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N° 712

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2023.

PROPOSITION DE LOI

pour soutenir les parents isolés par la défiscalisation
de leur pension alimentaire,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Philippe JUVIN, Emmanuelle ANTHOINE, Valérie BAZIN-MALGRAS, Émilie BONNIVARD, Vincent DESCOEUR, Julien DIVE, Francis DUBOIS, Virginie DUBYMULLER, Nicolas FORISSIER, Jean-Jacques GAULTIER, Annie GENEVARD, Yannick NEUDER, Éric PAUGET, Vincent SEITLINGER, Nathalie SERRE, Antoine VERMORELMARQUES, Jean-Pierre VIGIER, Stéphane VIRY,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Avec près de 380 000 enfants mineurs concernés par la séparation de leurs parents chaque année, la France compte près de 2 millions de familles monoparentales – soit une famille sur quatre.

Ces séparations ne sont pas sans conséquences économiques sur le niveau de vie et les familles monoparentales représentent un tiers des personnes concernées par la pauvreté. En 2018, 41 % des enfants en famille monoparentale vivent au‑dessous du seuil de pauvreté monétaire et sont donc pauvres, contre 21 % de l’ensemble des enfants. Dans un tiers des familles monoparentales, le parent avec lequel ils résident la plupart du temps n’a pas d’emploi. Leur situation est alors plus précaire encore : 77 % des enfants sont pauvres, contre 23 % quand le parent est en emploi. 

Cette vulnérabilité financière et économique touche plus particulièrement les femmes. En effet, un divorce ou une rupture de Pacs est à l’origine d’une perte moyenne de niveau de vie de 19 % pour les femmes contre seulement 2,5 % pour les hommes. Les facteurs explicatifs de cette inégalité, connus et documentés, sont multiples : rémunération inégale entre les hommes et les femmes – les femmes gagnent 17 % de moins que les hommes en équivalent temps plein, passage en temps partiel ou perte d’emploi en raison de difficultés de garde des enfants… Résultat, 85 % des mères inactives avec deux enfants vivent en dessous du seuil de pauvreté, c’est‑à‑dire avec moins de 60 % du salaire médian. Pour les mères qui ne se remettent pas immédiatement en couple, la monoparentalité constitue ainsi une cause majeure de la pauvreté (30 % des parents entrés en monoparentalité sont pauvres l’année de séparation contre 14 % avant la séparation).

Dans ces conditions, la question des pensions alimentaires devient un enjeu essentiel.

Selon le Haut Conseil de la Famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), une contribution pour l’entretien et l’éducation de l’enfant est versée pour 7 enfants sur 10 en cas de séparation des parents et cette pension est versée par le père dans 97 % des cas. Selon le rapport d’information précité de Sophie Auconie et Guillaume Gouffier‑Cha, environ 1,5 million de personnes déclarent avoir reçu une pension alimentaire (au titre de la Contribution à l’éducation et l’entretien des enfants ou de la prestation compensatoire) représentant un total de 5,7 milliards d’euros en 2018. Dans 90 % des cas, ce sont des familles monoparentales qui bénéficient de la pension, ces dernières étant elles‑mêmes composées, dans 85 % des cas, d’une mère et de ses enfants.

Alors que la situation des familles devant bénéficier d’une pension alimentaire est très souvent fragile, le traitement fiscal des pensions alimentaires demeure défavorable aux parents qui ont la charge des enfants : la pension alimentaire versée par le parent n’ayant pas la charge de ses enfants est considérée comme un transfert de revenus entre ménages, du parent non gardien vers le parent gardien. Cette pension s’ajoute donc, après abattement de 10 %, au revenu imposable du parent qui assure la garde des enfants. Parallèlement, le parent qui verse la pension alimentaire peut la déduire de son revenu brut global.

Cette répartition de la charge fiscale est contestable au regard du différentiel de niveau de vie observé entre les hommes et les femmes après leur séparation. C’est sans compter l’objet de la pension alimentaire – sous forme de Contribution à l’éducation et l’entretien des enfants (CEEE), qui ne s’apparente pas au versement d’un revenu au parent gardien – à l’inverse de la prestation compensatoire, mais vise à la prise en charge par le parent non‑gardien de la part des dépenses en faveur de ses enfants qui lui revient au titre de son obligation alimentaire envers ces derniers. En témoigne notamment l’exemple canadien où la pension alimentaire est considérée comme une dépense interne au ménage de chacun des parents, ne la prenant pas en compte de dans le calcul de l’impôt.

Les inégalités économiques entre les hommes et les femmes, et la priorité qui doit être donnée à l’intérêt de l’enfant, conduisent aujourd’hui à repenser la fiscalité qui s’applique au versement des pensions alimentaires destinées à l’entretien et à l’éducation des enfants en cas de séparation des parents.

C’est pourquoi, cette proposition de loi vise à exonérer d’impôt sur le revenu les pensions alimentaires reçues par un parent isolé pour un enfant mineur.


proposition de loi

Article 1er

L’article 80 septies du code général des impôts est complété par une phrase ainsi rédigée : « Les pensions alimentaires telles que définies à l’article 373‑2‑2 du code civil reçues par un parent isolé pour l’entretien et l’éducation d’un enfant mineur ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu. »

Article 2

La perte de recettes pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.