N° 1878

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 21 novembre 2023.

PROPOSITION DE LOI

visant à faciliter le débroussaillement en zones à risque (zone rouge et zone B1A),

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

Mme Christelle D’INTORNI,

députée.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

L’été 2020 a été douloureusement marqué par des incendies historiques qui ont ravagé des milliers d’hectares de forêt dans nos territoires. L’absence de pluie conjuguée à une forte chaleur avait touché la quasi‑totalité de notre pays, rendant la végétation particulièrement inflammable.

Depuis, le 22 août 2021, le législateur adoptait une loi renforçant les obligations de débroussaillement dans nos communes afin de prévenir des risques d’incendies. Effectivement, la pratique du débroussaillement permet très concrètement de limiter les départs de feux, freiner leur propagation et diminuer leur intensité.

De plus, le débroussaillement permet également de protéger considérablement les habitations afin que les habitants puissent se confiner durant l’extinction des feux et éviter, par conséquent, les risques liés à la fuite des administrés susceptibles de causer de nombreux décès face à un feu d’ampleur.

Par ailleurs, le débroussaillement permet une intervention opérationnelle plus efficace et aisée des brigades de sapeurs‑pompiers et des secours.

À ce titre, les dispositions de l’article L. 131‑10 du code forestier établissent des obligations légales de débroussaillement (OLD) qui s’imposent tant aux propriétaires de constructions ou chantiers qu’aux propriétaires gestionnaires d’infrastructures.

Toutefois, en dépit de leur rôle préventif fondamental, force est de constater que ces dispositions législatives ne sont que très partiellement appliquées. Si bien que seulement 30 % de taux de réalisation des obligations légales de débroussaillement sont respectés. Et pour cause. Ces obligations qui incombent aux administrés d’une commune aboutissent à des situations dénuées de bon sens et laissant les élus locaux désœuvrés.

En premier lieu, les terrains concernés sont très souvent techniquement inaccessibles ou tout simplement abandonnés.

Or, en la matière, la règlementation s’applique de manière uniforme eu égard à la topographie des parcelles.

De plus, un vide juridique existe quant aux biens laissés à l’abandon par leur propriétaire. D’autant que cette obligation ne peut être réalisée convenablement qu’avec l’accord du propriétaire du terrain afférent ce qui pose de nombreuses difficultés juridiques et humaines.

En second lieu, la commune demeure seule à devoir traiter ce type de problématique tant financièrement, même si la région, notamment la région Provence‑Alpes‑Côte‑d’Azur, abonde dans le cadre de l’attribution des études, que d’un point de vue de la faisabilité technique et juridique de ces obligations légales de débroussaillement.

Au surplus, l’Office Nationale des Forêts (ONF) peut prendre plusieurs années pour transmettre aux communes qui en ont fait la demande, leur plan communal de gestion des OLD alors que des entreprises spécialisées pourraient établir un tel plan plus promptement.

Au fond, l’ensemble des études académiques et travaux parlementaires jugent indispensable de faire davantage respecter cette obligation en facilitant son application dans nos communes.

Pour tout ce qui précède, la présente proposition de loi vise donc à faciliter le débroussaillement en zones à risque (zone rouge et zones B1A) tel que celui‑ci est énoncé dans les plans de prévention des risques d’incendie de forêts.

L’article 1er prévoit, par principe, la suppression de l’obligation légale de débroussaillement dans les propriétés voisines.

Toutefois, l’article 2 établit la possibilité de procéder au débroussaillement sur un terrain voisin, à raison d’une distance maximum de 100 mètres, au frais du propriétaire de celui‑ci.

À cette fin, il revient au représentant de l’État dans le Département de procéder d’abord à la mise en demeure du propriétaire du terrain concerné. De plus, une commission composée du représentant de l’État dans le département, du Président du Service Départemental d’Incendie et de Secours et le Maire doit décider à l’unanimité de l’intervention sur le terrain.

En outre, l’article trois a vocation, à l’initiative du Maire, de prononcer une exception à l’obligation légale de débroussaillement en zone classée « rouge » lorsque les terrains concernés demeurent inaccessibles.

Enfin, l’article quatre permet de créer un crédit d’impôt au titre du débroussaillement réalisé par un particulier sur un terrain voisin dans le cadre de l’obligation légale de débroussaillement.

 


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proposition de loi

Article 1er

L’article L. 131‑11 du code forestier est ainsi modifié :

1° Après le mot : « office », la fin du premier alinéa est ainsi rédigée : « pour les propriétaires d’habitations, constructions, chantiers et installations de toute nature leur appartenant. Ces obligations légales de débroussaillement s’appliquent, par principe, uniquement sur les terrains du propriétaire concerné et conformément au plan communal de débroussaillement. » ;

2° Le second alinéa est supprimé.

Article 2

Après l’article L. 131‑11 du code forestier, il est inséré un article L. 131‑11‑1 ainsi rédigé :

« Art. L. 131111. – Dans les zones mentionnées à l’article L. 131‑11, une commission rassemblant le représentant de l’État dans le département, le président du service départemental d’incendie et de secours et le maire peut décider, à l’unanimité, qu’il doit être pourvu au débroussaillement d’un terrain par un propriétaire ou occupant voisin jusqu’à une distance maximum de 100 mètres des constructions, chantiers et installations de toute nature appartenant à ce dernier. 

« Le cas échéant, il revient, en premier lieu, au représentant de l’État dans le département de procéder à une mise en demeure du propriétaire du terrain visé de débroussailler sous quinze jours à compter de la notification.

« Si le propriétaire n’exécute pas cette injonction dans ce délai, il est pourvu au débroussaillement d’office aux frais dudit propriétaire.

« Dans ce cadre, et lorsque la nature de la fréquentation ou de l’occupation d’une habitation justifie des précautions particulières pour la protection des vies humaines, la commission mentionnée au premier alinéa peut rendre obligatoire le débroussaillement du terrain concerné, par un voisin, dans la limite d’une distance de 100 mètres de ce dernier et, le cas échéant, y pourvoir d’office aux frais du propriétaire de cette habitation. »

Article 3

Après l’article L. 131‑11‑1 du code forestier, tel qu’il résulte de l’article 2 de la présente loi, il est inséré un article L. 131‑11‑2 ainsi rédigé :

« Art. L. 131112. – La commission mentionnée au premier alinéa de l’article L. 131‑11‑1 peut, sur proposition du représentant de la commune, prononcer une dérogation aux obligations de débroussaillement d’un terrain situé en zones à risque (zone rouge et zones B1A) lorsque celui‑ci demeure techniquement inaccessible et ne représente pas un caractère de danger imminent. »

Article 4

I. – La section II du chapitre IV du titre premier de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complétée par un L ainsi rédigé :

« L. – Crédit d’impôt pour le débroussaillement réalisé sur un terrain voisin

« Art. 244 quater Z. – Les particuliers qui justifient d’un débroussaillement réalisé par leur soin sur un terrain voisin, suite à la mise en demeure du représentant de l’État dans le département, peuvent bénéficier d’un crédit d’impôt.

« Ce crédit d’impôt est égal à 100 % des dépenses supportées au titre du débroussaillement. »

II. – Le I n’est applicable qu’aux sommes venant en déduction de l’impôt dû.

Article 5

I. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services

II. – La charge pour les collectivités territoriales est compensée à due concurrence par la majoration de la dotation globale de fonctionnement et, corrélativement pour l’État, par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services