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N° 2180

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 février 2024.

PROPOSITION DE LOI

visant à permettre à titre expérimental la fixation par arrêté préfectoral du prix de vente maximum des produits pétroliers en Corse,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Franck ALLISIO, M. Philippe BALLARD, M. Christophe BARTHÈS, M. José BEAURAIN, M. Pierrick BERTELOOT, M. Emmanuel BLAIRY, M. Frédéric BOCCALETTI, Mme Pascale BORDES, M. Jérôme BUISSON, M. Frédéric CABROLIER, M. Victor CATTEAU, M. Sébastien CHENU, M. Roger CHUDEAU, Mme Annick COUSIN, Mme Edwige DIAZ, Mme Sandrine DOGOR-SUCH, M. Nicolas DRAGON, M. Frédéric FALCON, M. Grégoire DE FOURNAS, M. Thierry FRAPPÉ, Mme Stéphanie GALZY, M. Frank GILETTI, M. José GONZALEZ, Mme Florence GOULET, Mme Géraldine GRANGIER, M. Daniel GRENON, M. Michel GUINIOT, M. Laurent JACOBELLI, Mme Catherine JAOUEN, Mme Julie LECHANTEUX, Mme Gisèle LELOUIS, M. Hervé DE LÉPINAU, Mme Katiana LEVAVASSEUR, Mme Christine LOIR, M. Aurélien LOPEZ-LIGUORI, Mme Marie-France LORHO, M. Philippe LOTTIAUX, M. Alexandre LOUBET, M. Matthieu MARCHIO, Mme Michèle MARTINEZ, Mme Alexandra MASSON, M. Bryan MASSON, M. Kévin MAUVIEUX, M. Nicolas MEIZONNET, Mme Joëlle MÉLIN, M. Serge MULLER, M. Kévin PFEFFER, Mme Lisette POLLET, M. Stéphane RAMBAUD, Mme Angélique RANC, Mme Laurence ROBERT-DEHAULT, M. Emeric SALMON, M. Emmanuel TACHÉ DE LA PAGERIE, M. Michaël TAVERNE, M. Lionel TIVOLI, M. Antoine VILLEDIEU,

députés.

 


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Dans le contexte hyper‑inflationniste que traverse notre pays, l’explosion du coût de l’énergie est sans nul doute, avec l’augmentation des prix alimentaires, la principale source de difficultés pour une grande majorité de nos compatriotes. Ainsi, la flambée des prix des carburants rogne significativement le pouvoir d’achat des Français, sans que ceux‑ci puissent trouver de solutions alternatives, notamment dans les zones rurales et péri‑urbaines.

En Corse, cette situation est bien plus préoccupante encore. En effet, les chiffres fournis par l’Institut national de la statistique et des études économiques démontrent que 52 % des ménages corses utilisent leur voiture pour aller travailler – soit 4 points de plus que la moyenne nationale –, alors même que le taux de recours aux transports en commun est extrêmement faible (2 % seulement contre 13 % au niveau national). De plus, il est à noter qu’en Corse, le temps médian de trajet pour atteindre des équipements et services dits « supérieurs » (lycées, hypermarchés, médecins spécialistes…) est de 78 minutes, contre 33 minutes dans les bassins de vie ruraux de l’hexagone, et ce temps est de 30 minutes contre 14 minutes dans l’hexagone pour les services et équipements dits « intermédiaires » (supermarchés, collèges, laboratoires d’analyses médicales…). Cette dépendance forcée à la voiture, bien plus grande que dans l’hexagone, aggrave d’autant les difficultés liées au coût des carburants.

En outre, l’étude des prix des carburants en Corse démontre que ceux‑ci augmentent tendanciellement plus rapidement que dans le reste de la métropole, alors même qu’ils diminuent plus lentement. De plus, les coûts supplémentaires liés à l’insularité renchérissent ces prix, quand bien même la Corse bénéficie d’un taux de taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques plus bas, et d’un taux de TVA à 13 % sur ces produits.

En réalité, cette fiscalité avantageuse ne profite pas à nos concitoyens corses du fait de la situation de monopole qui existe sur l’acheminement et le stockage des carburants, et la situation d’oligopole qui existe s’agissant de la distribution. Cette distorsion évidente de concurrence, relevée par l’Autorité de la concurrence dans son avis n° 20‑A‑11 du 17 novembre 2020, a pour conséquence, de renchérir le coût des carburants qui sont aujourd’hui en moyenne 9 centimes plus chers que dans l’hexagone, alors même que compte tenu de la fiscalité avantageuse dont bénéficie la Corse, ceux‑ci devraient être 7 centimes moins chers toutes choses égales par ailleurs. Si des différences évidentes de coûts existent du fait de l’insularité, comme précisé précédemment, ceux‑ci ne peuvent raisonnablement pas être estimés à 16 centimes par litre.

Cette situation anormale de concurrence rend inefficace les mesures fiscales existantes, et puisque les caractéristiques de ce marché ne permettent pas de casser le monopole existant, l’État se doit de le limiter et de le contrôler efficacement.

Ainsi, en s’inspirant des mécanismes qui existent pour nos Outre‑mer, l’article unique de cette proposition de loi entend permettre au Préfet de Corse de fixer chaque trimestre, selon des conditions fixées par décret, les prix maximums de vente des produits pétroliers. Ces prix seront définis en tenant compte du prix moyen constaté dans l’hexagone au cours du trimestre précédent, mais aussi des coûts supportés par les entreprises. Le caractère expérimental de la mesure permettra d’en faire l’évaluation à la fin des trois ans, et de l’ajuster si nécessaire.

 


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proposition de loi

Article unique

Le titre Ier du livre IV du code de commerce est complété par un article L. 410-7 ainsi rédigé :

« Art. L. 410-7.  À titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter du 1er juillet 2024, en Corse et après consultation de l’Autorité de la concurrence, le représentant de l’État fixe chaque trimestre le prix maximum des produits pétroliers, dans des conditions fixées par décret. Ces prix sont calculés en fonction du prix moyen constaté au cours du trimestre précédent en métropole hors Corse, des coûts supportés par les entreprises et de la rémunération des capitaux, ou, le cas échant, de leur marge commerciale. »