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N° 351

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 18 octobre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à définir et encadrer le régime de responsabilité
concernant les chiens de protection des troupeaux,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par

Mme Bénédicte TAURINE et MM. Léo WALTER, Laurent ALEXANDRE,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Cette proposition de loi vise à définir et encadrer le régime de responsabilité concernant les chiens de protection des troupeaux dans le cas d’aboiements ou d’une morsure d’un chien de protection des troupeaux sur un tiers.

S’il n’existe pas de données mutualisées à l’échelle nationale des morsures des chiens de protection des troupeaux sur un tiers, ces morsures sont récurrentes. Durant l’été 2021, vingt‑trois accidents ont été recensés, seulement dans les Hautes‑Alpes. Le nombre de morsures reste faible comparé aux 500 000 morsures annuelles de chiens selon le Centre de documentation et d’information de l’assurance (CDIA).

Le cadre juridique actuel fait peser sur les éleveurs ou les bergers l’ensemble de la responsabilité d’une morsure d’un chien de protection des troupeaux, au même titre que celle d’un autre chien. Or le chien de protection s’impose comme le pilier de la protection des troupeaux (1150 chiens de protection en 2007, 5 642 en 2021). De plus, l’arrêté du 9 juillet 2019 relatif à l’indemnisation des dommages causés aux troupeaux domestiques par le loup, l’ours et le lynx prévoit que l’indemnisation de la perte d’une bête est conditionnée à la mise en place de moyens de protection, dont font partie les chiens de protection des troupeaux. La conditionnalité est une disposition nouvelle du décret du 9 juillet 2019. En cercle 1, c’est‑à‑dire les communes dans lesquelles la prédation est avérée, à partir de la troisième attaque sur douze mois, si l’élevage n’est pas protégé ou reconnu non‑protégeable, l’éleveur n’est pas indemnisé.

Par conséquent, dans un contexte d’augmentation de la population des prédateurs, la norme impose, implicitement, à l’éleveur la présence des chiens de protection des troupeaux.

Ainsi, il est injuste et pesant pour l’éleveur ou le berger d’être responsable en cas de morsure d’un chien de protection des troupeaux. Nous considérons que l’État doit être indirectement responsable, du fait qu’il impose des moyens de protection, dont les chiens de protection des troupeaux. Le régime jurisprudentiel de responsabilité sans faute de l’État est ici adéquate à la situation car il est fondé sur la socialisation du risque et répond ainsi à un besoin d’indemnisation de la victime sans exclure la recherche ultérieure de responsabilités.

C’est pourquoi, s’il est avéré que l’éleveur ou le berger a commis un manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement ayant entrainé la morsure du chien de protection des troupeaux, l’État engage contre l’éleveur ou le berger une action récursoire.

Enfin, les aboiements des chiens de protection des troupeaux sont verbalisables, alors qu’ils constituent un rôle essentiel dans la dissuasion face aux prédateurs et ne présentent, par conséquent, pas de caractère intempestif. La proposition de loi vise à différencier, à nouveau, les aboiements des chiens à ceux des chiens de protection des troupeaux

L’article 1 définit la responsabilité de l’État dans le cas d’une morsure d’un chien de protection des troupeaux. Il prévoit également la possibilité d’une action récursoire.

L’article 2 différencie le dommage causé par un animal par rapport à celui causé par un chien de protection des troupeaux.

L’article 3 supprime la responsabilité du propriétaire d’un chien de protection des troupeaux lors d’aboiements de ce dernier.

 


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 211‑14‑2 du code rural et de la pêche maritime est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Tout fait de morsure d’une personne par un chien de protection des troupeaux relève de la responsabilité de l’État. 

« L’État engage une action récursoire s’il est avéré que le propriétaire du chien de protection des troupeaux a commis un manquement délibéré à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement. »

Article 2

L’article 1243 du code civil est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« La responsabilité du propriétaire d’un animal en cas de dommage causé par ce dernier, telle que définie au premier alinéa, ne s’applique pas si l’animal est un chien de protection des troupeaux.

« La responsabilité en cas de dommage causé par un chien de protection des troupeaux incombe à l’État, telle que définie au dernier alinéa de l’article L. 211‑14‑2 du code rural et de la pêche maritime. »

Article 3

Aucun bruit particulier ne doit, par sa durée, sa répétition ou son intensité, porter atteinte à la tranquillité du voisinage ou à la santé de l’homme, dans un lieu public ou privé, qu’une personne en soit elle‑même à l’origine ou que ce soit par l’intermédiaire d’une personne, d’une chose dont elle a la garde ou d’un animal placé sous sa responsabilité.

La responsabilité du propriétaire d’un animal en cas d’aboiements de ce dernier, telle que définie au premier alinéa, ne s’applique pas si l’animal est un chien de protection des troupeaux.

Article 4

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.