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N° 1599

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 20 juillet 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à supprimer le recours systématique à l’atténuation de responsabilité pour les mineurs,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale
de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale
dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par Mesdames et Messieurs

Sébastien CHENU et l’ensemble des députés du groupe Rassemblement national (1),

députés.

 

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(1) Mesdames et messieurs : Franck Allisio, Bénédicte Auzanot, Philippe Ballard, Christophe Barthès, Romain Baubry, José Beaurain, Christophe Bentz, Pierrick Berteloot, Bruno Bilde, Emmanuel Blairy, Sophie Blanc, Frédéric Boccaletti, Pascale Bordes, Jorys Bovet, Jérôme Buisson, Frédéric Cabrolier, Victor Catteau, Sébastien Chenu, Roger Chudeau, Caroline Colombier, Annick Cousin, Nathalie Da Conceicao Carvalho, Grégoire de Fournas, Hervé de Lépinau, Jocelyn Dessigny, Edwige Diaz, Sandrine DogorSuch, Nicolas Dragon, Christine Engrand, Frédéric Falcon, Thibaut François, Thierry Frappé, Stéphanie Galzy, Frank Giletti, Yoann Gillet, Christian Girard, José Gonzalez, Florence Goulet, Géraldine Grangier, Daniel Grenon, Michel Guiniot, Jordan Guitton, Marine Hamelet, Timothée Houssin, Laurent Jacobelli, Catherine Jaouen, Alexis Jolly, Hélène Laporte, Laure Lavalette, Julie Lechanteux, Gisèle Lelouis, Marine Le Pen, Katiana Levavasseur, Christine Loir, Aurélien LopezLiguori, MarieFrance Lorho, Philippe Lottiaux, Alexandre Loubet, Matthieu Marchio, Michèle Martinez, Alexandra Masson, Bryan Masson, Kévin Mauvieux, Nicolas Meizonnet, Joëlle Mélin, Yaël Menache, Thomas Ménagé, Pierre Meurin, Serge Muller, Julien Odoul, Mathilde Paris, Caroline Parmentier, Kévin Pfeffer, Lisette Pollet, Stéphane Rambaud, Angélique Ranc, Julien Rancoule, Laurence RobertDehault, Béatrice Roullaud, Anaïs Sabatini, Alexandre Sabatou, Emeric Salmon, Philippe Schreck, Emmanuel Taché de La Pagerie, JeanPhilippe Tanguy, Michaël Taverne, Antoine Villedieu,

 

 

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Durant les dernières nuits d’émeutes, 522 policiers et gendarmes ont été blessés par les insurgés. C’est plus du double en comparaison aux émeutes de 2005. Outre l’accroissement considérable de la violence à l’égard des forces de l’ordre, l’âge de ces émeutiers choque. En effet, la moyenne d’âge fluctue autour de 17 ans avec parfois des jeunes de 14 ans. Une majorité conséquente de ces insurgés interpellés sont donc mineurs.

Face à ce constat dramatique, force est de reconnaître que le droit ne permet pas actuellement de dissuader ces mineurs de tout acte délictuel ou criminel. Cette impunité dont bénéficie les mineurs est en partie causée par l’excuse de minorité. Définie par l’article 122‑8 du code pénal, l’excuse de minorité atténue la responsabilité pour les mineurs capables de discernement en raison de leur âge. A cet article s’ajoutent les articles 121‑5 et 121‑6 du code de la justice pénale des mineurs. Ces articles disposent que les juridictions compétentes « ne peuvent prononcer une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine encourue », de même qu’ils fixent un plafond à l’amende encourue. Même si l’excuse de minorité peut être levée entre 16 et 18 ans, cette décision reste exceptionnelle et marginale.

Le législateur se doit de constater que l’ordonnance du 2 février 1945 fut prise dans un contexte différent où les mineurs provenaient d’un contexte social différent. Le principe actuel d’atténuation de responsabilité posé par cette ordonnance n’est plus adapté pour faire face aux enjeux sécuritaires du XXIème siècle. 

D’après un sondage CSA Cnews du 2 juillet 2023, 69 % des Français se prononcent en faveur d’une suspension de l’excuse de minorité. Si le contexte des révoltes dans les banlieues joue un poids non négligeable, c’est plus généralement la lassitude et la colère des Français face à la hausse de la délinquance juvénile qui marque ce constat. En 2019, plus de 66 000 délinquants de moins de 15 ans ont été impliqués dans des affaire traités par les parquets pour vols, agressions ou atteintes sexuelles. La prolifération de la délinquance juvénile empoisonne la vie quotidienne des Français et conduit à des débordements d’ampleur séditieuse ; les dernières émeutes peuvent en témoigner.

La mise en cause d’un individu mineur ne devrait pas systématiquement servir d’excuse pour atténuer une peine. Les mineurs participant au vandalisme et dégradations demeurent conscients de la gravité de leurs actes. Toutefois, la clémence que leur offre l’excuse de minorité les encourage à poursuivre leurs méfaits, sachant pertinemment que la justice se montrera indulgente à leur égard. Ces mineurs délinquants brandissent même leur minorité pour se soustraire de toute responsabilité et bénéficier de peines plus légères.

Par conséquent, cette proposition de loi vise à lever l’excuse de minorité pour les mineurs capables de discernement et âgés de 13 ans ou plus. Elle ne cherche pas à méconnaître le discernement moindre lié à l’âge, mais davantage à assurer la justice.

Son article unique modifie le code de la justice pénal des mineurs de façon à supprimer l’excuse de minorité. L’article dispose que les mineurs âgés de 13 à 16 ans encourront désormais les mêmes peines que les majeurs. Il propose de supprimer les articles associés issus du code de justice pénale des mineurs sur l’application des peines en cas d’atténuation de la responsabilité (Art. 121‑5 et 121‑6). Parallèlement, il propose une nouvelle rédaction de l’article 121‑4 de ce même code, dans un double objectif de confiscation systématique des objets ayant servi à commettre l’infraction et de pédagogie civique, puisque le juge aura la possibilité de prononcer des peines complémentaires de stage, ainsi que de travail d’intérêt général en plus selon la gravité des faits. Cette modification se place dans un contexte d’inefficacité des peines de stages. Chacun sait qu’une sanction doit être pénible pour celui à qui elle est infligée. Dès lors, si des mesures éducatives sont indispensables pour les mineurs délinquants, elles n’ont d’efficacité que si elles sont couplées à une peine, a minima une amende. Il est donc primordial que les dispositions soient prises à la fois à l’encontre et dans l’intérêt du mineur - une peine et une mesure éducative. Enfin, cette proposition de loi souhaite faire de l’atténuation de responsabilité non pas un objet du passé, mais un principe spécial, car c’est son caractère actuel systématique qui la rend de facto caduque et ineffective. Elle propose donc pour les mineurs de seize ans ou moins que les juges puissent recourir dans une décision spéciale fondée à une atténuation de la responsabilité. Si cette loi entend en effet ne pas laisser impunis les délinquants juvéniles et faire appliquer les peines proportionnées, elle ne méconnaît pas non plus les cas isolés qui ne méritent pas de souffrir à tort de la sévérité que la justice prévoit contre les délinquants.


proposition de loi

Article unique

Le code de la justice pénale des mineurs est ainsi modifié :

1° L’article L. 11‑5 est ainsi rédigé :

« Art. L. 115. – Les mineurs, à partir de treize ans et jusqu’à seize ans, encourent les mêmes peines que les majeurs sous réserve des dispositions prévues à l’article L. 121‑7. »

2° L’article L. 121‑4 est ainsi rédigé :

« Art. L. 1214. – Le juge des enfants, statuant en chambre du conseil, peut, sur réquisitions du procureur de la République, condamner un mineur âgé d’au moins treize ans à des peines complémentaires, en plus de celles prévues pour le crime ou délit pour lequel le mineur a été condamné :

« 1° La confiscation systématique de l’objet ayant servi à commettre l’infraction ;

« 2° Une peine systématique sous forme de stage, accompagnée d’une peine de travail d’intérêt général en tenant compte de la gravité de l’espèce. »

3° Les articles L. 121‑5 et L. 121‑6 sont supprimés ;

4° L’article L. 121‑7 est ainsi rédigé :

« Art. L. 1217. – Pour les mineurs de treize à seize ans, le tribunal de police, le tribunal pour enfants et la cour d’assises des mineurs peuvent, à titre exceptionnel et compte tenu des circonstances de l’espèce caractérisées par une faible gravité des faits en cause et par la personnalité et la situation du mineur, décider qu’il y a lieu de diminuer de moitié la peine privative de liberté ou la peine d’amende encourue dans la limite de 7 500 euros.

« La diminution de moitié de la peine encourue s’applique également aux peines minimales prévues par l’article 132‑18 du code pénal. 

« Si la peine encourue est la réclusion criminelle ou la détention criminelle à perpétuité, elle ne peut être supérieure à dix ans de réclusion criminelle ou de détention criminelle. 

« Les dispositions de l’article 132‑23 du code pénal relatives à la période de sûreté ne sont pas applicables aux mineurs.

« Cette décision ne peut être prise que par une disposition spécialement motivée. »