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N° 232

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 septembre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à maintenir les compétences « eau » et « assainissement »
dans les compétences facultatives des communautés de communes,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Pierre MORELÀL’HUISSIER, Christophe NAEGELEN, Guy BRICOUT, Estelle YOUSSOUFFA, Luc LAMIRAULT, Bertrand PANCHER, Jean-Félix ACQUAVIVA, Béatrice DESCAMPS, Max MATHIASIN, Charles de COURSON, Vincent SEITLINGER, Stéphanie GALZY, Fabien DI FILIPPO, Edwige DIAZ, Romain DAUBIÉ, Emmanuelle MÉNARD, Philippe LOTTIAUX, Véronique BESSE, Jean-Philippe TANGUY, Nicolas DUPONTAIGNAN, Louise               MOREL, Isabelle VALENTIN, Philippe SCHRECK, Christine ENGRAND, Nicolas FORISSIER, David HABIB, Victor HABERTDASSAULT, Sébastien CHENU, Julien ODOUL, Philippe LOTTIAUX, Josiane CORNELOUP, Frédéric CABROLIER, Hervé de LÉPINAU, Alexis JOLLY, Bénédicte AUZANOT, Hélène LAPORTE, Stéphanie KOCHERT, Michaël TAVERNE, Meyer HABIB, Mathilde PARIS, Emmanuel MANDON, Hubert BRIGAND, Romain BAUBRY, Thomas MÉNAGÉ, Thierry FRAPPÉ, Nicolas MEIZONNET, Jean-Luc BOURGEAUX, Yannick FAVENNECBÉCOT, Florence GOULET, Thibault BAZIN, Jean-François LOVISOLO,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La loi n° 2015‑991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République a transformé la compétence eau et assainissement jusqu’alors optionnelle en une compétence obligatoire à partir du 1er janvier 2020. Depuis cette compétence est exercée de plein droit par les communautés de communes.

Le transfert obligatoire des compétences relatives à l’eau et à l’assainissement ne fut pas envisagé initialement par le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République, notamment par ses articles 18 et 20, qui portaient sur le renforcement de l’intégration communautaire des communautés de communes ou des communautés d’agglomération, tel qu’il fut présenté en Conseil des ministres. Il a été intégré dans ce projet de loi avec l’adoption de trois amendements présentés par le Gouvernement durant sa discussion en première lecture à l’Assemblée nationale.

Lors de l’examen de ce projet de loi en deuxième lecture, le Sénat a, sur proposition de sa commission des lois, transféré l’eau et l’assainissement dans le champ des compétences optionnelles. Par la suite, l’Assemblée nationale a rétabli en deuxième lecture sur ce point précis le dispositif qu’elle avait adopté lors de son premier examen. La commission mixte paritaire, qui fut réunie sur ce projet de loi, aboutit à un compromis dans ce domaine en reportant l’intégration de l’eau et de l’assainissement dans le champ des compétences obligatoires des communautés de communes ou des communautés d’agglomération au 1er janvier 2020. Le texte arrêté par la commission mixte paritaire fut adopté respectivement par l’Assemblée nationale et le Sénat le 16 juillet 2015.

Historiquement, en 2016, selon l’Observatoire des services publics d’eau et d’assainissement, 23 688 personnes publiques locales ont en charge 34 714 services publics d’eau potable, d’assainissement collectif et d’assainissement non collectif en France, 21 488 collectivités locales (communes et établissements publics de coopération intercommunale) étaient en charge de 32 508 services d’eau et d’assainissement : dont 8 747 communes pour l’eau potable, 13 000 pour l’assainissement collectif et 1 774 pour l’assainissement non collectif. Plus précisément, selon les chiffres avancés par cet organisme, la gestion de ces services publics est assurée par des communes dans plus de 73 % des cas concernant l’eau potable, 88 % concernant l’assainissement collectif et 53 % concernant l’assainissement non collectif. Ainsi, en 2017, les compétences relatives à l’eau et à l’assainissement sont encore très largement communales, même si en matière d’assainissement non collectif la présence des intercommunalités est plus importante du fait, notamment, que - très souvent - les habitations non raccordables au service d’assainissement collectif ne sont pas suffisamment nombreuses à l’échelle des communes pour justifier la mise en place d’un service propre.

De ce fait, il existe encore une opposition très forte de nos élus municipaux pour le transfert obligatoire des compétences relatives à l’eau et à l’assainissement des communes aux communautés de communes ou aux communautés d’agglomération.

Ce transfert est aussi vécu comme un affaiblissement du rôle de la commune et de son rôle de cellule de base de la démocratie locale. La commune était perçue comme la plus à même de gérer l’eau et l’assainissement puisqu’elle reste compétente en matière de distribution d’eau potable aux termes de l’article L. 2224‑7‑1 du code général des collectivités territoriales.

De plus, les élus craignent que ce transfert de compétences obligatoire n’aboutisse pas à de réelles économies d’échelle, mais bien au contraire à une augmentation des coûts de fonctionnement des services concernés, pour une qualité qui ne sera sans aucun doute pas meilleure, et - in fine - à une augmentation du coût pour les usagers. À l’heure actuelle, dans de nombreuses communes les services relatifs à l’eau et à l’assainissement au sens large sont financièrement gérés avec une très grande frugalité. Pour cause, dans de nombreux cas ils sont assurés de façon bénévole ou quasi‑bénévole par des élus municipaux, ainsi que par des agents communaux polyvalents ou à temps non‑complet. Or, la prise en charge systématisée de l’eau et de l’assainissement par les communautés de communes ou les communautés d’agglomération en 2020, comme le prévoit à ce jour la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, impliquera nécessairement la mise en place de services intercommunaux éponymes avec - en filigrane - le recrutement de personnels et - par là - l’engagement assuré de nouvelles dépenses de fonctionnement non négligeables.

À la suite du vote de la loi n° 2019‑1461 du 27 décembre 2019 relative à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique et notamment les dispositions du III de son article 14, les parlementaires ont permis aux communautés de communes de pouvoir déléguer par convention tout ou partie des compétences eau et assainissement à leurs communes membres ou à un syndicat de communes existant au 1er janvier 2019 et inclus en totalité dans leur périmètre.

Cette évolution a été appuyée par des remontées d’élus situés dans des territoires où le transfert de l’eau et/ou de l’assainissement a donné lieu à des dysfonctionnements techniques ou à des dérives financières. Par cet article, les parlementaires et le Gouvernement confirment que les communautés de communes ne sont pas dans l’absolu l’échelon le plus pertinent pour assurer l’exercice de ces deux compétences.

Enfin, le principe de subsidiarité, tel qu’il est consacré par le deuxième alinéa de l’article 72 de la Constitution, impose aux pouvoirs publics et donc à l’État de laisser le soin aux élus locaux de déterminer librement quel est niveau territorial le plus pertinent ou le plus à même de mener au mieux une mission de service public, avec la plus grande efficience fonctionnelle ainsi que financière.

C’est pourquoi, il ne semble pas pertinent de devoir imposer un seul et même modèle d’organisation dans les domaines de l’eau et de l’assainissement, mais plutôt de faire confiance à l’intelligence des élus locaux afin qu’ils s’organisent de la façon qui leur semblera la plus adaptée pour leur territoire.

Il est dès lors préférable que l’eau et l’assainissement demeurent après le 1er janvier 2020 des compétences optionnelles pour les élus des communes, des communautés de communes et des communautés d’agglomération.

Cette nouvelle évolution juridique ne fera d’ailleurs pas obstacle à ce que les communes et les communautés de communes concernées puissent procéder librement à un transfert de ces compétences avant ou après 2026.

L’article 1er prévoit de maintenir la compétence eau et assainissement dans les compétences facultatives des communautés de communes

L’article 2 prévoit de modifier le seuil d’habitants de 3 000 à 5 000 habitants pour lequel une commune peut prendre en charge dans son budget propre des dépenses au titre des services publics à caractère industriel ou commercial exploités en régie, affermés ou concédés par la commune.

L’article 3 prévoit de créer une distinction nouvelle entre la gestion des eaux pluviales et la compétence assainissement pour les communautés de communes. Une jurisprudence du Conseil d’État relative à une communauté urbaine précise que la compétence « eau et assainissement » inclut la gestion des eaux pluviales. Or, cette interprétation extensive n’est pas nécessairement adaptée en milieu rural.

Cette lecture juridique représente un transfert de compétences pour les intercommunalités qui engendre des charges supplémentaires pour de nombreuses communautés de communes.

Cette distinction nouvelle permettra aux communautés de communes qui font le choix d’exercer la compétence assainissement, de ne pas intégrer la compétence eaux pluviales.

Tel est l’objet de la présente loi.


proposition de loi

Article 1er

Le titre Ier du livre II de la cinquième partie du code général des collectivités territoriales est ainsi modifié :

1° L’article L. 5214‑16 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– les 6° et 7° sont abrogés ;

– le treizième alinéa est supprimé ;

b) Les 6° et 7° du II sont ainsi rétablis :

« 6° Assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L. 2224‑8 ;

« 7° Eau ; »

2° L’article L. 5216‑5 est ainsi modifié :

a) Le I est ainsi modifié :

– les 8° et 9° sont abrogés ;

– au treizième alinéa, les mots : « des compétences mentionnées aux 8° à » sont remplacés par les mots : « de la compétence mentionnée au » ;

– aux quatorzième et dix‑septième alinéas, la référence : « treizième » est remplacée par la référence : « onzième » ;

– au quinzième alinéa, les références : « treizième et quatorzième » sont remplacées par les références : « onzième et douzième » ;

b) Les 2° et 3° du II sont ainsi rétablis :

« 2° Assainissement des eaux usées, dans les conditions prévues à l’article L. 2224‑8 ;

« 3° Eau ; ».

Article 2

Au huitième alinéa de l’article L. 2224‑2 du code général des collectivités territoriales, les deux occurrences du nombre : « 3 000 » sont remplacées par le nombre : « 5 000 ».

Article 3

Le 6° du II de l’article L. 5214‑16 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction issue de l’article 1er de la présente loi, est complété par les mots : « , et, si des mesures doivent être prises pour assurer la maîtrise de l’écoulement des eaux pluviales ou des pollutions apportées au milieu par le rejet des eaux pluviales, la collecte et le stockage de ces eaux ainsi que le traitement de ces pollutions dans les zones délimitées par la communauté en application des 3° et 4° de l’article L. 2224‑10 du présent code ».