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N° 458

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 novembre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à améliorer la reconnaissance de l’engagement associatif
et du bénévolat,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par

Mme Béatrice DESCAMPS,

députée.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

De toutes les formes de cohésion, de solidarité, de générosité du quotidien, l’engagement associatif bénévole est sans nul doute celle qui fait battre le plus fort le cœur de notre société, en ce qu’elle cristallise tout le sens du don de soi au service des autres en mobilisant des leviers symboliques forts comme l’entraide, l’objectif commun, le partage, l’inclusion, le vivre ensemble, l’appartenance à une collectivité de projet.

Le million et demi d’associations de notre pays représente environ 1,8 million d’emplois et 3,3 % du PIB. Mais l’écrasante majorité d’entre elles fonctionnent exclusivement grâce à l’action des 22 millions de bénévoles que compte la France. Ils permettent le fonctionnement des cercles de lecture, des clubs de sports, des ligues de protection de l’environnement ou du patrimoine, des comités de soutien, ils permettent la levée de fonds pour la lutte contre les maladies, la protection de l’enfance, la défense des animaux, le soutien scolaire, l’engagement humanitaire, l’aide aux personnes âgées ou handicapées, la perpétuation de traditions, la sauvegarde historique, l’animation dans les villes et dans les campagnes, l’organisation de festivités, de commémorations, de célébrations, la diversité des pratiques sportives, et tant d’autres choses.

Les associations et les bénévoles qui leur permettent d’exister sont au fondement de notre société en ce qu’elles sont à l’origine de nombreux services qui nous semblent normaux, comme la possibilité d’inscrire son enfant au sport, l’organisation d’une fête de village, la prise en charge d’un chat errant, la rénovation d’un monument, ou la possibilité de se découvrir une nouvelle passion. Nous n’avons individuellement aucune idée des innombrables causes que défendent chaque jour nos associations ni des myriades d’actions menées par elles. Tout ceci est possible grâce à l’action et l’engagement des bénévoles, qui sont le symbole même de l’essence de la société : se mettre au service du projet commun, sans attendre de contrepartie.

Le présent texte vise à faciliter l’engagement associatif bénévole et à en améliorer la reconnaissance. Si des avancées ont pu être entrevues ces dernières années, il y a toutefois possibilité d’aller plus loin pour avancer dans la voie d’un vrai statut de bénévole. Dans cette optique, l’article 1er vise à ouvrir les formations proposées aux agents des collectivités territoriales aux dirigeants d’associations bénévoles sous conditions et bien sûr sans pénaliser ni les agents de la fonction publique ni les collectivités. Si des formations à destination des dirigeants d’association existent, elles sont complexes d’accès et insuffisantes, alors même que les formations proposées aux agents publics sur des thématiques aussi variées que la communication, l’encadrement de mineurs, la gestion d’un budget, les problématiques liées aux ressources humaines, et bien d’autres, sont de nature à aider le dirigeant bénévole dans ses missions.

L’article 2 touche à l’organisation du temps bénévole en ouvrant la possibilité, pour les bénévoles qui sont également salariés de demander à leur employeur un aménagement horaire leur permettant de mener à bien leurs missions bénévoles. Il ne s’agit pas d’une réduction du temps de travail mais simplement d’un ajustement horaire, sans conséquence sur le bon fonctionnement de l’entreprise ou du service.

L’article 3 propose de prendre en compte l’engagement bénévole des dirigeants d’association dans la détermination des droits à la retraite. Souvent évoquée, cette possibilité d’obtenir des trimestres complémentaires grâce à son action bénévole serait le meilleur moyen de reconnaître l’engagement et l’investissement d’un dirigeant d’association, qui a donné de son temps, sans compter, des années durant. Le texte prévoit l’acquisition d’un trimestre par tranche de 5 ans d’engagement associatif, dans la limite de huit trimestres, ce qui semble raisonnable. En tout, l’engagement associatif avéré durant 40 années équivaudrait, au maximum, à la compensation existante pour la charge d’un enfant.

Car les démarches administratives menées par les dirigeants et bénévoles d’associations sont parfois multiples et complexes, l’article 4 ouvre la voie à une simplification des démarches. Une même association doit parfois remplir quatre ou cinq dossiers de subventions différents, à des entités différentes qui demandent toutes les mêmes informations. La création d’une plateforme numérique unique permettrait à l’association de fournir ces informations une seule fois et ainsi de gagner un temps précieux.

L’article 5 vise à favoriser l’engagement associatif des jeunes en le rendant visible et leur permettant d’en faire un atout dans leur parcours scolaire et universitaire. En effet, la création d’un label « Jeune bénévole » inscrit dans les dossiers scolaires et sur Parcoursup valoriserait l’engagement du jeune en attestant de son attrait pour le bénévolat et pour l’investissement dans un projet collectif.

À destination des jeunes également, l’article 6 introduit une expérience bénévole associative dans le parcours scolaire des jeunes lycéens, à l’image du stage en entreprise prévu généralement en classe de 3ème et qui constitue une première vraie expérience dans le monde du travail. L’objectif de cette immersion en milieu associatif, prévue hors temps scolaire et selon les centres d’intérêt et les disponibilités des jeunes – et de l’association qu’ils auront choisie – est de lui permettre une première expérience bénévole auprès d’un dirigeant d’association et de le sensibiliser au fonctionnement des associations et à l’engagement associatif. Le fait de laisser le jeune choisir son associationhôte a bien sûr pour objectif de lui permettre de déterminer un champ d’action qui l’intéresse (le sport, la culture, l’environnement, le lien social, l’animation, le patrimoine, etc.) afin qu’il s’approprie pleinement l’expérience.

Enfin, l’article 7 a pour objectif de travailler au lien entre associations et personnes en situation d’isolement. Le constat est simple : de plus en plus de personnes sont en situation d’isolement contraint, en particulier les personnes âgées, les jeunes et les personnes en situation de handicap. En 2020, 7 millions de Français se trouvaient en situation d’isolement, soit 3 millions de plus qu’en 2010. Ces personnes isolées sont coupées de tout lien social et sont souvent également en perte de sens dans leur vie ; elles peuvent se sentir exclues ou inutiles. D’un autre côté, les associations peinent à trouver des bénévoles. Avec une meilleure information sur l’existence d’associations près de chez eux œuvrant sur des thématiques diverses, il est à espérer que certaines de ces personnes isolées puissent trouver auprès de ces activités associatives du lien social, un renouement avec une communauté ainsi qu’une forme d’accomplissement.

Je pense que ces dispositifs sont de nature à soutenir et encourager l’action des nombreux bénévoles de notre pays, que je tiens à remercier très sincèrement.

Tel est, Mesdames, Messieurs, l’objet de la présente proposition de loi.


proposition de loi

Article 1er

I. – Les dirigeants bénévoles d’associations peuvent bénéficier de la formation prévue à l’article L. 421‑2 du code général de la fonction publique au profit des agents des collectivités territoriales et de leurs établissements publics selon les critères suivants :

1° Le bénévole bénéficiaire œuvre au sein d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, créée depuis plus d’un an à la date de la demande et dont le siège se situe dans le ressort territorial de l’administration ou de la collectivité concernée ;

2° Le bénévole bénéficiaire appartient au bureau de l’association ;

3° L’offre de formation est limitée à une session de formation par association et par an ;

4° Les fonctionnaires territoriaux sont prioritaires pour l’inscription à ces sessions de formation et ce jusqu’à la clôture des inscriptions ;

5° La collectivité concernée peut faire le choix de limiter le nombre de places réservées chaque année aux dirigeants d’association.

I. – À la fin du b du 6° de l’article L. 5151‑9 du code du travail, les mots : « , dans des conditions, notamment de durée, fixées par décret » sont supprimés.

Article 2

Après l’article L. 3121‑49 du code du travail, il est inséré un article L. 3121‑49‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 3121491. – Les membres bénévoles du bureau d’une association régie par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association peuvent solliciter auprès de leur employeur un aménagement horaire, régulier ou ponctuel, afin de mener à bien leurs missions associatives.

« Ces aménagements ne s’apparentent pas à un congé mais à une adaptation des horaires de travail. L’employeur est en droit de demander le rattrapage des heures non travaillées. Il est également en droit de formuler un refus motivé de la demande d’aménagement horaire si celui‑ci a une conséquence néfaste sur le fonctionnement du service ou de l’entreprise. »

Article 3

Après l’article L. 351‑5 du code de la sécurité sociale, il est inséré un article L. 351‑5‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 35151. – I. – L’assuré pouvant justifier d’un engagement associatif peut bénéficier d’une majoration de sa durée d’assurance équivalente à un trimestre par tranche de cinq ans d’activité associative, dans la limite de huit trimestres, selon les critères suivants :

« 1° L’assuré est dirigeant d’une ou plusieurs associations à but non lucratif régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association, œuvrant dans le domaine éducatif, social, humanitaire, familial, environnemental, culturel ou sportif, existant depuis au moins trois ans à la date du début de prise en compte des années d’engagement associatif ;

« 2° Le dirigeant associatif est bénévole et occupe l’un des postes suivants : président de l’association, vice‑président, secrétaire, secrétaire adjoint, trésorier, trésorier adjoint, encadrant ;

« 3° Les engagements simultanés au sein de plusieurs associations ne sont pas cumulables.

« II. – La durée de l’engagement est comptabilisée dans son ensemble, y compris si les années d’engagement ne sont pas consécutives ou si elles ont été exercées dans plusieurs associations. »

Article 4

Une plateforme en ligne sécurisée permet aux associations de renseigner l’ensemble de leurs demandes de subvention. Les services instructeurs disposent d’un accès leur permettant de recueillir ces informations en vue de leur propre instruction.

Article 5

I. – Les élèves de l’enseignement du second degré pouvant justifier d’un engagement associatif de 300 heures auprès d’une ou plusieurs associations régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association bénéficient d’un label « jeune bénévole », dont les modalités sont fixées par décret. Une fois obtenu, ce label est intégré au dossier scolaire de l’élève et intégré à son dossier d’inscription sur la plateforme d’orientation Parcoursup.

II. – Un membre du bureau de l’association dans laquelle le jeune bénévole s’est engagé atteste du nombre d’heures effectuées par ce dernier. Les expériences auprès de plusieurs associations sont cumulées. Les périodes de bénévolat peuvent ne pas être consécutives. L’association est en droit de ne pas attester des heures effectuées si, durant ces heures, le comportement du jeune bénévole n’a pas été conforme à l’objet social et aux valeurs prévus notamment par ses statuts.

III. – Les établissements scolaires du second degré informent les élèves de l’existence d’un label « jeune bénévole » pouvant être intégré à leur dossier scolaire puis intégré à la plateforme d’orientation Parcoursup pour valoriser leur profil. Ils sont informés par le service instructeur de l’obtention dudit label par leurs élèves.

IV. – Par dérogation au I, les élèves en situation de handicap sont éligibles à l’obtention du label « jeune bénévole » au terme d’un engagement associatif de 150 heures.

Article 6

Le chapitre IV du titre II du livre Ier de la première partie du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° L’intitulé est complété par les mots : « et associatif » ;

2° Est ajouté un article L. 124‑21 ainsi rédigé :

« Art. L. 12421. – Les lycéens peuvent participer, durant l’année scolaire, à l’équivalent d’une journée ou deux demi‑journées d’immersion au sein d’une ou plusieurs associations de leur choix, en tant que bénévoles, en dehors du temps scolaire.

« L’élève est placé sous la responsabilité d’un dirigeant de l’association qui le fait participer aux activités pour le sensibiliser à l’engagement associatif et atteste de l’effectivité de l’expérience.

« Au terme de sa journée ou de ses demi‑journées d’immersion, l’élève effectue un retour de son expérience auprès de l’équipe pédagogique de son établissement scolaire.

« Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret. »

Article 7

Afin de favoriser le lien entre les associations et les personnes en situation d’isolement social, les communes font parvenir chaque année un registre des associations volontaires implantées sur leur territoire aux habitants correspondant a minima aux critères suivants :

1° Personnes âgées de plus de 65 ans ;

2° Personnes âgées de 18 à 30 ans ;

3° Personnes en situation de handicap ;

4° Personnes en situation d’isolement.

Article 8

I. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services et par la création de taxes additionnelles aux contributions mentionnées aux articles 1613 ter et 1613 quater du code général des impôts.

II. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.