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N° 196

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 août 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à lutter contre les déserts médicaux,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Emmanuelle MÉNARD,

députée.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

« Les déserts médicaux, un "marronnier" de l’Assemblée ». Un « marronnier » qui mobilise puisque les propositions de loi sont déposées par tous les bancs de l’hémicycle depuis des années, avec une régularité de métronome. Et presque toujours rejetées ou dépossédées de leurs principaux attributs…

Pourtant, il nous faut aujourd’hui prendre le problème à bras le corps ! La France vit en effet un étrange paradoxe : elle n’a jamais compté autant de médecins tandis que les déserts médicaux ne cessent de s’étendre. Près d’un Français sur dix vit dans un désert médical. 9 000 communes ‑ ce qui représente tout de même quelques 5,3 millions d’habitants - sont en manque de médecins généralistes.

Les populations résidant dans une zone rurale isolée souffrent particulièrement de cette pénurie. Il en va de même dans la grande couronne des principaux centres urbains comme dans les centres de villes moyennes telle que Béziers.

Pour remédier à ces déserts médicaux, aux hôpitaux publics en sous‑effectifs, aux médecins à la retraite à qui l’on demande de continuer de travailler, on nous vante tantôt un prétendu progrès avec une santé dématérialisée, distante et déshumanisée, tantôt la possibilité pour les pharmaciens de prescrire et de délivrer eux‑mêmes des médicaments, tantôt ‑ en attendant les effets de la suppression du numerus clausus, que ne l’a‑t‑on fait plus tôt ‑ le recours aux médecins étrangers alors que, chacun le sait, ces praticiens sont souvent dans une situation très précaire. Ce bricolage ne semble pas satisfaisant.

Des solutions existent et l’objectif de cette proposition de loi est le suivant :

L’article 1er vise à lutter efficacement contre les déserts médicaux en créant des maisons de santé dans les déserts médicaux, dont les implantations sont encouragées par des exonérations fiscales dégressives. L’objectif est de délivrer des diagnostics ainsi qu’un suivi médical de qualité sans se cacher derrière la E‑santé.

L’article 2 vise à encadrer la durée des remplacements en encourageant l’implantation des médecins dans nos territoires même les plus reculés. De nombreux médecins généralistes installés s’interrogent quant à la grande difficulté de trouver des successeurs lorsqu’ils partent à la retraite, constatant que de nombreux médecins privilégient l’exercice de leur métier en tant que « remplaçants » et cela parfois pendant plus de dix ans.

L’article 3 rend obligatoire pour les étudiants en médecine un stage en zone sous‑dotée afin qu’ils connaissent mieux les particularités de ces territoires.

Les articles 4 et 5 visent à rétablir un indicateur territorial de l’offre de soins qui évalue la densité de l’offre de soins médicaux des territoires pour lutter efficacement contre les déserts médicaux.

 

 


proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 1411‑11‑1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1411‑11‑2 ainsi rédigé :

« Art. 1411112.  La création de maisons de santé dans les déserts médicaux est récompensée par trois années fiscales blanches pour tous les praticiens qui s’installent dans ces territoires.

« Ces praticiens font ensuite l’objet d’une exonération fiscale dégressive de :

« 1° 60 % pour les bénéfices réalisés pour les trois années suivantes ;

« 2° 40 % pour les bénéfices réalisés les quatrième et cinquième années suivantes ;

« 3° 20 % pour les bénéfices réalisés au cours de la sixième et septième années. »

Article 2

Après l’article L. 1411‑11‑1 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1411‑11‑2 ainsi rédigé :

« Art. 1411112.  Un médecin diplômé titulaire de sa thèse doit s’installer dans les cinq ans après l’obtention de son diplôme. »

Article 3

À la deuxième phrase du II de l’article L. 632‑2 du code de l’éducation, les mots : « en priorité » sont supprimés.

Article 4

L’article L. 1411‑11 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un indicateur territorial de l’offre de soins évalue la densité de l’offre de soins médicaux des territoires, pondérée par leur situation démographique, médicale, économique et sociale. L’indicateur est calculé chaque année, par spécialité médicale, par l’agence régionale de santé dans les lieux qu’elle délimite de manière à couvrir l’intégralité de son ressort territorial. L’indicateur est un outil d’aide à l’élaboration des documents d’orientation de la politique de soins, notamment du projet régional de santé, et à la décision d’ouverture, de transfert ou de regroupement des cabinets de médecins libéraux. » 

Article 5

I. – L’article L. 1434‑4 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° Au 1°, après le mot : « insuffisante », sont insérés les mots : « au regard de l’indicateur mentionné à l’article L. 1411‑11 » ;

2° À la première phrase du 2°, après le mot : « élevé », sont insérés les mots : « au regard de l’indicateur mentionné à l’article L. 1411‑11 ».

II. – Après le 20° de l’article L. 162‑5 du code de la sécurité sociale, il est inséré un 20° bis ainsi rédigé :

« 20° bis Les conditions à remplir pour être conventionné, notamment celles relatives aux zones d’exercice définies par l’agence régionale de santé en application de l’article L. 1434‑4 du code de la santé publique ; ».

Article 6

I. – La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

II. – La perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

III. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.