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N° 696

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer la protection des mineurs face aux violences sexuelles,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Emmanuelle ANTHOINE, Thibault BAZIN, Valérie BAZIN-MALGRAS, AnneLaure BLIN, JeanYves BONY, Ian BOUCARD, Jean-Luc BOURGEAUX, Josiane CORNELOUP, Francis DUBOIS, Jean-Jacques GAULTIER, Philippe GOSSELIN, Victor HABERTDASSAULT, Michel HERBILLON, Patrick HETZEL, Philippe JUVIN, Véronique LOUWAGIE, Emmanuel MAQUET, Alexandra MARTIN, Frédérique MEUNIER, Yannick NEUDER, Isabelle PÉRIGAULT, Christelle PETEXLEVET, Alexandre PORTIER, Nicolas RAY, Vincent SEITLINGER, Jean-Pierre TAITE, Isabelle VALENTIN,

députés.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

En France, 5 % des femmes et 1 % des hommes ont déclaré avoir été victimes d’inceste dans leur enfance selon l’enquête Virage de 2015. D’après un sondage réalisé par l’institut Ipsos et paru en novembre 2020, 10 % des Français ont été victimes d’inceste.

Les violences sexuelles sur les mineurs sont à l’origine de graves perturbations sur les plans comportemental, neurobiologique, cognitif, affectif, etc…

C’est un véritable drame humain dans la vie de ces victimes. La vulnérabilité aux problèmes de santé est aggravée pour le reste de leur vie : troubles alimentaires, trouble dépressif et conduites addictives.

La vie sociale de ces personnes est également affectée et se caractérise notamment par le retrait et l’agressivité. Une étude canadienne a montré que 73 % des adultes prostitués ont été victimes d’abus sexuels au cours de leur enfance.

Si la loi n° 2021‑478 du 21 avril 2021 visant à protéger les mineurs des crimes et délits sexuels et de l’inceste a présenté une avancée importante dans ce domaine, pour autant, elle reste largement perfectible.

Aussi, face aux bouleversements dramatiques causés par les violences sexuelles sur les mineurs dans la vie des victimes, nous proposons de renforcer l’arsenal pénal contre l’inceste.

Dans un premier temps, cette proposition de loi vise à mieux définir le périmètre pénal de l’inceste en veillant à lever certaines insécurités juridiques.

Son article premier vise ainsi à apporter des précisions sur les auteurs des viols incestueux.

La rédaction actuelle de l’article 222‑23‑2 du code pénal n’apparaît pas satisfaisante à plusieurs titres.

Les ascendants qu’il mentionne sont effectivement déjà inclus dans l’article 222‑22‑3 auquel renvoie l’article 222‑23‑2. Faire mention des ascendants apparaît donc superfétatoire.

Surtout, la condition supplémentaire de l’autorité de droit ou de fait est déjà incluse dans l’article 222‑22‑3 pour les conjoints. Cette précision dans la rédaction de l’article 222‑23‑2 crée une insécurité juridique pour les faits commis par d’autres membres de la sphère familiale qui pourraient commettre des viols incestueux (frères, sœurs, oncles et tantes). Ces auteurs pourraient échapper à la qualification de viol incestueux en discutant le fait qu’ils aient eu sur la victime une autorité de droit ou de fait.

L’article 2 vise quant à lui à apporter des précisions sur les auteurs d’agressions sexuelles incestueuses.

La rédaction actuelle de l’article 222‑29‑3 du code pénal n’apparaît elle aussi pas satisfaisante à plusieurs titres.

Ici aussi, les ascendants que cet article mentionne sont déjà inclus dans l’article 222‑22‑3 auquel il renvoie. Faire mention des ascendants apparaît donc là encore superfétatoire.

Se pose à nouveau le problème de la condition supplémentaire de l’autorité de droit ou de fait qui est, comme évoqué plus haut, déjà incluse dans l’article 222‑22‑3 pour les conjoints. Cette précision dans la rédaction de l’article 222‑29‑3 crée également une insécurité juridique pour les faits commis par d’autres membres de la sphère familiale qui pourraient commettre des viols incestueux (frères, sœurs, oncles et tantes). Ces auteurs pourraient échapper à la qualification d’agressions sexuelles incestueuses en discutant le fait qu’ils aient eu sur la victime une autorité de droit ou de fait.

Le chapitre II de cette proposition de loi propose de renforcer les peines encourues pour les violences sexuelles sur les mineurs.

L’article 3 prévoit ainsi de rehausser le niveau des peines encourues afin de sanctionner les agressions sexuelles sur mineurs par des peines de 20 ans d’emprisonnement et 250 000 € d’amende.

L’article 4 prévoit par ailleurs de rehausser le niveau des peines encourues afin de sanctionner les agressions sexuelles incestueuses par des peines de 20 ans d’emprisonnement et 250 000 € d’amende.

L’article 5 prévoit ensuite de rehausser le niveau de peine encouru afin de sanctionner les abus sexuels sur mineurs par des peines de 10 ans d’emprisonnement et 150 000 € d’amende.

Enfin, l’article 4 instaure des circonstances aggravantes pour les viols sur mineur et les viols incestueux prévus respectivement aux articles 222‑23‑1 et 222‑23‑2 du code pénal.

Par un parallélisme des formes, il est proposé de reprendre les circonstances aggravantes prévues pour le viol.

En cas de circonstances aggravantes, la peine serait portée à 30 ans de réclusion criminelle.


proposition de loi

Chapitre Ier

Préciser la définition pénale de l’inceste pour mettre fin à plusieurs insécurités juridiques

Article 1er

À la fin de l’article 222‑23‑2 du code pénal, les mots : « un ascendant ou toute autre personne mentionnée à l’article 222‑22‑3 ayant sur le mineur une autorité de droit ou de fait » sont remplacés par les mots : « l’une des personnes mentionnées à l’article 222‑22‑3 ».

Article 2

À la fin de l’article 222‑29‑3 du code pénal, les mots : « un ascendant ou toute autre personne mentionnée à l’article 222‑22‑3 ayant sur le mineur une autorité de droit ou de fait » sont remplacés par les mots : « l’une des personnes mentionnées à l’article 222‑22‑3 ».

Chapitre II

Renforcer les peines sanctionnant les violences sexuelles sur les mineurs

Article 3

Le paragraphe 2 de la section 3 du chapitre II du titre II du livre II du code pénal est ainsi modifié :

1° À l’article 222‑29‑1, les mots : « dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € » sont remplacés par les mots : « vingt ans d’emprisonnement et de 250 000 € » ;

2° Au premier alinéa de l’article 222‑29‑2, les mots : « dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € » sont remplacés par les mots : « vingt ans d’emprisonnement et de 250 000 € ».

Article 4

À l’article 222‑29‑3 du code pénal, les mots : « dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € » sont remplacés par les mots : « vingt ans d’emprisonnement et de 250 000 € ».

Article 5

À l’article 227‑25 du code pénal, les mots : « sept ans d’emprisonnement et de 100 000 € » sont remplacés par les mots : « dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € ».

Article 6

Après l’article 222‑23‑3 du code pénal, il est inséré un article 222‑23‑4 ainsi rédigé :

« Art. 222234. – Les crimes prévus aux articles 222‑23‑1 et 222‑23‑2 sont punis de trente ans de réclusion criminelle :

« 1° Lorsqu’ils ont entraîné une mutilation ou une infirmité permanente ;

« 2° Lorsqu’ils sont commis sur une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de l’auteur ;

« 3° Lorsqu’ils sont commis sur une personne dont la particulière vulnérabilité ou dépendance résultant de la précarité de sa situation économique ou sociale est apparente ou connue de l’auteur ;

« 4° Lorsqu’ils sont commis par toute personne ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ;

« 5° Lorsqu’ils sont commis par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ;

« 6° Lorsqu’ils sont commis par plusieurs personnes agissant en qualité d’auteur ou de complice ;

« 7° Lorsqu’ils sont commis avec usage ou menace d’une arme ;

« 8° Lorsque la victime a été mise en contact avec l’auteur des faits grâce à l’utilisation, pour la diffusion de messages à destination d’un public non déterminé, d’un réseau de communication électronique ;

« 9° Lorsqu’ils sont commis en concours avec un ou plusieurs autres viols commis sur d’autres victimes ;

« 10° Lorsqu’ils sont commis par une personne agissant en état d’ivresse manifeste ou sous l’emprise manifeste de produits stupéfiants ;

« 11° Lorsqu’ils sont commis, dans l’exercice de cette activité, sur une personne qui se livre à la prostitution, y compris de façon occasionnelle ;

« 12° Lorsqu’un mineur était présent au moment des faits et y a assisté ;

« 13° Lorsqu’une substance a été administrée à la victime, à son insu, afin d’altérer son discernement ou le contrôle de ses actes. »