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N° 5015

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 8 février 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à mieux protéger les locataires bénéficiant d’une allocation logement et vivant dans un habitat nondécent,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

David LORION, Julien AUBERT, Nathalie BASSIRE, Valérie BAZIN‑MALGRAS, Jean‑Yves BONY, Sylvie BOUCHET BELLECOURT, Jean‑Pierre DOOR, Virginie DUBY‑MULLER, Manuéla KÉCLARD‑MONDÉSIR, Charles de la VERPILLIÈRE, Karine LEBON, Véronique LOUWAGIE, Max MATHIASIN, Philippe NAILLET, Jean‑Philippe NILOR, Maud PETIT, Nathalie PORTE, Jean‑Luc POUDROUX, Alain RAMADIER, Jean‑Hugues RATENON, Bernard REYNÈS, Nicole SANQUER, Raphaël SCHELLENBERGER, Jean‑Marie SERMIER, Olivier SERVA, Laurence TRASTOUR‑ISNART, Pierre VATIN,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain (SRU) puis la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ELAN) ont entre autres instauré des outils juridiques de lutte contre le logement locatif non‑décent. Il s’agissait notamment de mieux protéger les locataires de la non‑intervention de leur bailleur lorsque ce dernier ne respectait pas ses obligations de louer un logement décent (cf. décret n° 2002‑120 du 30 janvier 2002) doté des éléments conformes à l’usage d’habitation et se refusait de résorber des risques manifestes susceptibles de porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé de ses occupants.

Alors que dans notre pays nous connaissons une pénurie de logements sociaux – 2,2 millions de ménages sont toujours en attente d’une attribution – il est indispensable que l’ensemble du parc des logements déjà existants soit réellement opérationnel.

Aussi, la multiplication des cas de résidences devenues par leur vieillissement prématuré impropres à l’habitation, donc non‑décentes, oblige les bailleurs à une action vigoureuse d’entretien, de réparation des pannes et dysfonctionnements de matériels ainsi que de réhabilitation rapide et durable des logements et parties communes. La lutte contre la non‑décence (infiltrations, moisissure, champignon, problèmes électriques, etc.) touche aussi bien les logements anciens que les logements récents. Dans les DROM, l’habitat indigne concernerait près de 110 000 logements, soit 13 % du parc des 900 000 logements (la politique du logement dans les Outre‑mer – Rapport 728 de la délégation sénatoriale aux outre‑mer, 1er juillet 2021).

Ce sont en particulier les familles les plus modestes qui sont concernées par cet habitat non‑décent. Nombre d’entre elles qui perçoivent l’allocation logement sont obligées de continuer à payer leur loyer alors que leur logement n’est manifestement pas en conformité avec l’usage d’habitation prévue par la loi.

Pour les logements et les bailleurs concernés, si une procédure de constatation de la non‑décence peut être mise en œuvre par la Caisse des Allocations Familiales (CAF), les moyens d’incitation à agir du bailleur restent insuffisants et pas suffisamment coercitifs.

Sur la base d’un constat de non‑décence, donc d’une urgence, établi par la CAF, celle‑ci peut dans un certain délai ne plus verser l’allocation logement mensuel en tiers payant au bailleur, et la consigner jusqu’à 18 mois. Toutefois, le maintien et la conservation de l’allocation de logement peuvent être autorisés à titre exceptionnel, par décision de l’organisme payeur, pour une durée de six mois renouvelable une fois afin de répondre aux situations prévues par la loi (L. 542‑2 et L.831‑3 du Code de la Sécurité sociale).

Passé ce délai, et si les travaux de conformité ne sont toujours pas effectués, les mensualités consignées sont définitivement perdues pour le propriétaire récalcitrant.

Dans les cas pour lesquels l’allocation logement ne couvre pas l’intégralité du loyer, il reste donc un solde résiduel du loyer et des charges à payer par le locataire. En effet, le cadre législatif actuel lui impose de le régler au bailleur sous peine de résiliation du bail et d’expulsion. Le locataire a certes la possibilité de saisir un juge mais la procédure est souvent beaucoup trop longue et souvent inefficiente pour des ménages déjà précarisés.

Cette disposition est ressentie de manière injuste par les familles concernées qui souffrent déjà de conditions de logements parfois inacceptables avec des conséquences sur leur santé et leur sécurité. Le dispositif actuel concourt à ce que l’obligation d’agir du bailleur soit atténuée.

Actuellement, l’inexécution de travaux de réparation par le bailleur ne peut dispenser le preneur de payer le loyer. Or, c’est bien l’ensemble du loyer qui doit être concerné par une obligation de décence contractuelle qui n’est pas respectée par le bailleur.

Dans cette situation, il s’agit donc de permettre aussi au locataire, à partir de la constatation de la non‑décence du logement et/ou de l’effectivité de la consignation de l’Allocation logement par la CAF, sans attendre une décision du juge, de consigner auprès de la Caisse des dépôts sa part propre de loyer hors charges locatives.

Ainsi, ce sera la totalité du loyer hors charges locatives qui ne sera pas versée au propriétaire bailleur, mais consignée, pour lui être reversée quand il aura été constaté qu’il a bien réalisé les travaux et interventions nécessaires pour rendre à nouveau décentes les conditions d’habitation du logement.

Il vous est proposé dans un article unique de modifier l’article du Code de la Construction et de l’Habitation. Ainsi, au lieu de « s’acquitter » du montant du loyer diminué du montant des Allocations logements, le locataire « consigne à la Caisse des Dépôts » ce montant.

Il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, d’adopter la présente proposition de loi.

 


proposition de loi

Article unique

Au dernier alinéa de l’article L. 843‑1 du code de la construction et de l’habitation, les mots : « s’acquitte du » sont remplacés par les mots : « consigne à la caisse des dépôts le ».