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N° 5103

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 22 février 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à revaloriser le statut des accompagnants
des élèves en situation de handicap,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l'éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Yves HEMEDINGER, Damien ABAD, Emmanuelle ANTHOINE, Édith AUDIBERT, Nathalie BASSIRE, Valérie BEAUVAIS, Émilie BONNIVARD, JeanYves BONY, Ian BOUCARD, Bernard BOULEY, JeanLuc BOURGEAUX, Marine BRENIER, Jacques CATTIN, Dino CINIERI, Josiane CORNELOUP, MarieChristine DALLOZ, Claude de GANAY, Éric DIARD, Annie GENEVARD, Philippe GOSSELIN, Michel HERBILLON, Brigitte KUSTER, Marc LE FUR, Constance LE GRIP, Véronique LOUWAGIE, Éric PAUGET, Bernard PERRUT, Robin REDA, Frédéric REISS, JeanLuc REITZER, Vincent ROLLAND, JeanMarie SERMIER, Nathalie SERRE, Michèle TABAROT, Robert THERRY, Laurence TRASTOURISNART, Pierre VATIN, JeanPierre VIGIER, Stéphane VIRY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

À la rentrée scolaire 2021, le ministère de l’Éducation nationale recensait plus de 400.000 élèves en situation de handicap, soit une augmentation de 19 % en cinq ans et une multiplication par quatre depuis 2006, date à laquelle on dénombrait 100 000 élèves en situation de handicap.

Il est impératif de tout mettre en œuvre pour faciliter le parcours scolaire de ces élèves. Il nous incombe, au titre d’une obligation morale et éthique, de leur donner à chacun la possibilité et la chance de construire leur vie et leur avenir.

La loi du 11 février 2005 s’était fixée pour objectif de « proposer à chaque enfant ou adolescent handicapé, ainsi qu’à sa famille, un parcours de formation qui fait l’objet d’un projet personnalisé de scolarisation assorti des ajustements nécessaires en favorisant, chaque fois que possible, la formation en milieu scolaire ordinaire. »

Prenant acte de la forte augmentation des élèves en situation de handicap dans le système éducatif public, la loi du 26 juillet 2019 « pour une école de confiance » consacre intégralement son chapitre IV à l’école inclusive et notamment aux accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) pour lesquels elle amorce une amélioration de leur situation.

Au regard de l’inclusion scolaire, les accompagnants des élèves en situation de handicap sont la cheville ouvrière de l’Éducation nationale. Ils offrent à tous les enfants sans distinction, la possibilité de poursuivre un cursus scolaire au sein d’un système éducatif public adapté à leurs difficultés.

Cette grande majorité de femmes, recensées au nombre de 91.000, sont des actrices indispensables à la vie scolaire. Elles apportent une aide individuelle, mutualisée ou collective, pour l’inclusion scolaire en permettant aux élèves en situation de handicap d’accomplir des gestes qu’ils ne peuvent pas faire seuls. Elles travaillent en collaboration avec les enseignants et facilitent le contact entre ces élèves et leurs camarades. Les AESH permettent également de détecter les situations préoccupantes tel que le harcèlement scolaire.

Cependant, malgré l’importance de leurs missions au sein de notre service éducatif public et les quelques avancées créées par la loi du 26 juillet 2019, de nombreux rapports continuent de converger et pointent leur statut à la fois précaire et fragile.

Les AESH rencontrés dans le cadre de la création de cette proposition de loi ont tous souligné le manque de reconnaissance et de statut de leur profession, mettant en avant un salaire insuffisant étant donné les responsabilités qui leur sont attribuées ainsi qu’une valorisation trop peu présente de l’ancienneté.

Ils évoquent également des situations parfois dangereuses, tels que des blessures physiques et des élèves plus ou moins compliqués à accompagner, ou encore le constat d’une difficulté de travailler avec des enseignants qui ne reconnaissent pas forcément leurs compétences.

La crise sanitaire n’a fait que démontrer une fois de plus le manque de prise en compte de ces personnels par le ministère de l’Éducation nationale qui ne les a pas intégrés dans les protocoles sanitaires mis en place au sein des établissements scolaires. Ainsi, l’obligation de confinement des enseignants et de fermeture des classes en cas d’élèves positifs au covid ne s’appliquait pas aux AESH, qui pouvaient continuer d’exercer dans les autres classes dans lesquelles ils accompagnaient un élève en situation de handicap. Hors contexte de pandémie, les AESH n’ont quasiment jamais accès à l’intranet de l’établissement scolaire dans lequel est scolarisé l’élève qu’ils accompagnent. Ils ne peuvent donc pas être tenus informés des actualités de l’établissement ou tout simplement de l’absence d’un professeur.

L’enjeu de la revalorisation du statut des AESH est de leur offrir les garanties nécessaires à l’exercice d’un emploi protecteur mais aussi la reconnaissance qu’ils méritent au vu de leurs conditions de travail. En effet, nous ne pouvons décemment pas continuer à offrir à ces femmes et à ces hommes qui œuvrent tous les jours avec patience et bienveillance à l’inclusion de nos élèves, un revenu moyen de 760 euros par mois.

A plus forte raison que la constante augmentation depuis 2006 du nombre d’élèves en situation de handicap en milieu ordinaire pose le problème de recrutement de nouveaux AESH. Le faible salaire couplé à des conditions de travail parfois difficiles et à un statut inexistant rendent très difficile le recrutement de nouveaux AESH pour répondre à la demande croissante d’accompagnement.

Or, faute d’un accompagnement adapté, certains élèves en situation de handicap ne peuvent être scolarisés. Aujourd’hui, la pénurie d’AESH empêche la scolarisation pleine et entière de ces enfants et le droit à la scolarisation ainsi que l’inclusion du service éducatif public restent bien souvent des difficultés et non des acquis.

La précarité à laquelle font face les AESH implique de lourdes difficultés de recrutement qui portent atteinte à l’efficacité de l’accompagnement nécessaire aux élèves en situation de handicap. Il est donc d’autant plus nécessaire d’augmenter l’attractivité de cette profession. Ce n’est qu’à cette condition que nous pourrons assurer l’inclusivité de notre système éducatif public.

Tel est l’objectif de cette proposition de loi.

L’article 1 rappelle que les AESH relèvent du ministère de l’Éducation nationale.

Cet article fait également évoluer le statut des AESH en proposant que les accompagnants des élèves en situation de handicap recrutés en contrat à durée indéterminée forment un corps de catégorie C au sein de la fonction publique d’État. Les AESH seront donc titularisés de la fonction publique au bout de six ans d’exercice de leurs missions, un statut beaucoup plus protecteur que celui de contractuel de la fonction publique, statut actuel des AESH.

L’article 2 applique un coefficient de pondération de 1.25 aux heures d’accompagnement effectuées par les AESH afin de prendre en compte les temps de formations et de préparations nécessaires aux spécificités de leurs missions d’accompagnement. Ce coefficient de pondération permettra d’aligner leur temps de travail effectif sur celui d’un temps plein, et donc d’augmenter leur rémunération.

L’article 3 concerne la formation des accompagnants des élèves en situation de handicap. Il souligne le caractère obligatoire de leur formation continue et rappelle que cette formation doit leur être dispensée dès le début de leur prise en charge des élèves qui leur sont confiés, afin d’assurer leur connaissance des spécificités relatives aux handicaps pris en charge.

Il ouvre également la possibilité d’obtenir un diplôme ou une certification à l’issue de ces formations.

L’article 4 gage financièrement la présente proposition de loi.

proposition de loi

Article 1er

L’article L. 917‑1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le huitième alinéa est ainsi modifié :

a) Après le mot : « handicap », sont insérés les mots : « recrutés par contrat à durée déterminée » ;

b) À la fin, est ajoutée une phrase ainsi rédigée : « Ils relèvent du ministère de l’Éducation nationale. »

2° Après le même alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les accompagnants des élèves en situation de handicap recrutés par contrat à durée indéterminée forment un corps classé dans la catégorie C prévue à l’article 13 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Ils relèvent du ministère de l’Éducation nationale. »

Article 2

Après le sixième alinéa de l’article L. 917‑1 du code de l’éducation, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

 « Pour tenir compte des spécificités en matière de préparation et de recherches personnelles nécessaires à la réalisation des heures d’accompagnement, chaque heure d’accompagnement réalisée par les accompagnants d’élèves en situation de handicap est affectée d’un coefficient de pondération de 1,25. »

Article 3

Le cinquième alinéa de l’article L. 917‑1 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° La première phrase est remplacée par deux phrases ainsi rédigées : « La formation est obligatoire pour chaque accompagnant des élèves en situation de handicap. Elle est mise en œuvre en collaboration avec les associations d’aide aux familles d’enfants en situation de handicap, dès le début des missions d’accompagnement des accompagnants des élèves en situation de handicap afin de les former aux spécificités des handicaps accompagnés. »

2° Après la troisième phrase, il est inséré une phrase ainsi rédigée : « Elle peut donner lieu à l’attribution d’une certification ou d’un diplôme. »

Article 4

I. – La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

II. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée, à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.