Description : LOGO

N° 742

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 17 janvier 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer la protection des familles d’enfants touchés
par une affection de longue durée,

(Renvoyée à la commission des affaires sociales, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),)

présentée par Mesdames et Messieurs

Paul CHRISTOPHE, Laurent MARCANGELI et les membres du groupe Horizons (1) et apparentés (2),

députés.

 

______________

(1) Mesdames et Messieurs : Xavier Albertini, Henri Alfandari, Béatrice Bellamy, Thierry Benoit, Agnès Carel, Paul Christophe, Félicie Gérard, François Gernigon, François Jolivet, Loïc Kervran, Stéphanie Kochert, Luc Lamirault, Anne Le Hénanff, Didier Lemaire, Lise Magnier, Laurent Marcangeli, Naïma Moutchou, Jérémie Patrier‑Leitus, Christophe Plassard, Marie‑Agnès Poussier‑Winsback, Philippe Pradal, Isabelle Rauch, Vincent Thiébaut, Frédéric Valletoux, André Villiers, Anne‑Cécile Violland.

(2) Mesdames et Messieurs : Yannick Favennec‑Bécot, Jean‑Charles Larsonneur, Jean‑François Portarrieu.


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les trois années qui viennent de s’écouler ont profondément éprouvé notre pays.

Lʼangoisse collective et la fragilisation de nos liens sociaux et économiques provoquées par la crise sanitaire mondiale ont bouleversé nos certitudes.

En nous confrontant à notre vulnérabilité, le virus de la covid‑19 nous exhorte à mener une réflexion dʼensemble sur la viabilité de notre modèle de société en général et sur nos mécanismes de solidarité en particulier.

Ensemble, dans lʼépreuve, nous avons dû réapprendre à prendre soin les uns des autres et nous avons élaboré des solutions de proximité qui, de fait, replacent la solidarité au cœur de lʼédifice social.

À cet égard, notre mécanisme de redistribution sociale incarne lʼeffort collectif consenti par la société pour soutenir ses membres les plus fragiles, participant, ainsi, à la réalisation dʼune collectivité de destins.

Pour autant, si nous reconnaissons l’attention accrue portée par la solidarité nationale aux familles d’enfants victimes d’une maladie grave, force est cependant de constater que l’accompagnement de ces familles reste incomplet et inadapté face à l’urgence de la situation.

Engagés dans une lutte permanente pour la survie de leur enfant, ces parents doivent pouvoir bénéficier de conditions optimales par le soutien ferme des autres membres de la collectivité, pour qu’ils puissent, ainsi, protéger chaque parcelle de vie.

Des avancées majeures ont été réalisées ces dernières années en faveur de lʼaccompagnement, avec une attention accrue portée à la situation des aidants, ces auxiliaires de lʼombre qui, quotidiennement, œuvrent aux côtés de leurs proches en difficulté.

Cependant, des obstacles, et notamment des freins administratifs, compliquent encore inutilement la vie de ces familles en détresse.

En effet, devant cette situation inattendue, de nombreuses familles, souvent jeunes, parfois monoparentales, se retrouvent dans l’obligation de devoir réduire leur temps de travail, voire de le cesser pour pouvoir s’occuper de leur enfant.

Elles se retrouvent donc contraintes de devoir multiplier les démarches auprès de l’administration et de faire face à des délais d’attente de plusieurs semaines, voire de plusieurs mois, pour pouvoir bénéficier de leurs droits financiers, scolaires ou même d’une carte d’invalidité pour leur enfant.

Cette situation intenable pour les familles a notamment été démontrée par les nombreuses enquêtes menées par la fédération Grandir sans cancer.

Ces familles qui subissent aussi parfois le manque de compréhension de leurs employeurs et de leurs débiteurs dans le paiement de leurs loyers, le remboursement de leurs crédits ou de leurs charges fiscales.

L’intention de ce texte est donc bien d’appliquer aux parents d’enfants malades les mêmes mécanismes de protection que pour les adultes victimes d’une situation identique.

L’annonce dʼune maladie infantile est un cataclysme qui ne frappe pas uniquement la famille concernée, mais qui diffuse une onde de choc déstabilisant la communauté dans son ensemble.

La nature exceptionnelle, brutale et urgente de la situation doit donc nous amener à prendre des mesures exceptionnelles réellement adaptées.

Cette proposition de loi vise ainsi à apporter des réponses concrètes et opérationnelles aux familles dont l’enfant est victime d’une maladie grave, reconnue comme affection de longue durée (ALD), ou d’un accident de la vie, pour renforcer leur protection et tenter d’améliorer considérablement leur quotidien.

La rédaction retenue à l’article 1er intègre la protection contre le licenciement et les mutations dans le code du travail en s’inspirant de la protection de la grossesse et de la maternité, pour tout parent salarié étant dans l’obligation, sur justificatif médical, de réduire ou de cesser son activité professionnelle. Cette protection s’appliquerait aussi lors de la période d’essai.

L’article 2 vise à préciser que le télétravail, pour les salariés concernés par une maladie grave ou par le handicap d’un enfant à charge, doit être considéré comme un aménagement de poste rendu nécessaire pour permettre la continuité de l’activité de l’entreprise et garantir la protection des salariés.

L’article 3 supprime la condition d’accord explicite du service du contrôle médical pour procéder au renouvellement de l’allocation journalière de présence parentale (AJPP). Cette suppression permettra d’accélérer considérablement les démarches administratives pour le versement effectif de l’aide.

L’article 4 supprime la mesure d’écrêtement de l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) et de l’allocation journalière de proche aidant (AJPA) pour les travailleurs indépendants et les personnes en recherche d’emploi. Cette disposition permet d’éviter une gestion trop importante des prestations pour les caisses. En effet, après plus d’un an de versement, le dérapage financier anticipé n’a pas été avéré.

L’article 5 propose une expérimentation pour une durée de 3 ans dans, au plus, dix départements, pour évaluer le dispositif de complément pour frais versé mensuellement à certaines familles d’enfants malades. Son rapport d’évaluation remis par le Gouvernement au Parlement permettra d’améliorer cette prestation en améliorant la prise en compte des divers enjeux financiers auxquels sont confrontés les ménages.

L’article 6 gage cette proposition de loi.

 


proposition de loi

Article 1er

Le paragraphe 3 de la sous‑section 2 de la section 4 du chapitre V du titre II du livre II de la première partie du code du travail est complété par un article L. 1225‑65‑3 ainsi rédigé :

« Art. L. 1225653. – L’employeur ne doit pas prendre en considération l’état de santé, qui nécessiterait un congé quel qu’il soit pour maladie grave ou accident, d’un enfant à charge pour rompre le contrat de travail du salarié, y compris au cours d’une période d’essai ou, sous réserve d’une affectation temporaire réalisée dans le cadre des dispositions des articles L. 1225‑7, L. 1225‑9 et L. 1225‑12, pour prononcer une mutation d’emploi. Il lui est également interdit de rechercher ou de faire rechercher toutes informations concernant l’état de santé des enfants de l’intéressé. »

Article 2

Au premier alinéa de l’article L. 1222‑11 du code du travail, après le mot : « majeure », sont insérés les mots : « , de la maladie grave ou du handicap d’un enfant à charge » .

Article 3

I. – Au deuxième alinéa de l’article L. 544‑3 du code de la sécurité sociale, le mot : « explicite » est supprimé.

II. – Le dernier alinéa de l’article L. 1225‑62 du code du travail est ainsi modifié :

1° Le mot : « attestant » est remplacé par le mot : « atteste » ;

2° Les mots : « est confirmé par un accord explicite du service du contrôle médical prévu à l’article L. 315‑1 du code de la sécurité sociale ou du régime spécial de sécurité sociale » sont supprimés.

Article 4

Le b du 1° du I de l’article 54 de la loi n° 2021‑1754 du 23 décembre 2021 de financement de la sécurité sociale pour 2022 est abrogé.

Article 5

I. – Pour une durée de trois ans à compter de la publication de la présente loi, une expérimentation est mise en place dans, au plus, dix départements dans lesquels les conditions de détermination du niveau du complément prévu à l’article L. 544‑7 du code de la sécurité sociale ainsi que les modalités calendaires de son versement dérogent aux dispositions de ce même article pour mieux tenir compte des enjeux financiers auxquels sont confrontés les ménages.

II. – L’expérimentation donne lieu à un rapport d’évaluation remis par le Gouvernement au Parlement avant son terme.

III. – Un décret précise les conditions d’application du présent article.

Article 6

La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.