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N° 706

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2023.

PROPOSITION DE LOI

relative à la mise en place de la proportionnelle
pour l’élection des députés,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Jérémie IORDANOFF, Cyrielle CHATELAIN, Christine ARRIGHI, Julien BAYOU, Lisa BELLUCO, Charles FOURNIER, Marie-Charlotte GARIN, Hubert JULIENLAFERRIÈRE, Francesca PASQUINI, Sébastien PEYTAVIE, Marie POCHON, Jean-Claude RAUX, Sandra REGOL, Sandrine ROUSSEAU, Eva SAS, Sabrina SEBAIHI, Aurélien TACHÉ, Nicolas THIERRY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les règles surdéterminent le jeu. Notre régime parlementaire à captation présidentielle penche dangereusement du côté du pouvoir exécutif. Sans préjudice d’un réajustement à la racine des institutions qu’il conviendrait d’entreprendre pour rééquilibrer les pouvoirs, nous pensons qu’une réforme du mode de scrutin des députés s’impose aujourd’hui comme étant à la fois simple et urgente.

Le scrutin majoritaire à deux tours, sur 577 circonscriptions, crée une immense distorsion entre les voix exprimées et les sièges obtenus. Ce mode de scrutin aboutit à la surreprésentation d’un petit nombre de partis et efface un grand nombre de couleurs politiques. Ses effets secondaires sont bien connus : il contraint l’électeur à élaborer des stratégies insensées ; il produit de l’abstention ; il génère frustrations et mouvements protestataires.

La représentation nationale se doit de correspondre fidèlement à la volonté du corps électoral. La démocratie ne saurait être un affrontement entre les citoyens et les élus. Aussi, la grande bataille des opinions doit être organisée dans l’enceinte des institutions de la République. C’est notamment à cette condition que sera retrouvée la confiance de nos concitoyens dans la démocratie représentative.

À l’injustice électorale, s’ajoute l’affaiblissement du Parlement. Le scrutin majoritaire à circonscriptions multiples favorise le fait majoritaire, lequel aboutit, dans notre Cinquième République, à une atrophie du travail parlementaire. Sauf accident, l’Assemblée nationale se résume à n’être qu’une chambre d’enregistrement. Ce n’est ni à l’Élysée, ni à Matignon que devrait se situer le centre de gravité de la décision politique.

Parmi les autres modes de scrutin, celui qui apparaît le plus convaincant est la proportionnelle intégrale, seule à même de favoriser la délibération transpartisane, de garantir la juste représentation de toutes les sensibilités, et d’obtenir, in fine, la parité de genre.

Répondons par anticipation à quelques objections. Sur les critiques maintes fois entendues au sujet de l’instabilité gouvernementale que générerait le scrutin proportionnel, elles ne tiennent pas un instant pour qui veut bien se donner la peine de jeter un œil par‑delà la Quatrième République ou par‑dessus nos frontières. En tout état de cause, la juste représentation des opinions à l’Assemblée nationale ainsi que la parité de résultat apparaissent aujourd’hui comme des impératifs supérieurs.

S’agissant des modalités, notre option est la suivante : des deux chambres, l’une représente les territoires ; l’autre, la Nation. Allons au bout de la logique, si le Sénat est issu de scrutins départementaux, élisons l’Assemblée sur une circonscription nationale, à partir d’une liste unique pour tous les Français, qu’ils soient établis en France ou hors de France. Quant à la répartition géographique des candidats, nous faisons confiance au poids des électeurs pour équilibrer naturellement les choses. Enfin, nous retenons un seuil de 3 % afin de nous prémunir du risque de fragmentation partisane tout en garantissant la constitution de groupes parlementaires pour les petites formations politiques.

La présente proposition de loi est composée de deux articles.

L’article 1er réécrit l’article L. 123 du code électoral (1°) pour prévoir que l’élection des députés est organisée par un scrutin de liste à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Le vote a lieu dans une circonscription nationale unique.

Il modifie par ailleurs l’article L. 124 du code électoral (2°) pour prévoir que seules sont admises à la répartition des sièges les listes ayant obtenu au moins 3 % des suffrages exprimés. Il précise également les modalités d’attribution des sièges. L’article L. 125 (3°) et l’article L. 126 (4°) du code électoral sont supprimés.

L’article 2 réécrit l’article L. 154 du code électoral (1°) pour prévoir les modalités de dépôt des candidatures auprès du Ministère de l’Intérieur. L’ordonnancement des listes par une alternance paritaire est requise.

Il réécrit également l’article L. 156 du code électoral (2°) pour prévoir que les candidats ne peuvent l’être sur plus d’une liste ni plus d’une section.

Il supprime l’article L. 157 du code électoral (3°) et réécrit l’article L. 159 du même code (4°) pour préciser les modalités de dépôt prévues par l’article L. 154 (1° ).

 


proposition de loi

Article 1er

Le chapitre II du titre II du livre Ier du code électoral est ainsi modifié :

1° L’article L. 123 est ainsi rédigé :

« Art. L. 123.  Les députés sont élus au scrutin de liste à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne, sans panachage ni vote préférentiel. Le vote a lieu dans une circonscription nationale unique. »

2° L’article L. 124 est ainsi rédigé :

« Art. L. 124. – Seules sont admises à la répartition des sièges les listes ayant obtenu au moins 3 % des suffrages exprimés. Les sièges sont attribués aux candidats d’après l’ordre de présentation sur chaque liste. Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l’attribution du dernier siège, celui‑ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d’égalité de suffrages, le siège est attribué au plus jeune des candidats susceptibles d’être proclamés élus. »

3° L’article L. 125 est abrogé.

4° L’article L. 126 est abrogé.

Article 2

Le chapitre V du titre II du livre Ier du code électoral est ainsi modifié :

1° L’article L. 154 est ainsi rédigé :

« Art. L. 154.  La déclaration de candidature résulte du dépôt au ministère de l’intérieur d’une liste comprenant un nombre de candidats égal au nombre de sièges à pourvoir, au plus tard à 18 heures le quatrième vendredi précédant le jour du scrutin. La liste est composée alternativement d’un candidat de chaque sexe.

« Elle est faite collectivement pour chaque liste par le candidat tête de liste ou par un mandataire désigné par lui. Un reçu provisoire de déclaration est délivré au déposant.

« La déclaration comporte la signature de chaque candidat et indique expressément :

« 1° Le titre de la liste ;

« 2° Les nom, prénoms, sexe, date et lieu de naissance, domicile et profession de chacun des candidats. »

2° L’article L. 156 est ainsi modifié :

a) À la fin du premier alinéa, le mot : « circonscription » est remplacé par le mot : « liste » ;

b) Le second alinéa est supprimé.

3° L’article L. 157 est abrogé.

4° La première phrase de l’article L. 159 est ainsi modifié :

a) Le mot : « préfet » est remplacé par les mots : « ministre de l’Intérieur » ;

b) Après le mot : « tribunal administratif », sont insérés les mots : « de Paris ».