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N° 383

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 octobre 2022.

PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

relative à l’irruption citoyenne dans le processus législatif ,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Benjamin LUCAS, Christine ARRIGHI, Cyrielle CHATELAIN, Francesca PASQUINI, Hubert JULIENLAFERRIÈRE, Julie LAERNOES, JeanClaude RAUX, Lisa BELLUCO, Marie POCHON, MarieCharlotte GARIN, Sabrina SEBAIHI, Sandra REGOL, Sébastien PEYTAVIE, Sophie TAILLÉPOLIAN,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Notre pays connaît une crise démocratique profonde qui s’illustre tant par une abstention structurellement massive que par une dynamique électorale et culturelle en faveur de l’extrême droite.

Un prétendu dépassement des clivages était supposé « libérer les énergies » et protéger notre pays des forces anti‑démocratiques, en incarnant la promesse d’un nouvel âge de la démocratie, d’un « nouveau monde » politique. Cette entreprise a échoué.

Pire, les dernières années de notre vie démocratique ont été marquées par le mépris des corps intermédiaires, la brutalisation du mouvement social, l’indifférence aux revendications nées de la société civile ou des collectifs citoyens. Même le Parlement, cœur battant de la démocratie représentative est sans cesse dévalorisé par l’exécutif et affaibli par ses velléités de passage en force, d’accélération à outrance d’un temps de débat pourtant indispensable à l’expression de la pluralité politique qui vit dans le pays et à la construction de politiques qui répondent avec justesse aux urgences du présent et aux grands défis de l’avenir.

Devant l’épuisement démocratique qui risque de se muer en véritable effondrement comme en atteste la situation internationale, il faut bien plus que des artifices de communication. Le pays est las des consultations citoyennes amputées par des jokers présidentiels arbitraires et autres conseils nationaux de refondation.

Notre pays a besoin de renouer le lien entre gouvernés et gouvernants, de préserver le contrat social, de reconstruire ce pacte de confiance sans lequel la République n’est qu’un mot vide. Il a aussi besoin que la vie politique ne se résume pas à des séquences électorales intermittentes de représentants, mais vive à chaque étape du processus d’invention, de fabrication, de délibération, d’adoption, d’application et de contrôle de la loi. Notre démocratie a besoin d’une transformation institutionnelle dont l’instauration d’un « 49‑3 citoyen » peut être la première pierre.

Le 49‑3 citoyen, c’est la possibilité pour une partie du corps électoral de déclencher un référendum sur une loi en cours de discussion à l’Assemblée nationale pour empêcher son adoption définitive. Cette mesure doit évidemment s’accompagner de garde‑fous : au moins la moitié des départements français représentés parmi les signataires de la pétition, impossibilité d’utiliser cette mesure pour remettre en cause la Constitution et ses principes, les libertés publiques et les droits conquis.

Il s’agit de permettre l’irruption citoyenne à n’importe quelle étape de l’examen d’un projet de loi ou d’une proposition de loi. C’est une manière de redistribuer les pouvoirs quand seul le gouvernement peut faire usage légalement d’un passage en force, avant même la fin des débats parlementaires sur un texte.

Cet outil sera une conquête démocratique majeure et utile. Il permettra de redonner de la consistance à l’action citoyenne en lui ouvrant des leviers d’action tangibles tout en incitant les élus à mieux prendre en compte la volonté générale dans leurs réformes.

Il peut contribuer à régénérer notre République. Oui, à l’heure où notre République risque l’asphyxie, le « 49‑3 citoyen » serait une respiration démocratique bienvenue.

Explication des articles :

Le premier article crée la possibilité pour les citoyens de faire corps pour bloquer un texte de loi, quel que soit le stade de la procédure législative.

L’article 2 prévoit que la charge induite pour l’État par le premier soit compensée par la majoration de l’impôt sur les sociétés.

 


PROPOSITION DE LOI CONSTITUTIONNELLE

Article unique

Après l’article 11 de la Constitution, il est inséré un article 11‑1 ainsi rédigé :

« Article 11‑1

« Un centième des électeurs inscrits sur les listes électorales, émanant d’au moins cinquante départements, peut demander à soumettre à référendum un projet de loi ou une proposition de loi effectivement déposé sur le bureau d’une assemblée, quel que soit le stade de la procédure législative. Cette initiative prend la forme d’une pétition.

« Cette faculté ne peut avoir pour objet ou pour effet de remettre en cause la substance d’un droit ou d’une liberté que la Constitution garantit .

« Une loi organique vient préciser les modalités d’application du présent article ».