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N° 646

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 décembre 2022.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer la protection des familles d’enfants touchés
par une affection de longue durée,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Paul CHRISTOPHE, Xavier ALBERTINI, Henri ALFANDARI, Béatrice BELLAMY, Thierry BENOIT, Agnès CAREL, Yannick FAVENNECBÉCOT, Félicie GÉRARD, François GERNIGON, François JOLIVET, Loïc KERVRAN, Stéphanie KOCHERT, Luc LAMIRAULT, JeanCharles LARSONNEUR, Anne LE HÉNANFF, Didier LEMAIRE, Lise MAGNIER, Laurent MARCANGELI, Naïma MOUTCHOU, Jérémie PATRIERLEITUS, Christophe PLASSARD, JeanFrançois PORTARRIEU, Marie-Agnès POUSSIERWINSBACK, Philippe PRADAL, Isabelle RAUCH, Vincent THIÉBAUT, Frédéric VALLETOUX, André VILLIERS, Anne-Cécile VIOLLAND,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Notre pays est l’un des pays les plus solidaires d’Europe.

Notre modèle social, reposant sur la redistribution, attribue diverses prestations sociales telles que le RSA, les aides personnelles au logement, les allocations-chômage ou la prise en charge des soins.

Ainsi, si nous reconnaissons l’attention portée par la solidarité aux familles d’enfants victimes d’une maladie grave, force est cependant de constater que l’accompagnement de ces familles reste inadapté face à l’urgence de la situation.

En effet, devant cette situation inattendue aux conséquences souvent lourdes et douloureuses, de nombreuses familles – souvent jeunes, parfois monoparentales – se retrouvent dans l’obligation de réduire leur temps de travail, voire de le cesser pour s’occuper de leur enfant.

Elles se retrouvent donc contraintes de multiplier les démarches auprès de l’administration, de faire face à des délais d’attente de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois – comme cela a pu être démontré par des enquêtes menées par la fédération Grandir sans cancer auprès de plusieurs centaines de familles – pour pouvoir bénéficier de leurs droits financiers, scolaires ou même d’une carte d’invalidité pour leur enfant.

Elles subissent aussi parfois le manque de compréhension de leurs employeurs et de leurs débiteurs (loyers, crédits, charges fiscales).

Si un adulte victime d’une situation grave bénéficie de dispositifs qui le protègent, tels que le gel des crédits, l’arrêt maladie ou la protection de l’emploi, ces dispositifs ne s’appliquent pas aux parents dont l’enfant est malade.

Les associations de parents interviennent, mais elles n’ont pas la puissance et les moyens de se substituer à l’État.

La nature exceptionnelle, brutale et urgente de la situation doit amener notre société à prendre des mesures exceptionnelles réellement adaptées.

Cette proposition de loi vise à renforcer la protection des parents dont l’enfant est victime d’une maladie grave, reconnue comme affection de longue durée (ALD) par la Caisse primaire d’assurance maladie, ou d’un accident de la vie.

L’article 1er intégrerait la protection contre le licenciement et les mutations dans le code du travail, en s’inspirant de la protection de la grossesse et de la maternité pour tout parent salarié étant dans l’obligation, sur justificatif médical, de réduire ou de cesser son activité professionnelle. Cette protection s’appliquerait aussi lors de la période d’essai.

L’article 2 viserait à préciser que le télétravail pour les salariés concernés par une maladie grave, un handicap d’un enfant à charge est considéré comme un aménagement de poste rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés.

L’article 3 instaurerait l’interdiction pour le bailleur de donner congé à un locataire dont l’enfant est atteint d’une maladie grave ou d’un handicap, sur justificatif médical, en étendant à ce public les dispositions légales existantes protégeant les locataires de plus de 65 ans.

L’article 4 ferait évoluer la loi n° 90‑449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement afin que cette protection des familles concernées ne s’oppose pas au droit légitime du bailleur de percevoir les loyers.

L’article 5 viserait à préciser des conditions offertes à l’emprunteur de solliciter la suspension des échéances du prêt immobilier, par saisie du tribunal judiciaire.

L’article 6 viserait à intégrer les personnes concernées dans l’article1391 du code général des impôts relatif aux exonérations, dégrèvements spéciaux et réductions d’impôts.

L’article 7 viserait à accélérer l’accès effectif de l’ensemble des aides attribuables à ces familles, en portant le délai du « silence vaut acceptation » prévu au sein de l’article L. 231‑1 du code des relations entre le public et l’administration à 15 jours, au lieu de 2 mois.

Je vous propose, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter la présente proposition de loi, et de faire preuve d’autant de volontarisme pour que les familles qui se battent contre une maladie bénéficient du même appui, des mêmes simplifications indispensables pour accompagner au mieux ces enfants.


proposition de loi

Article 1er

Le paragraphe 3 de la sous‑section 2 de la section 4 du chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail un article L. 1225‑65‑3 ainsi rédigé :

« Art. L. 1225653. L’employeur ne doit pas prendre en considération l’état de santé, qui nécessiterait un congé quel qu’il soit pour maladie grave ou accident, d’un enfant à charge pour rompre son contrat de travail, y compris au cours d’une période d’essai ou, sous réserve d’une affectation temporaire réalisée dans le cadre des dispositions des articles L. 1225‑7, L. 1225‑9 et L. 1225‑12, pour prononcer une mutation d’emploi. Il lui est également interdit de rechercher ou de faire rechercher toutes informations concernant l’état de santé des enfants de l’intéressé. »

Article 2

À l’article L. 1222‑11 du code du travail, après le mot : « majeure, » sont insérés les mots : « d’une maladie grave, d’un handicap d’un enfant à charge, »

Article 3

L’article 15 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986 est complété par un V ainsi rédigé :

« V. – Le bailleur ne peut s’opposer au renouvellement du contrat en donnant congé dans les conditions définies au I à l’égard de tout locataire dont un enfant à charge est atteint d’une maladie grave ou d’un handicap, sur justificatif médical, et dont les ressources annuelles sont inférieures à un plafond de ressources en vigueur pour l’attribution des logements locatifs conventionnés fixé par arrêté du ministre chargé du logement, sans qu’un logement correspondant à ses besoins et à ses possibilités lui soit offert dans les limites géographiques prévues à l’article 13 bis de la loi n° 48‑1360 du 1er septembre 1948 précitée. »

Article 4

Le II de l’article 4 de la loi n° 90‑449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le plan départemental prend également en compte les besoins des parents d’enfants à charge atteints de maladies graves ou de handicaps. »

Article 5

La première phrase du premier alinéa de l’article L. 314‑20 du code de la consommation est ainsi rédigée : « L’exécution des obligations du débiteur peut être, notamment en cas de licenciement, de maladie ou accident grave, de survenue d’un handicap du débiteur lui‑même ou d’un enfant à charge suspendue par ordonnance du juge d’instance dans les conditions prévues aux articles 1244‑1 à 1244‑3 du code civil. »

Article 6

Au I de l’article 1391 du code général des impôts, après le mot : « ans », sont insérés les mots : « ainsi que les familles d’enfants à charge atteints d’une pathologie grave ou handicapante ».

Article 7

La sous‑section 2 de la section 2 du chapitre Ier du titre III du livre II du code des relations entre le public et l’administration est complétée par un article L. 231‑7 ainsi rédigé :

« Art. L. 2317. – Le délai d’acquisition de la décision implicite d’acceptation ou de rejet des demandes d’aides attribuables aux familles d’enfants à charge atteints d’une pathologie grave ou handicapante est de quinze jours. »

Article 8

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

La perte de recettes pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration du prélèvement sur les recettes de l’État au titre de la compensation d’exonérations relatives à la fiscalité locale et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.