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N° 1261 rectifié

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 mai 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer le contrôle des déclarations de minorité
des étrangers,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Alexandra MASSON, Franck ALLISIO, Bénédicte AUZANOT, Philippe BALLARD, Christophe BARTHÈS, Romain BAUBRY, José BEAURAIN, Pierrick BERTELOOT, Bruno BILDE, Emmanuel BLAIRY, Sophie BLANC, Frédéric BOCCALETTI, Pascale BORDES, Jorys BOVET, Jérôme BUISSON, Frédéric CABROLIER, Victor CATTEAU, Sébastien CHENU, Roger CHUDEAU, Caroline COLOMBIER, Annick COUSIN, Nathalie Da CONCEICAO CARVALHO, Grégoire de FOURNAS, Hervé de LÉPINAU, Jocelyn DESSIGNY, Edwige DIAZ, Sandrine DOGOR-SUCH, Nicolas DRAGON, Nicolas DUPONT AIGNAN, Frédéric FALCON, Thibaut FRANÇOIS, Thierry FRAPPÉ, Stéphanie GALZY, Frank GILETTI, José GONZALEZ, Florence GOULET, Géraldine GRANGIER, Daniel GRENON, Michel GUINIOT, Jordan GUITTON, Marine HAMELET, Timothée HOUSSIN, Laurent JACOBELLI, Alexis JOLLY, Hélène LAPORTE, Laure LAVALETTE, Marine LE PEN, Julie LECHANTEUX, Gisèle LELOUIS, Katiana LEVAVASSEUR, Christine LOIR, Aurélien LOPEZ-LIGUORI, Marie-France LORHO, Philippe LOTTIAUX, Alexandre LOUBET, Matthieu MARCHIO, Michèle MARTINEZ, Bryan MASSON, Kévin MAUVIEUX, Nicolas MEIZONNET, Joëlle MÉLIN, Yaël MENACHE, Thomas MÉNAGÉ, Pierre MEURIN, Serge MULLER, Julien ODOUL, Mathilde PARIS, Caroline PARMENTIER, Kévin PFEFFER, Lisette POLLET, Stéphane RAMBAUD, Angélique RANC, Julien RANCOULE, Laurence ROBERT-DEHAULT, Béatrice ROULLAUD, Anaïs SABATINI, Alexandre SABATOU, Emeric SALMON, Philippe SCHRECK, Emmanuel TACHÉ de la PAGERIE, Jean-Philippe TANGUY, Michaël TAVERNE, Lionel TIVOLI, Antoine VILLEDIEU,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Les mineurs étrangers isolés qui franchissent nos frontières nationales, désormais appelés Mineurs non accompagnés (MNA) selon la terminologie européenne, sont de plus en plus nombreux. Ces MNA, ou évalués comme tels, sont pris en charge par les services de l’Aide sociale à l’enfance (ASE) des Conseils Départementaux. Leur nombre a considérablement a augmenté en étant multiplié par 20 en 20 ans. Il s’agit à 95 % de garçons dont la plupart proviennent d’Afrique subsaharienne (Mali, Guinée, Côte d’Ivoire) et du Maghreb (Algérie, Tunisie, Maroc). Ils étaient seulement 264 pris en charge dans le cadre de l’ASE en 1999, 1 077 en 2001, 10 194 fin 2015, pour atteindre 19 893 fin 2021 dont la moitié (9 846) ont 15 ans ou plus.

Ces « mineurs isolés » représentent un coût colossal pour l’ASE des Départements. La prise en charge des MNA est estimée annuellement en moyenne à 50 000 euros par mineur, couvrant notamment l’hébergement, la nourriture, les frais d’éducation et de formation. Pour certains départements, particulièrement touchés par la crise migratoire comme les Alpes‑Maritimes, le Nord et le Pas‑de‑Calais, mais aussi la Guyane et Mayotte, ce coût obère grandement leur budget et limite leurs actions dans d’autres domaines.

Le rapport d’information n° 854 du Sénat déposé le 29 septembre 2021, indique que les MNA sont souvent en recherche d’opportunités économiques plutôt qu’en fuite de pays en guerre. Le rapport estime que l’augmentation de la délinquance des MNA est un phénomène de plus en plus préoccupant, provoquant des infractions de plus en plus nombreuses, graves et violentes. Cette tendance, renforcée par la crise sanitaire de 2020 et 2021, tend à se propager sur l’ensemble du territoire. Les forces de l’ordre et les services du Ministère de la Justice font face à de multiples obstacles pour endiguer le phénomène. L’identification des jeunes mineurs étrangers interpellés complexifie la tâche des forces de l’ordre qui font face à un sentiment de découragement, alors que la Justice est incapable d’apporter une réponse pénale.

Les MNA délinquants ‑ qui représentent à peu près 10 % des mineurs isolés en France, selon la Direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) ‑ commettent principalement des vols sur la voie publique et dans les transports en commun, des vols par effraction et des vols avec violence. En avril 2023, plusieurs MNA ont été jugés pour des vols en réunion et des cambriolages en série à Montpellier, en association avec des majeurs délinquants.

En 2020, près de 80 % des déferrements de mineurs à Paris avaient concerné des MNA, soit près de 2 000 personnes. Ils étaient cette même année à l’origine de 30 % des cambriolages, de 44 % des vols à la tire et de 32 % des vols avec violence, selon les chiffres du parquet de Paris, repris dans le rapport d’information n° 3974 de l’Assemblée Nationale en date du 10 mars 2021.

Mais tous les individus qualifiés de MNA ne sont toutefois pas toujours véritablement mineurs. Certains majeurs étrangers dissimulent en effet leur âge véritable aux fins de bénéficier indument, outre d’une prise en charge par l’ASE, du régime de peine minorée applicable en matière de justice pénale des mineurs.

Dans sa contribution écrite aux travaux de la mission d’information de l’Assemblée Nationale précitée, la directrice de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne avait estimé qu’il « n’est pas exagéré d’imaginer qu’a minima la moitié des MNA qui se prétendent [âgés de 16 ou 17 ans] dans l’agglomération parisienne sont en réalité âgés d’au moins 18 ans et mentent sur leur âge, comme ils le font à propos de leur identité pour bénéficier de la clémence de la justice des mineurs ».

La législation actuelle favorise en effet le mensonge d’un grand nombre de ces migrants qui se prétendent mineurs sans l’être réellement, car il existe une présomption de minorité, c’est‑à‑dire qu’ils sont considérés mineurs sans qu’aucune preuve tangible ne soit à apporter pour le vérifier.

Aujourd’hui la seule technique fiable et disponible pour déterminer l’âge de ces personnes reste les tests osseux. Les examens consistent à radiographier de face la main et le poignet gauche et à examiner les points d’ossification des doigts et les cartilages de croissance.

La proposition de loi, dans son article 1er, vise à réformer le droit positif afin d’y inscrire la possibilité, pour l’administration, de recourir à de tels tests à l’égard des individus qui ne détiennent pas de document d’identité valable et dont la minorité alléguée ne paraît pas vraisemblable, et à leur appliquer, à défaut pour eux de s’y soumettre, une présomption de majorité.

Dans son article 2, elle tend à subordonner à la réalisation de ces tests osseux le bénéfice, pour la personne étrangère qui se prétend mineure, de l’ASE.

 


proposition de loi

Article 1er

L’article 388 du code civil est ainsi rédigé :

« Art. 388. – Le mineur est l’individu de l’un ou l’autre sexe qui n’a pas encore l’âge de dix‑huit ans accomplis.

« En l’absence de document d’identité valable et lorsque l’âge allégué d’un individu n’est pas vraisemblable, il peut être procédé d’office, sur décision de l’administration, à un examen radiologique osseux aux fins de détermination de cet âge.

« Tout refus de cet examen entraîne une présomption de majorité.

« Les conclusions de ces examens doivent préciser la marge d’erreur. Le doute profite à l’intéressé. »

Article 2

L’article L. 222‑5 du code de l’action sociale et des familles est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Un mineur qui n’a pas la nationalité française ne peut être pris en charge dans les conditions prévues au présent article s’il n’a pas été procédé à la vérification préalable de la réalité de son état de minorité dans les conditions déterminées par l’article 388 du code civil. »

Article 3

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à la taxe mentionnée à l’article 235 ter ZD du code général des impôts.