Description : LOGO

N° 726

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à sanctionner davantage la consommation de stupéfiants et de produits provoquant des comportements hallucinatoires,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Lionel ROYERPERREAUT, Damien ABAD, Sabrina AGRESTIROUBACHE, Xavier ALBERTINI, Romain DAUBIÉ, Yannick HAURY, Delphine LINGEMANN, Lysiane MÉTAYER, Nicolas PACQUOT, Charles SITZENSTUHL, Philippe SOREZ, Violette SPILLEBOUT,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi vise à renforcer la dissuasion et la répression de l’usage illicite de stupéfiants.

La loi du 31 décembre 1970 a théoriquement interdit l’usage de stupéfiants dans notre pays, prévoyant jusqu’à un an de prison et 3 750 euros d’amende pour la consommation de drogues.

La population française est pourtant la plus grosse consommatrice de stupéfiants en Europe. Elle compte 1 million de consommateurs quotidien, et 4 à 5 millions occasionnels. Les jeunes Français sont deux fois plus nombreux à en consommer que dans les autres pays européens.

Ainsi, comme le soulignaient les députés Éric Poulliat et Robin Reda dans leur rapport « Usage de stupéfiants : de la dépénalisation de fait à l’amende forfaitaire » (2018) : « Le nombre d’interpellations d’usagers de stupéfiants n’a cessé de croître pour atteindre près de 140 000 interpellations en 2016. »

Le premier terreau sur lequel prospèrent les trafics de stupéfiant, c’est évidemment la consommation. Aucune consommation n’est anodine et participe au contraire à la vitalité d’un système lucratif pour les délinquants.

Les trafics de stupéfiants sont ainsi la cause directe de nombreux règlements de compte, notamment en région parisienne ou dans les cités marseillaises. Les riverains subissent la présence de points de deal et leurs nuisances, à toute heure de la journée et de la nuit. Cette situation ne peut plus durer, et il est temps que les consommateurs de stupéfiants prennent conscience qu’ils participent à une activité mortifère.

Le Gouvernement déploie aujourd’hui des moyens importants pour lutter contre les trafics. Les retombées de cette politique sont à souligner, comme la saisie record de plus de 500 kilogrammes de cocaïne dans le port de Marseille cet été. Néanmoins, chaque saisie, pour importante soit‑elle, ne tarit pas les différents trafics.

Pour mener cette lutte sur tous les fronts, il conviendrait ainsi de renforcer la dissuasion et la répression de l’usage de stupéfiants, en complément de l’action proactive de nos forces de police. Cette proposition de loi propose ainsi de durcir les sanctions pour les consommateurs de cannabis et, plus largement, de stupéfiants.

Enfin, cette proposition de loi vise aussi à lutter contre l’utilisation détournée de protoxyde d’azote, en complétant la loi n° 2021‑695 du 1er juin 2021 tendant à prévenir les usages dangereux du protoxyde d’azote. Cette dernière interdit la vente du protoxyde d’azote aux mineurs. Il est proposé d’aller plus loin, en interdisant la vente à toute personne qui, par son comportement ou son attitude, pourrait détourner ce produit de son usage premier. Il apparait en effet que la loi récemment adoptée n’a pas réussi à endiguer un phénomène qui devient de plus en plus inquiétant.

L’article 1 prévoit de rehausser le montant de l’amende forfaitaire délictuelle pour la consommation de cannabis. Ainsi, le montant de l’amende forfaitaire délictuelle passerait de 200 à 500€, les montants minorés et majorés s’établiraient respectivement à 400 et 1000€.

L’article 2 prévoit d’instaurer une nouvelle circonstance aggravante à la consommation de stupéfiants à la suite de la loi n° 2007‑297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance qui a modifié l’article L. 3421‑1 du code de santé publique en ce sens. L’article L. 342‑1 du code de santé publique mentionne ainsi : « Si l’infraction est commise dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions par une personne dépositaire de l’autorité publique ou chargée d’une mission de service public, ou par le personnel d’une entreprise de transport terrestre, maritime ou aérien, de marchandises ou de voyageurs exerçant des fonctions mettant en cause la sécurité du transport dont la liste est fixée par décret en Conseil d’État, les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende. Pour l’application du présent alinéa, sont assimilés au personnel d’une entreprise de transport les travailleurs mis à la disposition de l’entreprise de transport par une entreprise extérieure ».

Il est proposé de rajouter une seconde circonstance aggravante, en l’espèce, la consommation de stupéfiants en présence de mineurs.

L’article 3 propose d’étendre le régime de sanctions aux mineurs âgés de 16 à 18 ans, en les punissant d’une amende contraventionnelle de quatrième classe. Cette possibilité a été mentionnée par les députés Éric Poulliat et Robin Reda dans le rapport « Usage de stupéfiants : de la dépénalisation de fait à l’amende forfaitaire » publié en 2018.

L’INSERM a ainsi souligné dans « Conduites addictives chez les adolescents, une expertise collective de l’INSERM » (2014) que près d’un lycéen sur deux avait déjà consommé des stupéfiants en 2011. Il apparait que les mineurs représentent presque 20 % des individus mises en cause uniquement pour usage de stupéfiants. Il y a donc urgence à sanctionner davantage l’usage de stupéfiants pour les mineurs âgés de 16 ans ou plus, ces derniers ayant des effets délétères sur le cerveau de l’adolescent.

L’article 4 contraint la vente de protoxyde d’azote, en instituant qu’il est formellement interdit de vendre du protoxyde d’azote s’il a tout lieu de croire que son utilisation sera détournée par l’acheteur potentiel.

Tel est l’objet de la présente proposition de loi.

 


proposition de loi

Article 1er

Le dernier alinéa de l’article L. 3421‑1 du code de la santé publique est ainsi modifié :

1° À la fin de la première phrase, le montant : « 200 » est remplacé par le montant : « 500 » ;

2° La seconde phrase est ainsi modifiée :

a) Le montant : « 150 » est remplacé par le montant : « 400 » ;

b) À la fin, le montant : « 450 » est remplacé par le montant : « 1 000 ».

Article 2

Après le deuxième alinéa de l’article L. 3421‑1 du code de la santé publique, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Si l’infraction est commise en présence de mineurs, les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 11 250 € d’amende. »

Article 3

L’article L. 3421‑1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le délit prévu au premier alinéa est commis par un mineur âgé de seize ans au moins, y compris en cas de récidive, l’action publique peut être éteinte par le versement d’une amende forfaitaire de quatrième classe prévue au 4° de l’article 131‑13 du code pénal. »

Article 4

Après le premier alinéa de l’article L. 3611‑3 du code de la santé publique, sont insérés les six alinéas suivants :

« Il est formellement interdit au commerçant de vendre du protoxyde d’azote s’il a tout lieu de croire que son utilisation sera détournée par l’acheteur potentiel.

« Une transaction est considérée suspecte lorsque la personne commercialisant le protoxyde d’azote constate que le client, notamment :

« 1° Refuse de préciser l’usage qu’il envisage de faire des articles objets de la transaction ;

« 2° Souhaite l’acquisition d’articles dans des quantités inhabituelles ;

« 3° Sollicite l’acquisition d’articles inhabituels pour l’usage envisagé ;

« 4° Insiste pour recourir à certaines méthodes de paiement, notamment, pour des achats importants, en numéraire. »