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N° 893

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 février 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à faire respecter l’obligation légale de débroussaillement,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Lionel ROYERPERREAUT, Sabrina AGRESTIROUBACHE, Fanta BERETE, Philippe FAIT, Joël GIRAUD, Yannick HAURY, Sandrine LE FEUR, Didier LEMAIRE, Jacqueline MAQUET, Robin REDA, Corinne VIGNON,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi vise à faire respecter davantage l’obligation de débroussaillement.

L’article L. 131‑10 du code forestier définit le débroussaillement comme « les opérations de réduction des combustibles végétaux de toute nature dans le but de diminuer l’intensité et de limiter la propagation des incendies ». Les actes de débroussaillement ont pour objectif de créer une rupture dans la végétation, afin de ralentir la propagation des incendies.

Pour l’heure, une obligation légale de débroussaillement impute aux propriétaires de terrain situé à moins de 200 mètres d’un bois ou d’une forêt dans certains territoires. Ces territoires sont ceux représentants un grand risque d’incendie et sont listés à l’article L. 133‑1 du code forestier.

Au sein de cet ensemble, la réglementation diffère suivant si le terrain est situé en zone urbaine ou non.

En zone urbaine, le débroussaillement est obligatoire et concerne l’ensemble des propriétaires de terrains, construits ou non. Des spécificités se font cependant jour si la commune est dotée d’un plan local d’urbanisme ou non.

En zone non‑urbaine, l’obligation concerne uniquement le propriétaire d’une construction, d’un chantier ou d’une installation. Celui‑ci est alors tenu de réaliser des travaux de débroussaillement dans un rayon de 50 mètres, y compris au‑delà de la limite de son terrain. Cette obligation peut de plus être portée à un rayon de 100 mètres sur décision du maire.

Ainsi, il n’est pas rare que l’obligation de débroussaillement impose à un propriétaire d’intervenir sur la parcelle de son voisin, notamment si celle‑ci n’est pas elle‑même assujettie à l’obligation de débroussaillement. Cette situation créée des tensions entre les voisins, et une méconnaissance des droits et devoirs de chacun.

De cette législation complexe découle un constat sans appel : le taux d’application de l’obligation légale de débroussaillement oscillerait entre 30 et 50 % dans le meilleur des cas, comme l’a signalé la mission d’information flash sur la prévention des incendies de forêt et de végétation menée par les députés Alain Perea et François‑Michel Lambert sous la dernière législature.

Il est ainsi proposé, dans cette proposition de loi, un certain nombre de modifications législatives afin de faire davantage respecter l’obligation de débroussaillement. Alors que notre pays connait chaque année un nombre exponentiel d’incendies, le législateur se doit de faciliter l’application des mesures permettant de les limiter.

L’article 1 vise à mieux définir dans la loi le débroussaillement. Dans le sens commun, il est convenu que le débroussaillement concerne en premier lieu les strates les plus basses. Or, il apparait que les haies et les arbres sont aussi vecteurs d’incendies, et se doivent d’être aussi entretenus et élagués.

L’article 2 vise à modifier la liste des propriétaires concernés par l’obligation légale de débroussaillement. Afin d’éviter les mésententes et le déchargement des responsabilités sur autrui, il est proposé que l’ensemble des propriétaires de terrain en zone à urbaniser soit concerné par cette obligation, et non les seuls propriétaires de bâtis.

L’article 3 vise à amplifier la communication afférente à l’obligation légale de débroussaillement. Cette proposition fait directement échos aux travaux menés par les sénateurs Jean Bacci, Anne‑Catherine Loisier, Pascal Martin et Olivier Rietmann au sein de la mission conjointe de contrôle relative à la prévention et à la lutte contre l’intensification et l’extension du risque incendie. Il est ainsi proposé d’établir une communication comprenant les spécificités de l’obligation légale de débroussaillement aux propriétaires des terrains concernés une fois les différents plans locaux d’urbanisme publiés.

L’article 4 oblige les assureurs à se retourner contre les propriétaires n’ayant pas réalisé l’obligation légale de débroussaillement en cas d’incendies. La mission d’information flash des députés Perea et Lambert a ainsi souligné que les assureurs acceptaient de couvrir presque systématiquement les coûts d’un sinistre, même en l’absence du respect de cette obligation. Il est de plus proposé de tripler la franchise afférente.

L’article 5 créé une réduction d’impôt aux travaux de débroussaillement, afin de soutenir les propriétaires dans cette démarche. Le débroussaillement est une mesure qui peut en effet se révéler coûteuse pour les assujettis. Elle est pourtant très importante pour assurer la sécurité de tous. L’État viendrait alors compenser en partie ce coût pour les propriétaires.

L’article 6 demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l’opportunité de renforcer les sanctions pénales affligées au non‑respect des obligations légales de débroussaillement, notamment en passant d’une contravention de quatrième catégorie à une contravention de cinquième catégorie dans les situations mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 134‑6 du code forestier. Un regard particulier sera porté sur la possibilité de créer une circonstance aggravante lorsque l’obligation légale de débroussaillement n’est pas acquittée au sein d’un parc national. Le faible montant de la contravention pour non‑respect de l’obligation légale de débroussaillement est en effet souvent mis en avant pour expliquer le taux d’application de ce devoir.

L’article 7 demande au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport sur l’opportunité de faire acquitter les travaux de débroussaillement aux communes, financés par une taxe payée par l’ensemble des propriétaires concernés. Cette idée avait été soulignée au moment des grands incendies de 2003 et ne semble depuis ne pas avoir été creusée davantage. Elle pourrait pourtant représenter une solution équilibrée, la municipalité se devant d’ores‑et‑déjà d’acquitter cette tache si celle‑ci n’est pas réalisée par les propriétaires.

L’article 8 permet de gager cette proposition de loi.

Tel est l’objet de la présente proposition de loi

 

 

 


proposition de loi

Article 1er

À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 131‑10 du code forestier, après le mot : « nature », sont insérés les mots : « , notamment arbres, broussailles et strates basses, ».

Article 2

L’article L. 134‑6 du code forestier est ainsi modifié :

1° Au 3°, après le mot : « dans », sont insérés les mots : « les zones à urbaniser et dans » ;

2° Au début du 4°, sont ajoutés les mots : « Dans les zones à urbaniser et ».

Article 3

L’article L. 134‑15 du code forestier est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Une communication comprenant les spécificités de l’obligation légale de débroussaillement est adressée aux propriétaires des terrains concernés une fois les différents plans locaux d’urbanisme publiés. »

Article 4

L’article L. 122‑8 du code des assurances est ainsi modifié :

1° Le mot : « peut » est remplacé par les mots : « se doit » ;

2° Après le mot : « forestier, » est inséré le mot : « de » ;

3° À la fin, le montant : « 5 000 euros » est remplacé par le montant : « 15 000 euros ».

Article 5

I. – Le II de la section V du chapitre Ier du titre Ier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par une division ainsi rédigée :

« 36° Crédit d’impôt pour dépenses de travaux de débroussaillement et de maintien en état débroussaillé

« Art. 200 septdecies. – I. – Lorsqu’elles n’entrent pas en compte pour l’évaluation des revenus des différentes catégories, ouvrent droit à un crédit d’impôt sur le revenu les dépenses réalisées par un contribuable domicilié en France au sens de l’article 4 B au titre des obligations de débroussaillement et de maintien en état débroussaillé prévues par les articles L. 131‑11 et L. 134‑6 du code forestier.

« II. – Le crédit d’impôt est égal à 50 % des dépenses mentionnées au I, effectivement supportées par le contribuable et retenues dans la limite annuelle de 1 000 euros pour un même foyer fiscal.

« III. – Les dépenses mentionnées au I ouvrent droit au bénéfice du crédit d’impôt, sous réserve que le contribuable soit en mesure de présenter, à la demande de l’administration fiscale, les pièces justifiant du paiement, de la nature et du montant des prestations réellement effectuées.

« IV. – Le crédit d’impôt fait l’objet d’une reprise au titre de l’année au cours de laquelle la condition mentionnée au III n’est pas respectée. »

II. – Le I entre en vigueur à compter du 1er janvier 2024.

III. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

IV. – Le III n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

Article 6

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de renforcer les sanctions pénales pour non‑respect des obligations légales de débroussaillement, notamment en passant d’une contravention de quatrième catégorie à une contravention de cinquième catégorie dans les situations mentionnées aux 1° à 4° de l’article L. 134‑6 du code forestier. Un regard particulier sera porté sur la possibilité de créer une circonstance aggravante lorsque l’obligation légale de débroussaillement n’est pas acquittée au sein d’un parc national.

Article 7

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’opportunité de faire acquitter les travaux de débroussaillement aux communes, financés par une taxe payée par l’ensemble des propriétaires concernés.