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N° 307

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à étendre les pouvoirs de police des maires en matière maritime,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Alexandra MARTIN, Emmanuelle ANTHOINE, JeanYves BONY, JeanLuc BOURGEAUX, Fabrice BRUN, Éric CIOTTI, Christelle D’INTORNI, Virginie DUBYMULLER, Nicolas FORISSIER, Mansour KAMARDINE, Yannick NEUDER, Éric PAUGET, Alexandre PORTIER, Nicolas RAY, Vincent SEITLINGER, Nathalie SERRE, JeanPierre TAITE, Stéphane VIRY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La France dispose d’une très grande diversité d’espaces naturels côtiers, sources d’une importante richesse paysagère et écologique et supports de nombreuses activités économiques. Très attractifs, les littoraux français connaissent une démographie et une fréquentation croissantes.

Ils concentrent ainsi de plus en plus d’enjeux environnementaux, sociaux et économiques dans un contexte évolutif marqué par des influences continentales, marines, atmosphériques et humaines, auxquelles s’ajoutent désormais les effets du changement climatique et notamment l’élévation du niveau marin.

Présente dans tous les océans sauf l’Arctique, la France dispose de 20 000 km de côtes. Sur nos littoraux, la densité de la population est 2,5 fois supérieure à la moyenne de l’hexagone et c’est la première destination touristique des Français ! En première ligne face au changement climatique et à ses risques les plus dévastateurs, les littoraux sont aussi fragiles que précieux.

En effet, diverses activités s’exercent sur le littoral, parmi lesquelles la pêche, le tourisme, l’industrie, l’agriculture et les loisirs. Il est donc essentiel de concilier les enjeux de protection des mers et le maintien des activités économiques locales qui font vivre des pans entiers de professionnels et de populations.

Dans les communes littorales, l’article L. 2212‑3 du Code Général des Collectivités Territoriales confie au maire un pouvoir de police générale s’exerçant sur le rivage jusqu’à la limite des eaux. L’article L. 2213‑23 de ce même code lui donne aussi un pouvoir de police administrative spéciale des baignades et activités nautiques pratiquées à partir du rivage par les engins de plage (matelas pneumatiques, bouées diverses, etc.) et les engins non immatriculés (planches à voile, planches nautiques tractées ou kite surfs, etc.). Il est également responsable de la lutte contre les pollutions de toutes natures et de l’organisation des secours en cas de catastrophes naturelles ou d’accidents.

Cette police spéciale s’exerce en mer jusqu’à 300 mètres de la limite des eaux.

Pour le reste, c’est l’État qui est compétent pour intervenir en mer. Le préfet maritime est ainsi l’autorité de référence : dans la bande des 300 mètres comme au‑delà, il est exclusivement compétent pour ce qui concerne la navigation.

Cette répartition des compétences reste extrêmement concentrée et centralisée alors que les maires de communes littorales sont directement concernés par les conséquences négatives d’une sur fréquentation maritime à proximité de leurs côtes. En réalité, ils ne disposent d’aucun pouvoir alors qu’ils sont en première ligne.

Les maires ont aussi une connaissance parfaite des situations locales qui leur permettrait de règlementer, de manière efficace et ciblée, certaines activités qui s’exercent en mer à partir d’engins immatriculés ou non.

L’intérêt d’une action municipale permettrait de suppléer l’État, en qualité d’autorité de secours, et de réduire le risque de laisser perdurer les pollutions et nuisances constatées par le maire et ses concitoyens.

Le Comité de protection du milieu marin de l’Organisation Maritime Internationale (OMI) a approuvé successivement la création de deux zones de contrôle des émissions d’oxydes de soufre et de particules (zone SECA) couvrant la Manche/Mer du Nord et l’ensemble de la mer Méditerranée (adoption programmée en décembre 2022 pour une entrée en vigueur juridique en 2024 et effective en 2025). La création de ces zones entraîne l’obligation pour tous les navires qui y circulent d’utiliser un combustible dont la teneur en soufre ne dépasse pas les 0.1 % en masse, soit un fuel 5 fois moins polluant que la norme internationale dans les zones hors SECA.

Face aux enjeux actuels de lutte contre la pollution et les incivilités constatées au quotidien, il est nécessaire de permettre aux maires de créer une police environnementale municipale dotée d’un pouvoir de police de l’écologie maritime en complément des actions de l’État (article 1) Le maire serait ainsi compétent pour contrôler, constater, réglementer et sanctionner toute infraction d’une embarcation ou navire ne respectant pas les normes environnementales en vigueur jusqu’à 2 500 mètres de la limite des eaux (article 2).

Tel est l’objet de la présente proposition de loi.


proposition de loi

Article 1er

Après la section 4 bis du chapitre Ier du titre Ier du livre V du code de la sécurité intérieure, est insérée une section 4 ter ainsi rédigée :

« Section 4 ter

« Police spéciale municipale environnementale en matière maritime

« Art. L. 51153. – Sur décision du maire, après délibération du conseil municipal, ou le cas échéant, sur décision conjointe du président de l’établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre et des maires des communes où les agents de police municipale sont affectés en application de l’article L. 512‑2, une police spéciale municipale de l’environnement en matière maritime peut être créée pour l’accomplissement des missions mentionnées à l’article L. 511‑1, sous réserve de l’existence d’une convention de coordination des interventions de la police municipale et des forces de sécurité de l’État.

« Un décret en Conseil d’État précise les conditions de création, de formation et d’emploi de cette police municipale environnementale en matière maritime. »

Article 2

Après l’article L. 2213‑23 du code général des collectivités territoriales, il est inséré un article L. 2213‑23‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 2213231.  De la limite des eaux jusqu’à 2 500 mètres, le maire peut, par arrêté motivé, interdire l’accès de certaines zones ou certains secteurs maritimes de la commune aux embarcations ou navires dont la circulation dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l’air, soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, écologiques, aquacoles ou touristiques.

« Dans ces secteurs, le maire peut, en outre, par arrêté motivé, soumettre à des prescriptions particulières relatives aux conditions d’horaires et d’accès à certains lieux et aux niveaux sonores admissibles les activités s’exerçant sur le secteur maritime municipal, à l’exception de celles qui relèvent d’une mission de service public.

« Ces dispositions ne s’appliquent pas aux embarcations utilisées pour assurer une mission de service public et ne peuvent s’appliquer d’une façon permanente aux embarcations utilisées à des fins professionnelles de recherche, d’exploitation ou d’entretien des espaces naturels. »

Article 3

La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.