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N° 5168

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 mars 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à réformer l’assurancecrédit,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Dominique DAVID, Monica MICHELBRASSART, Yves DANIEL, Laurence VANCEUNEBROCK, JeanMichel MIS, Muriel ROQUESETIENNE, JeanMarc ZULESI, Jacques MAIRE, Yannick HAURY, Daniel LABARONNE, Sophie BEAUDOUINHUBIÈRE, Sereine MAUBORGNE, AnneLaure CATTELOT, Fabrice LE VIGOUREUX, Catherine FABRE,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Lorsqu’une entreprise accorde un délai de paiement à son client, il en résulte un crédit interentreprises, élément indispensable aux échanges commerciaux, sur le marché domestique comme à l’export. Pour se protéger contre la défaillance de ses clients, le fournisseur peut recourir à un assureur‑crédit, qui l’informe sur leur solvabilité et lui permet d’être indemnisé en cas de non‑paiement, en contrepartie du paiement d’une prime et sous certaines limites de garantie. L’enjeu est d’autant plus important que 40 % des faillites seraient liées à des défauts de paiement et que le crédit interentreprises représentait en France 652 milliards d’euros à la veille de la pandémie.

Or la crise sanitaire et le premier confinement ont sensiblement aggravé les risques de défaillance des entreprises, tandis que les assureurs‑crédit réduisaient ou résiliaient leurs garanties. Cet effet en ciseau justifiait la mise en place ou le renforcement de dispositifs de complément d’assurance ou de réassurance publics, tout en confirmant le caractère procyclique de l’assurance‑crédit. À l’initiative du Gouvernement, la représentation nationale a donc décidé d’accorder la garantie de l’État à des opérations d’assurance et de réassurance publiques à hauteur de 15 milliards d’euros.

Il était donc légitime que l’Assemblée nationale souhaite faire le point sur les dispositifs déployés et, plus généralement, sur le marché français de l’assurance‑crédit. La commission des finances de l’Assemblée nationale a ainsi procédé le 10 février 2021 à l’audition des directeurs généraux des trois principaux assureurs‑crédit français. Elle a ensuite décidé, sur la proposition de son bureau, la création d’une mission d’information relative à l’assurance‑crédit. Celle‑ci a notamment cherché à envisager les voies d’un encadrement de la procyclicité de cet outil.

Si les dispositifs publics de complément d’assurance et de réassurance publics ont contribué à restaurer la confiance et à préserver le crédit interentreprises, demeurent en effet des difficultés structurelles, qui justifient une évolution du fonctionnement de l’assurance‑crédit. En particulier, un rééquilibrage des relations entre les assureurs‑crédit et leurs clients est nécessaire. Les clients doivent être moins « prisonniers » de leurs assureurs.

La mission d’information de la commission des finances a donc formulé dans son rapport présenté le 9 février 2022 (rapport n° 5030) un certain nombre de recommandations. L’objet de la présente proposition de loi est de donner une traduction législative aux principales d’entre elles.

L’article 1er introduit dans le code des assurances trois articles concernant spécifiquement l’assurance crédit, qui visent :

– à introduire dans la loi des dispositions équivalentes à celles des articles 3 et 8 de la convention du 17 juin 2013, aux termes desquelles, les assureurs‑crédit s’engagent à ne procéder à aucun retrait de garantie sur une base sectorielle ou départementale sans tenir compte de la situation particulière et des performances propres de l’entreprise (acheteur) évaluée et à ce que, sauf cas exceptionnels, les réductions ou résiliations de lignes de garantie ne soient effectives que dans un délai d’un mois après l’information des assurés ;

– à permettre aux assurés qui le souhaitent de souscrire des couvertures complémentaires dites top up ;

– à assurer la bonne information des entreprises acheteurs.

L’article 2 offre aux assurés la possibilité de résilier au bout de six mois les contrats d’une durée d’un an et à la date anniversaire de la signature les contrats pluriannuels.

L’article 3 tire les conséquences des articles 1er et 2.

L’article 4 prévoit la création, auprès de la Banque de France, d’un service de conseil et d’assistance technique en matière d’assurance‑crédit destiné aux entreprises.

L’article 5 met en place un suivi mensuel des encours garantis par l’assurance‑crédit par la Banque de France.

L’article 6 gage financièrement la proposition de loi.

 

 


proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 113‑4‑1 du code des assurances, sont insérés trois articles L. 113‑4‑2, L. 113‑4‑3 et L. 113‑4‑4 ainsi rédigés :

« Art. L. 11342. – L’assureur crédit ne procède à aucun retrait de garantie sans tenir compte de la situation particulière et des performances propres de l’entreprise évaluée.

« Sauf circonstances exceptionnelles, une réduction ou une résiliation d’une ligne de garantie décidée par l’assureur crédit prend effet un mois après l’information de l’assuré.

« Art. L. 11343. – L’assureur ne saurait s’opposer à la souscription d’une assurance crédit complémentaire à la police d’assurance déjà souscrite par un assuré.

« L’assureur crédit qui renonce à garantir une ou plusieurs créances détenues par son assuré sur un client ne peut s’opposer à la souscription d’un contrat d’assurance spécifique pour lesdites créances.

« Toute stipulation contraire aux deux alinéas précédents est réputée non écrite.

« Art. L. 11344. – L’assureur crédit propose aux clients de ses assurés de s’inscrire sur un portail d’information en ligne comportant des renseignements sur la garantie apportée par l’assureur crédit à ses assurés pour leurs clients.

« Les clients des assurés sont informés par l’assureur crédit des diminutions de leur notation et des réductions de garanties sur leurs créances.

« Un décret détermine les modalités d’application du présent article. »

Article 2

Après l’article L. 113‑12 du code des assurances, il est inséré un article L. 113‑12‑1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 113121 A. – La durée du contrat d’assurance crédit et les conditions de résiliation, particulièrement le droit pour l’assureur et l’assuré de résilier le contrat tous les ans, sont fixées par la police.

« Toutefois, l’assuré a le droit de résilier le contrat d’un an à tout moment à l’expiration d’un délai de six mois après la date de la signature du contrat, en adressant une lettre recommandée à l’assureur. La résiliation prend effet quinze jours après la réception de la lettre recommandée. Si le contrat est d’une durée supérieure à un an, l’assuré a le droit de résilier le contrat à la date anniversaire de sa signature, en adressant une lettre recommandée à l’assureur au plus tard quinze jours avant celle‑ci. »

Article 3

Au premier alinéa de l’article L. 111‑1 du code des assurances, la référence : « et L. 113‑4‑1 », est remplacé par les références : « , L. 113‑4‑1 à L. 113‑4‑4 et L. 113‑12‑1 A ».

Article 4

Après la première phrase du troisième alinéa de l’article L. 141‑7 du code monétaire et financier, est insérée une phrase ainsi rédigée : « Ces prestations comportent notamment un service de conseil et d’assistance technique aux entreprises en matière d’assurance crédit. »

Article 5

Au premier alinéa de l’article 58 de la loi n° 2013‑672 du 26 juillet 2013 de séparation et de régulation des activités bancaires, le mot : « trimestre » est remplacé par le mot : « mois ».

Article 6

La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.