1

Description : LOGO

N° 1369

_____

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 15 juin 2023.

PROPOSITION DE LOI

portant amélioration de l’information et durcissement des sanctions concernant une lutte durable et efficace contre le harcèlement scolaire,

(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.),

présentée par

M. Sébastien CHENU
et les membres du groupe Rassemblement national et apparentés (1),

députés.

 

______________

(1) Mesdames et Messieurs : Franck Allisio, Bénédicte Auzanot, Philippe Ballard, Christophe Barthès, Romain Baubry, José Beaurain, Christophe Bentz, Pierrick Berteloot, Bruno Bilde, Emmanuel Blairy, Sophie Blanc, Frédéric Boccaletti, Pascale Bordes, Jorys Bovet, Jérôme Buisson, Frédéric Cabrolier, Victor Catteau, Sébastien Chenu, Roger Chudeau, Caroline Colombier, Annick Cousin, Nathalie Da Conceicao Carvalho, Grégoire de Fournas, Hervé de Lépinau, Jocelyn Dessigny, Edwige Diaz, Sandrine Dogor‑Such, Nicolas Dragon, Christine Engrand, Frédéric Falcon, Thibaut François, Thierry Frappé, Stéphanie Galzy, Frank Giletti, Yoann Gillet, Christian Girard, José Gonzalez, Florence Goulet, Géraldine Grangier, Daniel Grenon, Michel Guiniot, Jordan Guitton, Marine Hamelet, Joris Hébrard, Timothée Houssin, Laurent Jacobelli, Alexis Jolly, Hélène Laporte, Laure Lavalette, Marine Le Pen, Julie Lechanteux, Gisèle Lelouis, Katiana Levavasseur, Christine Loir, Aurélien Lopez‑Liguori, Marie‑France Lorho, Philippe Lottiaux, Alexandre Loubet, Matthieu Marchio, Michèle Martinez, Alexandra Masson, Bryan Masson, Kévin Mauvieux, Nicolas Meizonnet, Joëlle Mélin, Yaël Ménache, Thomas Ménagé, Pierre Meurin, Serge Muller, Julien Odoul, Mathilde Paris, Caroline Parmentier, Kévin Pfeffer, Lisette Pollet, Stéphane Rambaud, Angélique Ranc, Julien Rancoule, Laurence Robert‑Dehault, Béatrice Roullaud, Anaïs Sabatini, Alexandre Sabatou, Emeric Salmon, Philippe Schreck, Emmanuel Taché de la Pagerie, Jean‑Philippe Tanguy, Michaël Taverne, Lionel Tivoli, Antoine Villedieu.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Ce vendredi 12 mai 2023 à Vendin‑le‑Vieil dans le Nord, une jeune fille de 13 ans s’est suicidée chez elle. Derrière ce drame épouvantable se cache une réalité bien trop ignorée, celle du harcèlement scolaire. Cette jeune fille avait pourtant informé le proviseur et le CPE de son établissement scolaire.

Pourtant, aucune sanction à l’encontre des auteurs de harcèlement n’a été prononcée tandis que ces mêmes harceleurs continuent de publier des vidéos sur la plateforme Tik Tok. Pendant des semaines, Lindsay a subi le harcèlement de ses camarades de classe dans un silence total et dans une inaction des plus scandaleuses. Malheureusement Lindsay n’est pas un cas isolé, et sa mort tragique vient s’ajouter à une liste trop grande d’élèves s’étant donné la mort après un calvaire que les établissements ne voulaient pas entendre.

Dans l’attente des décisions de justice, le législateur est aujourd’hui appelé à prendre part au débat et à la réforme concernant la lutte contre le harcèlement scolaire.

Nous partons d’abord d’un constat effroyable. En 2021, une étude de l’Ifop montrait que 41 % des Français indiquaient avoir subi au moins un acte de violence verbale, physique ou psychologique dans le contexte scolaire. Pour 54 %, le harcèlement s’est déroulé lorsqu’ils étaient au collège. Un rapport du Sénat de septembre 2021 soulignait que 800 000 à 1 000 000 d’enfants seraient victimes chaque année de harcèlement. Le cyberharcèlement est d’ailleurs préoccupant, avec 25 % des collégiens disant avoir déjà connu une atteinte via les nouvelles technologies. Le Gouvernement actuel ne prend pas assez à cœur le problème du harcèlement qui nuit terriblement au bien être des élèves et affecte les conditions de travail de ceux‑ci.

Les violences découlant du harcèlement peuvent conduire à l’anéantissement de la confiance des élèves en eux‑mêmes, à un décrochage scolaire et parfois même à de la phobie scolaire, soit un véritable traumatisme qui n’a pas sa place au sein des établissements scolaires, « ce berceau de notre République », nous rappelait Lionel Jospin.

Nous devons par conséquent viser un objectif double :

– Le renforcement de la lutte contre le harcèlement scolaire via la responsabilisation de tous et de toutes, dans une gamme de mesures pour une information plus claire au sein des règlements scolaires sur la caractérisation du harcèlement scolaire et les sanctions, accompagnée d’un durcissement des sanctions et d’une meilleure compréhension des effets dissuasifs au harcèlement scolaire. Cet objectif exigera un meilleur état de lieu de ces questions ;

– Une contrepartie économique à cette responsabilisation, c’est‑à‑dire une revalorisation des emplois du professorat dans le primaire et le secondaire.

Cette proposition de loi entend donc combattre le harcèlement scolaire avec plus de fermeté. Tout d’abord, il s’agit d’inscrire dans le règlement intérieur des établissements le caractère criminel et délictuel du harcèlement ainsi que les sanctions encourues (article 1er), dans une mesure préventive et informative. Il convient par‑là de préciser les modalités de signalement en cas de harcèlement scolaire conduisant à une responsabilisation des acteurs (élèves, directeurs, rectorats, victimes…). La clarification des sanctions encourues devrait responsabiliser et inciter par exemple les professeurs à signaler tout comportement suspect.

L’article 2 demande au gouvernement un rapport sur l’évolution de la loi concernant le harcèlement scolaire ainsi que les moyens à mobiliser quant à informer les agents des établissements scolaires sur les moyens de reconnaissance, les droits et les devoirs de signalement, et enfin les procédures. Le rapport devra également traiter des difficultés ralentissant ou empêchant les signalements des cas de harcèlement scolaires. Enfin, un volet sera consacré à l’étude de la non‑application, de l’inadéquation ou de la légèreté de sanctions prises contre les personnes accusées de harcèlement scolaire. Cet article se traduit par le besoin de faire la lumière sur l’état juridique, psychologique et socio‑économique du harcèlement scolaire ainsi que la position de l’ensemble des acteurs et leurs propositions pour l’amélioration de la lutte contre le harcèlement scolaire et de l’application des peines qui lui sont associées. Il s’agira par la suite de mettre en place un ensemble de mesures de prévention et d’amélioration des dispositifs en place.

Dans l’article 3, est rendu systématique le renvoi du coupable et l’injonction d’éloignement de la personne condamnée après une décision de justice pour harcèlement scolaire. Désormais, l’harceleur sera contraint de changer d’établissement et la victime ne sera plus amenée à changer grâce à des mesures d’éloignement.

Enfin, l’article 4 comprend la nécessité de compenser cette responsabilisation du professorat en entamant une réflexion autour de davantage de moyens alloués aux établissements, ce qui devrait permettre une désincitation de la pratique du harcèlement scolaire. En somme, est demandé un nouveau rapport sur la valorisation du professorat et les moyens de durcissement de la lutte contre le harcèlement scolaire.


proposition de loi

Article 1er

Après l’article L. 401‑2‑1 du code de l’éducation, il est inséré un article L. 401‑2‑2 ainsi rédigé :

« Art. L. 40122. – Le règlement intérieur rappelle le caractère criminel et délictuel du harcèlement scolaire ainsi que les sanctions qui lui sont relatives, tels qu’ils sont définis à l’article 222‑33‑2‑3 du code pénal. Il précise les modalités de signalement par la victime, un étudiant ou un professionnel travaillant au sein de l’établissement aux responsables de l’établissement ainsi que les procédures à enclencher par ces derniers.

« Ces modalités sont fixées par décret en Conseil d’État. »

Article 2

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, les ministères de la Justice et de l’Éducation nationale remettent au Parlement un rapport sur l’état des lieux et l’évolution de la loi concernant le harcèlement scolaire ainsi que les moyens à mobiliser afin d’informer les agents des établissements scolaires sur les moyens de reconnaissance, les droits et les devoirs de signalement, et enfin les procédures. Le rapport doit également traiter des difficultés ralentissant ou empêchant le signalement des cas de harcèlement scolaires. Enfin, un volet est consacré à l’étude de la non‑application, de l’inadéquation ou de la légèreté des sanctions prises contre les personnes accusées de harcèlement scolaire comme définies à l’article 222‑33‑2‑3 du code pénal, notamment considérées au prisme de la désincitation à la pratique du harcèlement.

Article 3

I. – Après le quatrième alinéa de l’article 222‑33‑2‑3 du code pénal, il est inséré un article 222‑33‑2‑3 ainsi rédigé :

« Art. 2223323. – Toutes les peines susmentionnées s’accompagnent d’une mesure d’éloignement comprenant l’interdiction de contact entre la victime et la personne ayant commis le harcèlement scolaire. »

II. – Au 7° de l’article 41‑1 du code de procédure pénale, après le mot : « mois , » sont insérés les mots : « ou définitivement dans le cas de harcèlement ».

Article 4

Dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur les moyens à mobiliser afin d’augmenter les salaires du professorat, de renforcer les moyens de la lutte contre le harcèlement scolaire et d’améliorer le bien‑être collectif des environnements scolaires face à une dégradation liée à l’émergence de violences et d’intimidations, dont un volet de ce rapport fera état.