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N° 849

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 14 février 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à protéger les artisans boulangers de la concurrence déloyale,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Julien ODOUL, Yaël MENACHE, Frédéric FALCON, Sébastien CHENU, Grégoire de FOURNAS, Michèle MARTINEZ, Katiana LEVAVASSEUR, Laure LAVALETTE, Bruno BILDE, Frédéric CABROLIER, Frédéric BOCCALETTI, José BEAURAIN, Pierrick BERTELOOT, Géraldine GRANGIER, Thierry FRAPPÉ, Alexis JOLLY, Michaël TAVERNE, Serge MULLER, Béatrice ROULLAUD, Laurence ROBERTDEHAULT, Jocelyn DESSIGNY, Nathalie Da CONCEICAO CARVALHO, Christian GIRARD, Alexandre LOUBET, Emeric SALMON, Daniel GRENON, Nicolas DRAGON, Victor CATTEAU, Jordan GUITTON, José GONZALEZ, Frank GILETTI, Alexandre SABATOU, Philippe BALLARD,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Alors que la baguette de pain vient tout juste d’être classée au Patrimoine mondial de l’Unesco, les témoignages de boulangers en détresse se multiplient en France. Ils doivent en effet faire face à l’envolée phénoménale du prix de l’énergie en plus de la hausse des matières premières : 7 % à 11 % d’augmentation pour l’eau, 33 % pour le beurre ou encore 45 % pour la farine. Certains artisans‑boulangers ne peuvent plus poursuivre leur activité et vivent avec une épée de Damoclès au‑dessus de la tête : s’ils n’ont pas déjà mis la clé sous la porte, ils sont dans l’obligation de licencier tout leur personnel et sont sommés d’augmenter leurs prix de 5 %, et ce, pour tenter de survivre. La situation est plus que catastrophique puisque 8 boulangeries sur 10 sont menacées de fermeture en 2023 selon le groupement d’artisans‑boulangers Grain‑de‑Blé.

Les 35 % d’aides de l’État n’auront finalement pas été suffisantes pour bon nombre d’artisans‑boulangers, qui ont déjà tout perdu.

Dans les Yvelines, une boulangerie à Feucherolles va voir sa facture d’électricité passer de 3 000 euros à 30 000 euros par mois, soit une augmentation de 1 000 %. Dans le Morbihan, la seule boulangerie de la commune de Landaul a dû fermer et déposer le bilan, la facture d’électricité de ce boulanger ayant été multipliée par quatre depuis octobre. Dans le Nord, la boulangerie du village de Bourghelles a vu sa facture d’électricité passer de 1 800 euros à 6 000 euros. Pour éviter que sa facture d’électricité ne dépasse les 6 000 euros pour le mois de janvier et pour tenter de tenir bon, cette boulangerie a donc pris la décision de fermer toute la semaine et de n’ouvrir que les week‑ends. Les clients de cette boutique traditionnelle ouverte depuis 27 ans sont attristés de devoir se fournir en pain dans les grandes surfaces plutôt que de continuer à faire vivre leur commerce de proximité.

Le mois de janvier est une période de l’année particulièrement attendue par le secteur de la boulangerie‑pâtisserie en raison de la fête de l’Épiphanie ; elle est aujourd’hui devenue source d’appréhension. Selon la Confédération Nationale de la Boulangerie‑Pâtisserie Française (CNBPF), les 33 000 artisans‑boulangers en France font en moyenne 800 galettes chacun par an. Le mois de janvier est donc une période charnière puisque d’après une étude IFOP, 94 % des Français déclarent consommer de la galette des rois. Ces dernières années, ils ont consommé entre 30 et 32 millions de galettes, ce qui peut représenter plus de 10 % du chiffre d’affaires des boulangeries. Si presque un Français sur deux déclare l’acheter dans une boulangerie, la galette des rois est aussi une source de bénéfice importante pour les grandes surfaces qui commencent à la commercialiser parfois dès le mois d’octobre, créant ainsi un sentiment d’injustice chez les boulangers. Alors qu’en boulangerie traditionnelle le prix d’une galette pour huit personnes peut avoisiner les trente euros, c’est environ trois fois moins cher au rayon boulangerie‑pâtisserie des enseignes de grande distribution. Ces prix défiants toute concurrence et la commercialisation de la galette anticipée dès le mois d’octobre sont un véritable pied de nez aux artisans‑boulangers déjà largement affaiblis par la hausse du prix de l’énergie.

Afin de lutter contre la concurrence déloyale que subissent les artisans‑boulangers, l’interdiction pour la grande distribution de commercialiser la galette des rois avant et après le mois de janvier apparait nécessaire, à l’instar de la date de commercialisation du vin Beaujolais fixée au troisième jeudi de chaque mois de novembre. Cela permettrait en outre d’inciter les Français à consommer davantage dans leur boulangerie de quartier ou de village.

Tel est l’objet de la proposition de loi que nous vous demandons, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

 


proposition de loi

Article unique

La galette des rois dans les commerces de la moyenne et de la grande distribution ne peut être commercialisée avant le 2 janvier suivant le dernier jour férié légal de l’année civile au sens de l’article L. 3133‑1 du code du travail et après le 31 janvier de la même année.

Les modalités d’application du présent article sont précisées par décret.