième alinéa de l’article 777, » ;

b) Au début du premier alinéa du II, sont ajoutés les mots : « Sans préjudice de l’abattement mentionnée au I ».

Article 2

Au premier alinéa de l’article 790 B du code général des impôts, le montant : « 31 865 € » est remplacé par le montant : « 150 000 € ».

Article 3

Au deuxième alinéa de l’article 784 du code général des impôts, le mot : « quinze » est remplacé par le mot : « cinq ».

Article 4

La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à la taxe sur la valeur ajoutée.