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N° 785

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ASSEMBLÉE  NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 31 janvier 2023.

PROPOSITION DE LOI

tendant à la création d’un Haut Conseil chargé d’un audit
général sur l’utilisation des fonds publics,

(Renvoyée à la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Pierre MORELÀL’HUISSIER, Guy BRICOUT, Stéphane LENORMAND, Stéphane VIRY, Hubert OTT, Émilie BONNIVARD, Véronique LOUWAGIE, Nicolas FORISSIER, Emmanuelle MÉNARD, Alexandre VINCENDET, Pierrick BERTELOOT, Tematai LE GAYIC, Alexis JOLLY, Sophie BLANC, Christophe BARTHÈS, Thierry FRAPPÉ, Yoann GILLET, Hubert BRIGAND,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Selon les statistiques des recettes publiques 2022 de l’OCDE, la France est deuxième en terme de prélèvements obligatoires : 45,1 % du PIB, juste derrière le Danemark, contre une moyenne à 34,1 %. La pression fiscale y est sans équivalent, et ne se retrouve plus dans la qualité de nos services publics, notamment en zone rurale.

Cette différence entre la quantité des prélèvements et la qualité des droits et services qui en découlent constitue l’un des éléments centraux des récents mouvement de contestation tels que les Gilets jaunes, mais aussi la crise de l’hôpital.

De plus, et d’après les dernières statistiques publiques datant de 2021, la dépense publique française est de 1 477 milliards d’euros, soit l’équivalent de 59 % du PIB, contre une moyenne de 47,7 % dans la zone euro. Là aussi, notre pays se classe premier. Le quinquennat actuel avait pour ambition de ramener ce taux de dépense publique à 52 % du PIB, se basant sur une croissance espérée de 1,7 %, qui semble aujourd’hui de plus en plus lointaine.

En réalité, cet objectif n’était atteignable, selon la Fondation pour la recherche sur les administrations et les politiques publiques (IFRAP), que « parce que la hausse des dépenses est moins rapide que la croissance du PIB ». Le travers français, qui est de trouver une solution à tous les maux en augmentant la dépense publique, est donc toujours bel et bien vivant, alors même qu’il a conduit à une profonde dégradation des comptes publics : la dette est aujourd’hui évaluée à 113,7 % du PIB.

Financer la dépense par toujours plus de dettes semble donc un principe directeur du gouvernant français – à noter d’ailleurs qu’il ne s’applique pas à lui-même la règle contraignant les collectivités locales, qui ne peuvent se servir du levier de la dette que pour les dépenses d’investissement. 

Or notre pays connait de nombreuses difficultés, et le volume des dépenses semble ne les atténuer en rien. Le taux de chômage est aujourd’hui de 7,3% ; les politiques publiques se succèdent les unes aux autres sans faire disparaitre des problèmes identifiés depuis plusieurs décennies ; les dépenses fiscales s’avèrent souvent contre‑productives, à l’instar des zones de revitalisation rurales, selon le récent rapport d’Anne Blanc et Véronique Louwagie ; l’argent public est, trop souvent mal employé.

L’argent, en soi, ne manque pas en France. Les difficultés se situent plutôt dans l’utilisation des deniers publics, ne serait-ce que parce que les dépenses publiques atteignent un niveau qui n’est plus soutenable. La France ne peut plus se permettre de prélever toujours plus pour dépenser autant, et aussi mal. Le sentiment d’écrasement fiscal, souvent relevé depuis de nombreuses années, part d’un constat bien réel de gabegie dans l’utilisation des fonds publics.

Un changement de paradigme s’impose donc. L’objet de la présente Proposition de loi vise à mener un vaste audit des Finances publiques, afin de déterminer précisément la destination des fonds, les sommes allouées à chaque programme et objectif, d’évaluer leur opportunité et leur efficacité.

Cet audit permettra ainsi d’obtenir une vision claire et globale de la situation, afin de décider s’il y a lieu de maintenir ces dépenses ou au contraire de cesser un gaspillage avéré.

Il est essentiel que ce travail puisse être mené avec des parlementaires qui sont les seuls à même de voter les budgets de l’État et d’autoriser le prélèvement de l’impôt.

Il nous appartient à nous, élus, de mener une analyse d’efficacité et de rationalité de notre dépense avant de recourir aux impôts ou à la dette pour les financer. Les conclusions de ce Haut Conseil ainsi créé seront rendues publiques à l’occasion d’un débat au Parlement.

 

 


proposition de loi

Article 1er

Il est créé un Haut Conseil visant à mener un audit des finances, afin de déterminer l’efficacité de la dépense publique ainsi que les pistes d’économie possible, de renforcer la transparence et l’information des citoyens et d’établir des standards lisibles et publics des mesures d’évaluation.

Article 2

Le Haut Conseil est composé de :

– trois députés et trois sénateurs, désignés respectivement par le Président de l’Assemblée nationale et par le Président du Sénat ;

– quatre maires, désignés par le Président de l’Association des maires de France ; 

– deux Présidents de conseil départemental, désignés par le Président de l’Assemblée des départements de France ; 

– deux Présidents de conseil régional, désignés par le Président de l’Association des Régions de France ; 

– deux membres de la Cour des comptes, désignés par le Président de la Cour des comptes ; 

– deux membres du Conseil d’État, désignés par le Président du Conseil d’État.

Article 3

Le Haut Conseil est doté de pouvoirs d’investigation, lui permettant d’effectuer des contrôles sur pièces et sur place, de mener les auditions et de se faire communiquer les documents nécessaires.

Article 4

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Haut Conseil remet un rapport au Parlement qui peut l’examiner au cours d’un débat.

Article 5

Un décret pris en Conseil d’État fixe les modalités de fonctionnement du Haut Conseil.

Article 6

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.