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N° 5014

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 février 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à limiter le détournement des demandes
de titre de séjour pour soins,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Robin REDA, Émilie BONNIVARD, Édith AUDIBERT, Mansour KAMARDINE, Frédéric REISS, Philippe BENASSAYA, Valérie BEAUVAIS, JeanJacques GAULTIER, JeanPierre DOOR, Laurence TRASTOURISNART, Fabien DI FILIPPO, Pierre CORDIER, Dino CINIERI, Frédérique MEUNIER, Constance LE GRIP, Bernard BOULEY, Bernard DEFLESSELLES, Éric PAUGET, Brigitte KUSTER, Marine BRENIER, Véronique LOUWAGIE, PierreHenri DUMONT, Patrick HETZEL, Geneviève LEVY, Bernard REYNÈS, Pierre VATIN, Sandra BOËLLE, Charles de la VERPILLIÈRE, Bernard PERRUT, Stéphane VIRY, Michel VIALAY, Robert THERRY, Yves HEMEDINGER, Michel HERBILLON, JeanLuc REITZER, Éric CIOTTI, JeanLuc BOURGEAUX,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France a connu dans son histoire plusieurs vagues d’immigration. Essentiellement frontalière, elle s’est diversifiée tout au long du XXe siècle, tant dans les origines des personnes immigrées que pour les raisons motivant leur arrivée sur le territoire français.

La gestion de l’immigration en France et les conséquences économiques, démographiques et culturelles qui en découlent dépendent directement des politiques mises en place par les gouvernements successifs pour intégrer les populations étrangères au sein de la société française.

Avec un modèle d’intégration en panne, la France est aujourd’hui dans une situation de tension migratoire inédite face à des flux qui s’intensifient et une capacité d’accueil qui s’amenuise.

Si la crise sanitaire liée à l’épidémie du covid‑19 a fait baisser les flux migratoires vers la France en 2020, certaines procédures sont malheureusement dévoyées de leur sens initial. Ces détournements ont ainsi créé un appel d’air vers la France alimentant un surcoût de l’immigraton pour l’État qui n’est plus en capacité d’accueillir ces flux qui s’ajoutent au détriment notamment des personnes qui souhaitent le séjour en France. C’est le cas de la demande de titre de séjour pour soins.

Selon le rapport d’activité 2020 de l’Office français de l’immigration et de l’intégration, près de 25 987 demandes pour un titre de séjour pour soins ont été enregistrées. Nous pouvons regretter l’absence de données plus précises dans ce rapport d’activité notamment sur les coûts des soins apportés et sous quelle forme l’État aide les personnes accueillies à subvenir à leurs besoins vitaux dans le cadre de la demande de titre de séjour pour soins.

Concernant près de 127 nationalités recensées parmi les demandeurs, le rapport précise que ce sont les étrangers originaires de l’Algérie, la Côte d’Ivoire, la République Démocratique du Congo, le Cameroun et la République de Guinée qui arrivent en tête, représentant à eux 5 près de 35 % des demandes enregistrées.

Cette procédure régie par l’article L. 425‑9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile a dépassé le cadre de son champ d’action initial à portée de solidarité sanitaire envers les populations des pays les plus dépourvus en soins.

Tout d’abord, par deux décisions prises le 7 avril 2010, le Conseil d’État a donné une interprétation large de la législation en vigueur s’agissant des critères à remplir pour se voir octroyer un titre de séjour pour des raisons de santé.

En effet, le Conseil d’État estime qu’il faut désormais prendre en compte le manque d’accès voire l’absence de prise en charge médicale adaptée dans le pays d’origine. Le Conseil d’État précise aussi que la situation personnelle et financière du demandeur dont les circonstances exceptionnelles nécessitent la prise en charge des soins en France doit être prise en compte dans le traitement de la demande de titre de séjour pour soins.

La demande de titre de séjour pour soins est ensuite devenue un moyen d’alimenter un phénomène de “tourisme médical”. Outre les nationalités déjà mentionnées, la presse a rapporté que parmi les demandeurs figurent des Japonais, Canadiens, Américains, Émiratis ou encore Saoudiens, c’est‑à‑dire des pays où le système de santé est certes différent de la France mais reste développé ; la situation financière personnelle des demandeurs est alors prise en compte alors que ces dernières n’ont jamais contribué au système de solidarité français.

Enfin, une demande de titre de séjour pour soins semble constituer également une procédure de la seconde chance pour les personnes qui se sont déjà vues refuser une demande d’asile ou de séjour. C’est également dans la presse qu’un haut‑fonctionnaire a souligné que « le parcours migratoire revient fréquemment à ce que le dépôt d’une demande de titre de séjour pour soins soit formulée quand le candidat s’est vu refuser une demande d’asile. »

Par son modèle, le système de santé français est un exemple s’agissant de l’accès aux soins de la population française bien qu’on puisse déplorer un phénomène de non recours aux soins d’une partie de la population. Parallèlement, la loi permet que des étrangers puissent aussi bénéficier gratuitement des soins en France, les clandestins via l’aide médicale d’État, les autres étrangers malades par la demande de titre de séjour pour soins.

Bien que la prise en charge des étrangers présents sur notre territoire dans un état de santé critique, représentant une urgence vitale, correspond au socle de valeurs sur lequel repose la République française, celle‑ci est financée par l’impôt et les cotisations versées par les partenaires sociaux, représentant ainsi un coût important pour des situations d’urgence vitale parfois relative.

Ce surcoût de l’immigration en France provoqué par des flux additionnels est dès lors nourri par une application trop laxiste de la demande de titre de séjour pour soins, pouvant à terme fragiliser le système de santé français.

De plus, l’Office français de l’immigration et de l’intégration rappelle que la demande de titre de séjour pour soins “reste une exception française dans le monde” et offre la possibilité à beaucoup d’étrangers de se faire soigner sans plafond de dépense et sans avoir cotisé en France.

Il est donc urgent de mettre fin au dévoiement d’une procédure qui dans sa fonction originelle offre à titre exceptionnel la possibilité pour un étranger d’accéder à des soins qui n’existeraient pas dans son pays d’origine et participer à contenir la progression de certaines maladies graves dans le monde.

L’article 1er propose la clarification des raisons de la demande de titre de séjour pour soins afin de la recentrer sur ses objectifs initiaux c’est‑à‑dire permettre à une personne étrangère dont la vie est menacée par son état de santé et dont le système de santé du pays d’origine ne permet pas de recevoir des soins appropriés du fait de leur inexistence dans ledit pays de se soigner en France. La situation financière personnelle des demandeurs d’un titre de séjour pour soins ne sera donc plus appréciée et la procédure ne sera plus ainsi dévoyée. Par ailleurs, l’urgence vitale est recentrée par cette disposition qui permet un accueil pour soins plus adéquat.

L’article 2 vise à instaurer une plus grande transparence sur le coût pour l’État de l’octroi de titres de séjour pour soins vis‑à‑vis des Français. En l’état actuel, ces informations ne sont pas publiées et il est impossible de savoir précisément ce que représente la prise en charge médicale d’étrangers via cette procédure en France notamment à l’égard des contribuables.

 


proposition de loi

Article 1er

La première phrase du premier alinéa de l’article L. 425‑9 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifiée :

1° Le mot : « habituellement » est remplacé par le mot : « régulièrement » ;

2° Les mots : « offre de soins et aux caractéristiques du système de santé » sont remplacés par les mots : « inexistence des soins nécessaires ».

Article 2

Le Gouvernement remet un rapport annuel au Parlement faisant un état complet des coûts que représentent les personnes bénéficiant d’un titre de séjour pour soins en France, comprenant le type de soins procurés, le coût des soins procurés, le coût du logement des personnes accueillies pour soins en France, les ressources des personnes accueillies pour soins lors de leur accueil pour soins, le coût de déplacement des personnes accueillies pour soins au départ et vers leur pays d’origine, les personnes rétablies et qui ont effectivement pu repartir suite à leur séjour pour soins.