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N° 833

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 février 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à limiter à quarantecinq minutes la durée de trajet en transports en commun entre les lycées d’enseignement général et les communes de résidence des élèves,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l'éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par Mesdames et Messieurs

Philippe BALLARD, Bénédicte AUZANOT, Romain BAUBRY, José BEAURAIN, Christophe BENTZ, Bruno BILDE, Emmanuel BLAIRY, Sophie BLANC, Jorys BOVET, Frédéric CABROLIER, Victor CATTEAU, Sébastien CHENU, Caroline COLOMBIER, Annick COUSIN, Grégoire de FOURNAS, Frédéric FALCON, Thibaut FRANÇOIS, Stéphanie GALZY, Frank GILETTI, Christian GIRARD, Géraldine GRANGIER, Daniel GRENON, Jordan GUITTON, Marine HAMELET, Alexis JOLLY, Laure LAVALETTE, Julie LECHANTEUX, Katiana LEVAVASSEUR, MarieFrance LORHO, Philippe LOTTIAUX, Matthieu MARCHIO, Michèle MARTINEZ, Bryan MASSON, Alexandra MASSON, Kévin MAUVIEUX, Nicolas MEIZONNET, Joëlle MÉLIN, Thomas MÉNAGÉ, Pierre MEURIN, Serge MULLER, Julien ODOUL, Caroline PARMENTIER, Kévin PFEFFER, Lisette POLLET, Stéphane RAMBAUD, Angélique RANC, Julien RANCOULE, Laurence ROBERTDEHAULT, Béatrice ROULLAUD, Anaïs SABATINI, Alexandre SABATOU, Emeric SALMON, Emmanuel TACHÉ de la PAGERIE, Michaël TAVERNE, Lionel TIVOLI, Antoine VILLEDIEU, Michel GUINIOT, Christophe BARTHÈS,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Le rapport « les Chiffres‑clés des régions 2022 », récemment publié par Régions de France, démontre une montée en puissance régulière des investissements de ces collectivités chargées de la gestion des lycées mais aussi de la stratégie pour l’enseignement supérieur, la recherche et l’innovation.

Le document place l’enseignement au deuxième rang des priorités des régions, derrière les transports, mais devant l’emploi, l’économie ou l’agriculture. En 2022, l’enseignement représentera 16,3 % des dépenses des régions.

En France, il existe trois voies possibles pour faire des études au lycée : générale, technologique ou professionnelle. Même si elles mènent toutes au baccalauréat, chacune propose un chemin et un avenir différents. 

Sur les 3 750 lycées recensés en France, 1 620 sont des lycées d’enseignement général et leur répartition sur le territoire national est inégalitaire et source de frustration.

De nombreux secteurs géographiques se trouvent particulièrement mal dotés en termes de lycées d’enseignement général imposant à beaucoup de lycéens des temps de transport très conséquents jusqu’à 1 h 30, matin et soir, pour se rendre dans leurs lycées de secteur. Une étude de l’IFOP de 2020 « Les parents et les transports domicile – établissement scolaire » atteste que dans la ruralité ces temps de transport explosent.

Notre constitution garantit à tous un droit fondamental qui est l’accès à un enseignement de base suffisant et gratuit jusqu’au baccalauréat.

De cette garantie d’un enseignement suffisant découle évidemment un temps de trajet scolaire acceptable. Ce caractère acceptable du trajet scolaire dépend évidemment des circonstances et des implantations géographiques.

Aujourd’hui dans beaucoup de territoires, les choix après le collège sont déterminés non pas par les capacités ou les vœux des élèves, mais par les conditions d’accès à l’enseignement secondaire et le temps passé pour s’y rendre. Aussi, bien trop souvent des orientations sont choisies par défaut.

Être éloigné des lycées d’enseignement général accroît les risques de quitter précocement le système éducatif conduisant aux études supérieures. La réforme récente du baccalauréat a encore plus fragilisé l’avenir des élèves vivant dans la ruralité ayant encore moins accès aux filières d’enseignement général de leur choix.

Ces étudiants n’ont pas de réels choix alternatifs et beaucoup renoncent aux études supérieures dans les filières générales.

Les statistiques de l’Insee ([1]) le prouvent, les jeunes ruraux sont davantage en apprentissage que leurs homologues urbains. Ils suivent plus fréquemment que leurs homologues urbains un cursus de type BTS, DUT ou professionnel dans les lycées et centres de formation par apprentissage, ceux‑ci étant mieux répartis sur le territoire.

On parle beaucoup du bien‑être animal, mais qu’en est‑il du bien‑être des lycéens de la ruralité qui subissent des temps de transport empêchant un rythme scolaire dans de bonnes conditions ? Pourquoi les enfants vivant dans la ruralité n’ont‑ils pas les mêmes chances d’accès que les urbains à un enseignement leur permettant d’accéder aux études supérieures ? On a favorisé les Cordées de la réussite pour les secteurs REP+, mais on ne favorise en aucune façon l’accès à l’enseignement secondaire des territoires ruraux.

Les découpages académiques ne permettent pas une bonne fluidité des répartitions. Bien qu’une commune puisse être proche du lycée d’enseignement général d’un autre département, ses enfants ne sont pas pour autant prioritaires dans l’affectation et se retrouvent donc sans affectation alors qu’ils ont un lycée à proximité de leur domicile.

Ainsi, cette proposition de loi a pour vocation d’imposer un critère spécifique aux régions de métropole dans le cadre de leur « programme prévisionnel des investissements relatifs aux lycées ». Il s’agit de prendre en compte prioritairement le calcul des temps de transport dans les zones concernées et de faire en sorte que plus aucun lycéen de l’enseignement général ne subisse plus de 45 minutes de temps de transport matin et soir sur son territoire.

In fine, il peut s’agir de la construction d’un lycée, d’ouvrir de nouvelles classes, de la modification des transports régionaux, ou de rendre obligatoire une concertation inter académique, afin qu’il y ait une réelle égalité d’accès à l’enseignement secondaire pour tous.

Il ne s’agit pas d’une charge supplémentaire ou de modifier des crédits, mais d’imposer un critère nouveau pour les choix et les décisions d’investissements dans le cadre d’un budget déjà existant, actuellement laissés au seul arbitrage politique des régions.

Nous donnons également la possibilité de rendre des lycées hors département, mais plus proches, devenir des lycées de rattachement de secteur obligeant ainsi les académies à se concerter.

Cette proposition de loi respecte la stabilité du budget alloué aux dépenses des régions en faveur des lycées, mais elle en détermine néanmoins de nouvelles exigences à l’égard des collectivités pouvant s’analyser comme excédant la simple charge de gestion. Aussi, pour ne pas se voir opposer l’article 40 de la constitution, l’article 2 propose un gage financier.

 

 


proposition de loi

Article 1er

L’article L. 214-5 du code de l’éducation est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa est complété par trois phrases ainsi rédigées :

« Toute commune est reliée à son lycée d’enseignement général de secteur par un service régulier de transport public. La durée du trajet entre cet établissement et la commune de résidence de chaque élève ne peut être supérieure à quarante-cinq minutes. La localisation des établissements répond à cette exigence. » ;

2° Après l’avant-dernier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les élèves dont la commune de résidence sur le territoire de la métropole n’est pas reliée en moins de quarante-cinq minutes par un service régulier de transport public à un lycée d’enseignement général situé dans le même département sont rattachés à leur demande à un district de recrutement situé dans un département limitrophe et affectés dans un établissement d’enseignement général de ce district. » ;

3° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Un décret définit les conditions d’application du présent article. Il précise notamment les modalités de calcul de la durée mentionnée aux alinéas 2 et 4. ».

Article 2

La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et corrélativement, pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.


([1])° Source : Insee, Recensement de la population de 2018.