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N° 4880

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 janvier 2022.

PROPOSITION DE LOI

relative à la rémunération des artistes en arts visuels,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Fabienne COLBOC, Dominique DAVID, Anissa KHEDHER, Bertrand SORRE, Carole BUREAUBONNARD, Cécile RILHAC, Céline CALVEZ, Claire PITOLLAT, Corinne VIGNON, Daniel LABARONNE, Danièle CAZARIAN, Danielle BRULEBOIS, Éric GIRARDIN, Fiona LAZAAR, Florence GRANJUS, Florence PROVENDIER, Jacqueline DUBOIS, Laurence GAYTE, Laurence VANCEUNEBROCK, Marie SILIN, Michèle PEYRON, Mireille ROBERT, Nicole DUBRÉCHIRAT, Pascal BOIS, Pascale BOYER, Patrice PERROT, Philippe CHALUMEAU, Sandrine MÖRCH, Sereine MAUBORGNE, Sonia KRIMI, Souad ZITOUNI, Stéphane CLAIREAUX, Stéphane TESTÉ, Stéphane TROMPILLE, Thierry MICHELS, Thomas RUDIGOZ, Valérie OPPELT, Valérie THOMAS, Véronique HAMMERER, Yannick KERLOGOT, Yves BLEIN, Béatrice PIRON, Anne BRUGNERA, François CORMIERBOULIGEON, Monique LIMON,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les artistes en arts visuels participent par la diversité de leurs créations à la richesse culturelle de la France et à son rayonnement international.

Ils pratiquent le dessin, la gravure, l’illustration, la peinture, la photographie, la vidéo, la réalisation de performances, la céramique, le design, ou le graphisme, et participent à la diffusion de la culture sur tous nos territoires ainsi qu’à leur animation. Il est essentiel de leur apporter une juste reconnaissance de leur travail, ainsi qu’une rétribution à la hauteur de la richesse économique qu’ils génèrent.

Au travers de son rapport réalisé en février 2020 « L’auteur et l’acte de création », Bruno Racine mettait en lumière une dégradation de la situation économique et sociale des artistes‑auteurs.

Sur la base de ce rapport le Ministère de la Culture a lancé un travail de fond pour améliorer leurs conditions de création. L’un des objectifs poursuivis par le gouvernement est d’améliorer la rémunération du droit d’exposition des artistes par les structures publiques.

Actuellement, de nombreux lieux d’exposition dans le domaine des arts visuels s’exonèrent le de toute rémunération des artistes lorsqu’ils exposent leurs œuvres. De ce fait, la plupart des artistes en arts visuels sont à peine rémunérés pour leur travail ce qui entraîne une précarisation de leurs conditions de vie et de création. La pratique artistique ne doit pas être réservée aux seules personnes qui en ont les moyens. La crise sanitaire et économique liée à la pandémie de Covid‑19, qui a entraîné la fermeture des lieux culturels, a accentué encore davantage ces difficultés financières.

Pour remédier à cette situation, le ministère de la Culture a publié le 18 décembre 2019 une recommandation intitulée « Une rémunération du droit de présentation publique » qui recommande un minimum de rémunération au bénéfice des artistes en arts visuels au titre de la présentation publique de leurs œuvres dans le cadre d’une exposition monographique ou collective.

Ce minimum repose sur une base volontaire, excepté pour les établissements et structures labellisées bénéficiant d’un soutien du ministère de la Culture. Si cette recommandation est un premier pas important pour la reconnaissance matérielle du travail artistique au travers de sa rémunération, son absence de caractère contraignant en limite la portée. Aussi, elle n’englobe pas les structures qui bénéficient d’un soutien de l’État mais dont la tutelle est assurée par d’autres ministères que le ministère de la Culture, dans les domaines du patrimoine, militaire, scientifique, industriel et naturel (musées relevant du ministère des armées, de la recherche, de l’écologie, etc.).

Le premier objectif de cette proposition de loi est d’inscrire dans le code de la propriété intellectuelle cette obligation de rémunération minimum des artistes exposant dans les structures qui bénéficient d’un soutien de l’État. Il s’agit d’une mesure d’exemplarité de l’État en matière de respect du droit de la propriété intellectuelle et artistique. L’attribution d’aides publiques doit être conditionnée à la garantie que les artistes exposés lors d’une exposition temporaire bénéficient d’une rémunération.

Afin de veiller au respect de l’application de la législation et des bonnes pratiques professionnelles, la proposition de loi prévoit également la mise en place d’un service de médiation pour dénouer les litiges qui pourraient subvenir entre les artistes en arts visuels et les acteurs de l’aval (éditeurs, producteurs, diffuseurs).

Aussi, afin d’éviter que les artistes‑auteurs se voient imposer unilatéralement une cession gratuite de leurs droits d’auteur, la proposition de loi propose que cette cession devienne une faculté exclusive de l’artiste‑auteur.

La France doit se montrer à la hauteur de son ambition culturelle en s’assurant que les établissements qui reçoivent des subventions publiques rémunèrent les artistes en arts visuels qu’ils exposent.

L’article 1er propose de donner une valeur contraignante au principe de rémunération des artistes plasticiens exposant dans les établissements bénéficiant d’un soutien direct de l’État en l’inscrivant dans la loi, par l’introduction d’un article L. 122‑7‑1 au sein du code de la propriété intellectuelle. L’article renvoie au pouvoir réglementaire la définition d’une grille tarifaire de rémunération minimale.

L’article 2 prévoit la création d’un service de médiation pour aider à dénouer les litiges individuels opposant les artistes des arts visuels aux acteurs de l’aval (éditeurs, producteurs, diffuseurs).

L’article 3 prévoit que la cession gratuite des droits d’auteur doit faire l’objet d’une mention distincte au sein d’un contrat justifiant de l’intention libérale.

L’article 4 prévoit le gage de recevabilité de la présente proposition de loi.

 


proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 122‑7‑1 du code de la propriété intellectuelle, il est inséré un article L. 122‑7‑2 ainsi rédigé :

« Art. L. 12272. – La présentation publique d’une œuvre dans le cadre d’une exposition monographique ou collective organisée par un établissement bénéficiant du soutien direct de l’État donne lieu à une rémunération de son auteur sur la base d’une grille tarifaire de rémunération minimale définie par décret. »

Article 2

Il est créé, auprès du ministre chargé de la culture, un service de médiation qui peut être saisi par tout artiste plasticien en cas de litige avec un éditeur, un producteur ou un diffuseur. Ce service de médiation peut également être saisi par tout éditeur, producteur ou diffuseur en cas de litige avec un artiste plasticien.

Article 3

L’article L. 122‑7 du code de la propriété intellectuelle est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Toute cession de droits d’auteur à titre gratuit doit faire l’objet d’une mention distincte, justifiant l’intention libérale ; la promotion de l’auteur ou de ses œuvres ne saurait constituer une intention libérale au sens du présent article. »

Article 4

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.