LOGO

N° 4034

_____

ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

quINziÈme LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 31 mars 2021.

 

TEXTE DE LA COMMISSION
des lois constitutionnelles, de la lÉgislation et de l’administration gÉnÉrale de la RÉpublique

ANNEXE AU RAPPORT

PROPOSITION  DE  LOI

 

relative à l’évolution statutaire de la collectivité de Corse
afin de lutter contre le phénomène de spéculations foncière
et immobilière dans l’île.

(Première lecture)

Voir le numéro : 3928.


1

TITRE Ier

Lutter contre les phénomènes de spéculations foncière et immobilière en Corse

Article 1er

I. – À titre expérimental et pendant une durée de cinq ans à compter de la promulgation de la présente loi, l’Assemblée de Corse peut, par délibération, délimiter des périmètres dans lesquels peuvent être subordonnées à déclaration, afin de lutter contre les spéculations foncière et immobilière, les aliénations à titre onéreux d’immeubles ou de parties d’immeubles bâtis et non bâtis ou d’ensembles de droits sociaux situés sur tout ou partie de son territoire, donnant lieu à une transaction supérieure ou égale à un montant déterminé au mètre carré par décret en Conseil d’État, pris après avis de l’Assemblée de Corse.

bis (nouveau). – Un droit de préemption sur les aliénations déclarées en application du I peut être exercé par le président du conseil exécutif de Corse, qui peut le déléguer à un office ou une agence de la collectivité de Corse.

Pour des motifs d’intérêt général, dans le but de garantir l’exercice effectif du droit au logement de ses habitants en privilégiant l’accession sociale à la propriété et en favorisant la mixité sociale, d’encourager la construction de logements sociaux, de préserver l’accès aux services publics, de développer les réseaux, les infrastructures et les équipements ou de favoriser l’accueil, le maintien et l’extension des activités économiques, le président du conseil exécutif peut exercer ce droit de préemption, par décision motivée, dans un délai de deux mois à compter de la réception de la déclaration d’intention d’aliéner, si l’un des organismes ou collectivités mentionnés à l’article L. 210‑1 du code de l’urbanisme n’a pas exercé son droit de préemption durant ce délai.

Ce droit de préemption s’applique sans préjudice des droits de préemption mentionnés au titre Ier du livre II du code de l’urbanisme, qui ont un caractère prioritaire.

ter (nouveau). – Chaque aliénation mentionnée au I est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration d’intention d’aliéner faite par le propriétaire auprès de la collectivité de Corse selon les modalités définies à l’article L. 213‑2 du code de l’urbanisme.

À défaut d’accord amiable, le prix d’acquisition est fixé selon les modalités prévues aux articles L. 213‑4 à L. 213‑7 du même code.

Le silence du titulaire du droit de préemption à l’échéance du délai mentionné au deuxième alinéa du I bis du présent article vaut renonciation à l’exercice de son droit de préemption. L’aliénation peut alors être réalisée aux prix et conditions figurant dans la déclaration d’intention d’aliéner.

quater (nouveau). – Le titulaire du droit de préemption doit, dans un délai de cinq ans à compter de la prise d’effet de la préemption, affecter le bien à l’un des objets mentionnés au deuxième alinéa du I bis, qui peut être différent de celui mentionné dans la décision de préemption.

Lorsqu’un bien acquis par exercice du droit de préemption n’a pas été affecté dans les conditions prévues au premier alinéa du présent I quater, les articles L. 213‑11 et L. 213‑12 du code de l’urbanisme sont applicables.

Lorsque, après que le transfert de propriété a été effectué, la décision de préemption est annulée ou déclarée illégale par la juridiction compétente, les articles L. 213‑11‑1 et L. 213‑12 du même code sont applicables.

quinquies (nouveau). – Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État, pris après avis de l’Assemblée de Corse.

II. – Au plus tard trois mois avant la fin de l’expérimentation, le Gouvernement remet au Parlement un rapport procédant à son évaluation.

Article 2

Le I de la section III du chapitre Ier du titre Ier de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts est complété par un article 1407 quater ainsi rédigé :

« Art. 1407 quater. – I. – L’Assemblée de Corse peut, par une délibération, instaurer une taxe annuelle sur les logements meublés non affectés à l’habitation principale et situés dans des zones déterminées par décret en Conseil d’État pris après avis de l’Assemblée de Corse, à l’exception des immeubles ou droits immobiliers pour lesquels le droit de propriété du défunt n’a pas été constaté avant son décès par un acte régulièrement transcrit ou publié.

« Cette taxe sur les résidences secondaires prend la forme d’un pourcentage compris entre 0,1 % et 1 % de la valeur vénale réelle du bien à laquelle il aurait pu être vendu au 1er janvier de l’année de son recouvrement, lorsque cette valeur dépasse un montant déterminé au mètre carré par décret en Conseil d’État, pris après avis de l’Assemblée de Corse.

« II. – La taxe est due par toute personne, physique ou morale, propriétaire des biens mentionnés au premier alinéa du I, quel que soit le lieu de son domicile fiscal ou de son siège social. Son produit est reversé à la collectivité de Corse.

« III. – L’Assemblée de Corse peut, par délibération, instaurer des exonérations sur critères sociaux.

« Elle peut instaurer une modulation du pourcentage déterminé en application du second alinéa du I, à l’échelle communale, à partir des critères suivants : l’évolution du prix du foncier et de son taux de croissance, les bases locatives, la densité démographique et le taux de résidences secondaires de la commune.

« IV. – Les modalités d’application du présent article sont déterminées par décret en Conseil d’État, pris après avis de l’Assemblée de Corse. »

Article 3

Après le II de l’article L. 4424‑9 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – Le plan d’aménagement et de développement durable de Corse peut également, compte tenu de la pression foncière due au développement démographique ou à la construction de résidences secondaires, délimiter des zones communales d’équilibre territorial et social au sein desquelles sont susceptibles d’être prises, dans le respect de la libre administration des communes et du principe de non-tutelle d’une collectivité sur une autre, des prescriptions de nature à favoriser l’accession sociale à la propriété, la construction de logements sociaux et les activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles.

« Les activités d’hébergement touristique, autres que les hôtels, les terrains de camping, les chambres d’hôtes et les résidences de tourisme, ainsi que les activités relevant du I de l’article L. 752‑3 du code de commerce sont exclues du champ des activités commerciales, industrielles, artisanales, libérales ou agricoles mentionnées au premier alinéa du présent II bis. »

TITRE II

Créer un droit d’expérimentation législative relatif à la collectivité de Corse

Article 4

L’article L. 4422‑16 du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° Au premier alinéa du I, après les deux occurrences du mot : « dispositions », sont insérés les mots : « législatives ou » ;

2° Le II est ainsi modifié :

a) Au deuxième alinéa, les mots : « , dans le respect de l’article 21 de la Constitution, » sont supprimés ;

b) (nouveau) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Chaque année, avant l’ouverture de la session ordinaire de l’Assemblée de Corse, le Gouvernement remet au Parlement un rapport présentant les demandes qui lui ont été adressées sur le fondement du présent II ainsi que les réponses qui leur ont été apportées. » ;

3° Le III est ainsi rédigé :

« III. – Lorsque l’Assemblée de Corse estime que les dispositions législatives en vigueur ou en cours d’élaboration présentent, pour l’exercice des compétences de la collectivité de Corse, des difficultés d’application liées aux spécificités de l’île, elle peut demander au Gouvernement que le législateur lui ouvre la possibilité de procéder à des expérimentations comportant le cas échéant des dérogations aux règles en vigueur, en vue de l’adoption ultérieure par le Parlement de dispositions législatives appropriées.

« La demande prévue au premier alinéa du présent III est faite par délibération motivée de l’Assemblée de Corse, prise à l’initiative du conseil exécutif ou de l’Assemblée de Corse après rapport de ce conseil. Elle est transmise par le président du conseil exécutif au Premier ministre et au représentant de l’État en Corse.

« La loi fixe la nature et la portée de ces expérimentations, ainsi que les cas, conditions et délais dans lesquels la collectivité de Corse peut faire application de ces dispositions. Elle fixe également les modalités d’information du Parlement sur leur mise en œuvre.

« Les mesures prises à titre expérimental par la collectivité de Corse cessent de produire leur effet au terme du délai fixé si le Parlement, au vu du rapport d’évaluation qui lui est fourni, n’a pas procédé à leur adoption ou modification. »

Article 5

La charge pour la collectivité de Corse est compensée, à due concurrence, par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.