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N° 4640

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 novembre 2021.

PROPOSITION DE LOI

visant à élargir les moyens d’intervention des forces de sécurité intérieure dans le cadre des trafics de stupéfiants,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Mme Typhanie DEGOIS, Xavier BATUT, Adrien MORENAS, Élisabeth TOUTUTPICARD, Annie CHAPELIER, Luc LAMIRAULT, Corinne VIGNON, Alexandra VALETTA ARDISSON, Sereine MAUBORGNE, Stéphane TROMPILLE, Jacqueline MAQUET, Frédéric BARBIER, M’jid EL GUERRAB, Bernard DEFLESSELLES, Véronique LOUWAGIE,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En 2019, les saisies de stupéfiants, tous produits confondus, représentaient plus de cent tonnes de produits confisqués sur le territoire national, et les saisies de certains produits comme l’herbe de cannabis ont augmenté de plus de 91 % en un an. Les quantités en question témoignent de la lutte sans relâche des forces de l’ordre contre le trafic de stupéfiants, mais démontrent également une large diffusion des drogues dans la société française.

Avec plus de la moitié des adultes Français qui déclarent avoir expérimenté au moins une fois l’usage du cannabis, la France est le premier pays européen en termes de consommation de cannabis avec plus de 900 000 usagers quotidiens, et se classe au troisième rang pour la consommation de cocaïne.

Les statistiques du ministère de l’intérieur, recueillies par l’Observatoire français des drogues et toxicomanies ([1]), confirment d’ailleurs cet accroissement des drogues en France avec un nombre d’interpellations pour infraction à la législation sur les stupéfiants qui est passé de 81 000 en 1995 à 198 000 en 2018. Alors que notre pays conduit l’une des politiques les plus répressives d’Europe en matière de lutte contre les stupéfiants, l’explosion de ces chiffres traduit les dérives d’une réalité alarmante qui pousse les pouvoirs publics à s’adapter pour lutter efficacement contre cette consommation croissante de stupéfiants.

Depuis le 1er septembre 2020, les forces de l’ordre peuvent dresser des amendes forfaitaires délictuelles de 200 euros pour usage de stupéfiants. Malgré les évolutions de l’arsenal judiciaire, et alors que les comités interministériels de lutte contre les stupéfiants se multiplient, les forces de l’ordre rencontrent toujours plus de difficultés en vue de la mise en place de systèmes de vidéoprotection pour lutter contre ces trafics. La législation reste lacunaire et ne leur permet pas d’utiliser de tels dispositifs à des fins de surveillance ciblant les lieux fréquentés régulièrement par les trafiquants.

Aujourd’hui, les modalités d’utilisation des caméras sont déterminées par les préfets après avis de la commission de vidéoprotection, et des restrictions de visionnage existent, bloquant l’enregistrement dès lors que les images obtenues révèlent l’intérieur des immeubles ou l’entrée d’un bâtiment. Étendre le champ d’application de la vidéoprotection aurait, en premier lieu, un rôle dissuasif et permettrait de réduire le trafic de stupéfiants. Par ailleurs, cet outil permettrait d’aider les services de police grâce à une constatation moins difficile des infractions.

Par ailleurs, si les forces de l’ordre veulent accéder aux images de surveillance filmant les parties communes d’un immeuble, une convention doit être conclue avec le syndic de celui‑ci, mais la convention limite les motifs d’intervention des forces de l’ordre aux seuls motifs d’occupation empêchant l’accès des habitants ou le bon fonctionnement des dispositifs de sécurité.

Afin de soutenir le travail des forces de l’ordre, l’article 1er prévoit d’autoriser le recours aux images de vidéoprotection des parties communes des immeubles d’habitation aux fins de lutter contre le trafic de stupéfiants.

L’article 2 propose de modifier le cadre de la vidéoprotection en permettant au Préfet, sans l’avis préalable de la commission de vidéoprotection, d’autoriser temporairement sur la base de faits avérés, l’utilisation d’images visant à lutter contre le trafic de drogue.

 

 


proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 272‑2 du code de la sécurité intérieure, il est inséré un article L. 272‑2‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 27221. – Lorsque des circonstances font redouter la commission imminente d’une infraction prévue à la section 4 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal, la transmission aux services chargés du maintien de l’ordre des images réalisées en vue de la protection des parties communes des immeubles collectifs à usage d’habitation est autorisée, aux fins d’assurer la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens, selon les modalités précisées à l’article L. 272‑2 du présent code. »

Article 2

Le chapitre II du titre V du livre II du code de la sécurité intérieure est complété par un article L. 252‑8 ainsi rédigé :

« Art. L. 2528. – Par dérogation aux dispositions de l’article L. 251‑3 du présent code, lorsqu’il est informé de circonstances faisant redouter la commission imminente d’une infraction prévue à la section 4 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal, le représentant de l’État dans le département et, à Paris, le préfet de police peuvent délivrer, sans l’avis préalable de la commission départementale de vidéoprotection, une autorisation provisoire d’utilisation d’un système de vidéoprotection permettant de visualiser les images des parties communes des immeubles d’habitation.

« Ce système de vidéoprotection est exploité dans les conditions prévues au présent titre pour une durée maximale de quatre mois.

« Le président de la commission est immédiatement informé de cette décision. Il peut alors la réunir sans délai afin qu’elle donne un avis sur la mise en œuvre de la procédure d’autorisation provisoire. »


([1])  Drogues, Chiffres clés - 8ème édition - Observatoire Français des drogues et toxicomanies - Juin 2019.