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N° 1420

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juin 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à créer les conditions d’un choc de l’offre de logement en France,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Sabrina AGRESTIROUBACHE, Nicolas METZDORF, Karl OLIVE, Prisca THEVENOT, Jean TERLIER, Pierre HENRIET, Fanta BERETE, Dominique DA SILVA, Mohamed LAQHILA, Émilie CHANDLER, Lysiane MÉTAYER,

députés.

 


1

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La présente proposition de loi vise à modifier le code de l’urbanisme afin de permettre à l’État de reprendre la main sur l’attribution des permis de construire dans les secteurs géographiques dans lesquels il existe une tension très forte et persistante en matière d’offre de logements.

De nombreux territoires urbains en France sont à cet égard fragiles. À Marseille par exemple, cela se traduit par une vulnérabilité́ financière considérable des ménages, une dégradation marquée du parc immobilier et une déqualification des copropriétés inégalables à hauteur de 62 %, soit 20 fois plus importantes qu’à Bordeaux et 10 fois plus importantes qu’à Lyon ou Nice. La situation du logement à Marseille est plus critique que jamais.

Ce projet de loi cherche à apporter une réponse concrète au problème du logement en France, notamment social. Les bailleurs et constructeurs sociaux n’obtiennent pas les permis de construire suffisamment rapidement, malgré la conformité des projets concernés au plan local d’urbanisme, ce qui bloque les investissements et les projets de construction.

La construction de logements supplémentaires permettra d’élargir le parc immobilier, de renforcer l’offre de logements pour l’ensemble de la population dans les métropoles en difficultés. Ce faisant, la présente proposition de loi renforcera l’accession à la propriété privée, notamment pour les classes moyennes.

En effet, le rapport de la commission présidée par François Rebsamen, publié à l’automne 2021, s’alarme de la chute de la construction. La France est ainsi passée, en début de quinquennat, de 437 000 mises en chantier en 2017 avant de chuter à 350 000 en 2020. L’une des causes identifiées de cette situation est l’insuffisance des services municipaux. Ceux‑ci éprouvent souvent de grandes difficultés dans l’attribution des permis de construire, alors même que de nombreux travaux sont à prévoir pour réhabiliter les logements insalubres. Cela met en péril les habitants des métropoles avec des niveaux d’urgence différents.

Depuis la loi du 24 mars 2014, dite ALUR, l’article L. 302‑9‑1 du code de la construction et de l’habitation dispose que l’arrêté de carence peut prévoir les secteurs dans lesquels le préfet est compétent pour délivrer les autorisations d’utilisation et d’occupation du sol pour des constructions à usage de logements. Cette disposition a permis d’accompagner le transfert de la compétence en matière de préemption, rendu possible par l’arrêté de carence.

La présente proposition de loi prévoit de franchir un nouveau cap dans le renforcement de ses capacités d’action en particulier dans la production de logement. Son article unique prévoit à la suite des dérogations au principe fixé à l’article L. 422‑1 du code de l’urbanisme qui confie cette compétence à la commune, que l’autorité administrative compétente de l’État est compétente pour délivrer l’autorisation de construire dans les communes de très grande taille, caractérisées à la fois par un déficit de longue date en matière de construction de logements locatifs sociaux, par un taux élevé de copropriétés en difficulté et par une proportion élevée d’habitats indignes. Ce transfert aux services de l’État de l’instruction et de la décision en la matière vise à créer les conditions d’un « choc de l’offre » de logements en France.

Enfin, l’impact de cette proposition de loi sur la libre administration des collectivités locales est limité à un double égard, dans la mesure où seuls les permis de construire ayant pour objet d’autoriser certaines constructions sont concernés par la réattribution de compétence.

D’une part, la compétence de l’État, dans l’hypothèse considérée par la présente proposition de loi, ne recouvrirait pas tout le champ des autorisations d’urbanisme. Effectivement, le code de l’urbanisme distingue entre plusieurs types d’autorisations, qu’il s’agisse du permis de construire, du permis d’aménager, du permis de démolir, ou de la déclaration préalable. Il s’ensuit que ce n’est pas la totalité des travaux appréhendés, depuis le 1er octobre 2007, par le nouveau régime des autorisations, qui serait concernée. Seuls les travaux de réalisation de constructions nouvelles et de rénovation des constructions existantes sont visés. C’est dire que les travaux de démolition, d’aménagement, quelle que soit leur importance, continueraient à tous relever, sans exception, de la compétence communale.

D’autre part, l’objectif d’accélération de la fabrication de logements justifie la limitation de l’attribution de compétence à l’État aux seules opérations de construction ayant ce but. Il s’ensuit que la compétence communale perdure pour les autres types de constructions ou d’installations

 


proposition de loi

Article 1er

Après le d de l’article L. 422‑2 du code de l’urbanisme, il est inséré un d bis ainsi rédigé :

« d) bis Les travaux de constructions ou de rénovation de logements concernés par une servitude de mixité sociale ou de plus de 30 logements et de plus de 3 000 m2 de surface de plancher situés dans les communes qui répondent à l’ensemble des critères :

« – compter une population de plus de 200 000 habitants et être située au sein d’une zone d’urbanisation continue de plus de 300 000 habitants où il existe un déséquilibre marqué entre l’offre et la demande de logements au sens de l’article 17 de la loi n° 89‑462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86‑1290 du 23 décembre 1986 ;

« – être déficitaire en logements locatifs sociaux dans les conditions prévues au I de l’article L. 302‑5 du code de la construction et de l’habitation depuis au moins cinq périodes triennales mentionnées au II du même article ;

« – connaître un taux de copropriétés connaissant des difficultés de paiement au sens de l’article 29‑1 A de la loi n° 65‑557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis par rapport aux résidences principales supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d’État ;

« – connaître un taux d’habitat indigne au sens de l’article 1‑1 de la loi n° 90‑449 du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement par rapport aux résidences principales supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d’État ;

« – connaître un taux annuel de mise en chantier de logements rapportés au nombre de résidences principales inférieur à 1 % sur trente‑six mois glissants ;

« La liste des communes concernées par le présent d bis est arrêtée par le ministre en charge de l’urbanisme. »

Article 2

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.