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N° 246

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 septembre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à mieux qualifier certains comportements
particulièrement dangereux au volant,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Xavier BRETON, Valérie BAZIN-MALGRAS, Émilie BONNIVARD, Éric CIOTTI, Pierre CORDIER, Francis DUBOIS, Nicolas FORISSIER, Patrick HETZEL, Philippe JUVIN, Michel HERBILLON, Yannick NEUDER, Alexandre PORTIER, Pierre VATIN, Stéphane VIRY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En 2021, 3 219 personnes sont décédées sur les routes de France métropolitaine ou d’outre‑mer. Ce chiffre, inférieur de 8 % à celui de 2019, est historiquement bas. Il s’agit de la plus faible mortalité routière enregistrée depuis 1926 en dehors de l’année 2020 très impactée par les restrictions de circulation imposées par la gestion de la pandémie de COVID‑19.

Les progrès réalisés ces dernières années démontrent qu’il est toujours possible de sauver des vies.

Cette baisse de la mortalité sur les routes est notamment due à la loi du 12 juin 2003 qui a procédé à une aggravation sensible des dispositions de droit pénal applicables en cas d’accidents mortels de la circulation. Ces sanctions répriment de façon spécifique et distincte les comportements qui ont causé un accident mortel. Mais quels que soient le comportement et sa dangerosité, le même terme est employé pour désigner juridiquement ces drames : homicide involontaire. Or, dans les cas les plus graves, les familles et proches de victimes n’acceptent pas, et on le comprend, l’utilisation du mot « involontaire ».

Ainsi, la proposition de loi que je vous soumets vise à limiter l’emploi du terme « homicide involontaire » pour les homicides provoqués par maladresse, imprudence, inattention ou négligence.

En revanche, pour les homicides provoqués par un comportement particulièrement dangereux : violation caractérisée des règles du code de la route, conduite sous l’emprise d’un état alcoolique, conduite sous l’emprise de stupéfiants, conduite sans permis et excès de vitesse supérieur à 50 km/heure, le délit ne serait plus qualifié d’homicide involontaire mais « d’homicide par mise en danger caractérisée de la vie d’autrui ».

L’infraction ainsi renommée ne modifie pas l’échelle des peines applicables. Elle introduit simplement un changement sémantique qui répond aux légitimes attentes des familles des victimes et qui permettra d’apaiser leur douleur et de faciliter le travail de deuil.

Cette évolution permettra aussi de rappeler que la violence routière n’est pas une fatalité, mais qu’elle résulte le plus souvent du comportement particulièrement inadmissible de certains conducteurs. Il en est ainsi par exemple de la conduite sous l’emprise de l’alcool qui demeure, pour la sixième année consécutive, la première cause de mortalité au volant.

Cette proposition de loi s’inspire de celle qui avait été présentée le 9 novembre 2005 lors de la XIIème législature par mon prédécesseur, Monsieur Jean‑Michel BERTRAND, membre du Conseil national de la sécurité routière et auteur d’un rapport sur l’accès des jeunes au permis de conduire. Elle demeure malheureusement toujours d’actualité.


proposition de loi

Article 1er

L’article 221‑6‑1 du code pénal est ainsi rédigé :

« Art. 22161. – Lorsque la maladresse, l’imprudence, l’inattention, la négligence ou le manquement à une obligation de sécurité ou de prudence prévu à l’article 221‑6 est commis par le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, l’homicide involontaire est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende.

« La peine est portée à sept ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende lorsque le conducteur, sachant qu’il vient de causer un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité civile ou pénale qu’il peut encourir. »

Article 2

Après l’article 221‑6‑1 du code pénal, il est inséré un article 221‑6‑1‑1 ainsi rédigé :

« Art. 221611. – Le délit d’homicide par mise en danger caractérisée de la vie d’autrui, puni de sept ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende, est constitué par le fait, pour le conducteur d’un véhicule terrestre à moteur, dans les conditions prévues à l’article 221‑6, de causer la mort d’une personne dans l’une des circonstances suivantes :

« 1° Le conducteur a commis une violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence prévue par la loi ou le règlement autre que celles mentionnées ci‑après ;

« 2° Le conducteur se trouvait en état d’ivresse manifeste ou était sous l’empire d’un état alcoolique caractérisé par une concentration d’alcool dans le sang ou dans l’air expiré égale ou supérieure aux taux fixés par les dispositions législatives ou règlementaires du code de la route, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le même code et destinées à établir l’existence d’un état alcoolique ;

« 3° Il résulte d’une analyse sanguine que le conducteur avait fait usage de substances ou de plantes classées comme stupéfiants, ou a refusé de se soumettre aux vérifications prévues par le code de la route destinées à établir s’il conduisait en ayant fait usage de stupéfiants ;

« 4° Le conducteur n’était pas titulaire du permis de conduire exigé par la loi ou le règlement ou son permis avait été annulé, invalidé, suspendu ou retenu ;

« 5° Le conducteur a commis un dépassement de la vitesse maximale autorisée égal ou supérieur à 50 km/heure.

« Les peines sont portées à dix ans d’emprisonnement et à 150 000 euros d’amende lorsque l’homicide par mise en danger caractérisée de la vie d’autrui a été commis avec deux ou plus des circonstances mentionnées aux 1° à 5° du présent article, ou lorsque le conducteur, sachant qu’il vient de causer ou d’occasionner un accident, ne s’est pas arrêté et a tenté ainsi d’échapper à la responsabilité civile ou pénale qu’il peut encourir. »