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N° 1201

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 10 mai 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à lutter contre les dérives du droit d’asile,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Christelle D’INTORNI,

députée.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis de trop nombreuses années, notre pays est plongé dans une crise migratoire inédite.

La part d’immigrés dans la population française n’a jamais été aussi importante, elle représente 10,3 % de la population vivant en France en 2021, contre 7,4 % en 1975 et 5,0 % en 1946.

Cette augmentation de l’immigration se conjugue dangereusement à une saturation de nos capacités d’intégration par le travail, l’éducation, le logement, la santé. Pire, elle est devenue un terreau fertile au communautarisme, à la délinquance et au chômage.

Cette immigration de masse connaît plusieurs facteurs : notre incapacité à maîtriser nos frontières, la générosité de notre système social, l’effritement de l’autorité de l’État mais aussi l’inadaptabilité de nos procédures de régulation de l’immigration devenues désuètes.

Héritière d’une tradition révolutionnaire qui, jadis, avait vocation à accueillir les populations chassées et tyrannisées par les guerres intra‑européennes, le droit d’asile connaît aujourd’hui un véritable dévoiement.

Ces dernières années, le droit d’asile n’a eu de cesse, au rythme des nouveaux engagements européens et internationaux ainsi que des décisions de justice, de connaître une évolution ultra favorable à l’immigration.

En dix ans, la France a connu un doublement des demandes d’asile. En 2021, notre pays a enregistré 104 381 demandes de droit d’asile, soit une augmentation de près de 30 % par rapport à l’année 2020.

Selon le ministère de l’Intérieur, avec plus de 110 915 demandes enregistrées par L’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) à la fin octobre 2022 (+31 %), le niveau de la demande pourrait se situer au‑dessus des 130 000 demandes annuelles proche du niveau record de 2019 (135 000).

À l’échelle de l’Union européenne, le nombre de demandes d’asile déposées depuis le début de l’année 2022 a augmenté de 68 % par rapport à l’année 2021 (812 591 demandes d’asile).

Or le droit d’asile est aujourd’hui le symbole des dérives de nos procédures d’accueil. Considérée désormais comme une prime à l’illégalité et à l’irrégularité, les passeurs instrumentalisent abondamment cette procédure qui, au fond, subit en plein cœur les assauts d’une pression migratoire sans précédent.

En premier lieu, notre système d’asile implose par l’augmentation exponentielle des demandes rallongeant mécaniquement les délais et conduisant, de facto, à un détournement de la procédure à des fins d’immigration économique.

En deuxième lieu, les déboutés du droit d’asile n’étant quasiment jamais reconduits dans leur pays d’origine, la simple demande l’asile équivaut désormais pour leurs auteurs, à moyen terme, à l’obtention d’un titre de séjour.

En troisième lieu, le caractère trop attractif du système d’asile français a participé à son détournement.

Effectivement, alors qu’un étranger peut déposer sa demande d’asile à tout moment et en tout lieu sans pouvoir faire l’objet d’une mesure d’éloignement, dans le même temps, l’État français finance son hébergement, ses frais de justice par l’aide juridictionnelle, ses soins via l’aide médicale d’état, l’examen de son dossier par les médecins de santé publique, etc.

Si bien qu’une famille ayant usé de l’ensemble des voies de droit peut se maintenir sur le territoire national durant quatre à cinq ans. Cela, sans compter que les déboutés, dans leur grande majorité - représentant près de 75 % des demandes d’asile - ne sont jamais reconduits dans leur pays d’origine.

Notre droit d’asile est donc menacé dans son essence. Notre réponse doit être à la hauteur de l’idéal qu’on lui porte et retrouver son véritable sens.

À cette fin, nous ne pouvons plus raisonner à droit constant. Nous ne pouvons plus faire l’économie de mesures de bon sens. Nous ne pouvons plus nous embarrasser d’arguties juridico‑moralisatrices qui n’aboutiraient qu’à justifier notre immobilisme. Nous ne pouvons plus nous laisser guider par un maquis juridique européen mettant en péril notre propre système.

Dans ce contexte, l’ambition de cette proposition de loi est de refonder en profondeur le droit d’asile pour que la France, fidèle à ses valeurs, soit en mesure d’apporter une protection effective aux personnes opprimées, ce qui implique de mieux réserver cette voie exceptionnelle d’entrée et de séjour en France à ceux‑ci.

Au fond, cette proposition de loi vise à fournir des outils pour lutter efficacement contre les dérives du droit d’asile en rendant bien moins attractive cette procédure aux immigrés qui ne sont pas réellement menacés.

Aussi, l’article 1er propose que les demandes dasile soient déposées en dehors du territoire national sous peine d’irrecevabilité. Très concrètement, il s’agit de mettre un terme à la pratique visant, par la simple demande d’asile, à entraîner, de facto, un droit à venir et se maintenir sur le territoire national.

Au surplus, l’article 2 vise à mettre fin au dévoiement de la procédure d’asile par l’ouverture des voies de recours au terme desquelles le demandeur d’asile serait, in fine, fondé à obtenir un titre de séjour. Plus précisément, il est question, d’une part, d’abolir l’effet suspensif contre une décision de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides et, d’autre part, de prononcer une obligation de quitter le territoire pour l’ensemble des déboutés du droit d’asile.

Par ailleurs, l’article 3 de cette proposition de loi poursuit le même but en faisant obstacle à toute demande nouvelle de droit d’asile pour un individu qui a connu une décision de rejet prononcée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides.

L’article 4 de cette proposition de loi permet, de manière définitive et absolue, de mettre un terme à cette prime mortifère à l’illégalité et à l’irrégularité en matière d’immigration, en rendant irrecevable toute demande d’asile formulée par un individu entré illégalement sur le territoire national. En adoptant cette disposition, plus aucun individu ne pourra être naturalisé s’il est entré en France de manière irrégulière.

 

 


proposition de loi

Article 1er

Le livre V du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° À l’article L. 521‑1, les mots : « présent sur le territoire français et souhaitant demander l’asile se présente en personne » sont remplacés par les mots : « souhaitant demander l’asile doit formuler sa demande dans son pays d’origine ou, du moins, en dehors du territoire national » ;

2° À l’article L. 521‑3, les mots : « qui se trouve en France » sont supprimés ;

3° L’article L. 531‑32 est complété par un 4° ainsi rédigé :

« 4° Lorsque le demandeur dépose sa demande sur le territoire national » ;

4° L’article L. 541‑1 est ainsi rédigé :

« Le demandeur d’asile dont l’examen de la demande relève de la compétence de la France et qui l’a introduite auprès de l’Office français de protection des réfugiés et apatrides ne bénéficie ni du droit à venir sur le territoire français ni du droit à se maintenir sur le territoire français. » ;

5° Le titre V est abrogé ;

6° Le chapitre VII du titre IX est abrogé ;

Article 2

Le livre V du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° À la deuxième phrase de l’article L. 532‑4, le mot : « est » est remplacé par le mot : « n’est pas » ;

2° Au deuxième alinéa de l’article L. 542‑1, les mots : « le droit du demandeur de se maintenir sur le territoire français prend fin » sont remplacés par les mots : « le demandeur fait l’objet, de facto, d’une obligation de quitter le territoire ».

Article 3

La section 2 du chapitre III du titre IV du livre VII du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est complétée par un article L. 743‑3‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 74331. – Sauf circonstances particulières définies par décret en Conseil d’État, la décision définitive de rejet prononcée par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides, le cas échéant, après que la Cour nationale du droit d’asile ait statué, vaut obligation de quitter le territoire français et fait obstacle à toute nouvelle demande de titre. »

Article 4

I. – L’article 21‑16 du code civil est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Nul ne peut être naturalisé ou régularisé administrativement s’il est entré de façon irrégulière sur le territoire national. »

II. – Le code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile est ainsi modifié :

1° Au début du chapitre I du titre III du livre IV, il est ajouté un article L. 430‑1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 4301 A. – L’étranger entré de façon irrégulière sur le territoire français ne peut pas solliciter la délivrance d’un titre de séjour » ;

2° Au début du titre II du livre V, il est ajouté un article L. 520‑1 A ainsi rédigé :

« Art. L. 5201 A. – L’étranger entré de façon irrégulière sur le territoire français ne peut pas bénéficier des dispositions du présent livre. » ;

3° L’article L. 531‑4 est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Aucune demande ne pourra être instruite si le demandeur est entré de façon irrégulière sur le territoire national. »