TEXTE ADOPTÉ  98

« Petite loi »

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

28 mars 2023

 

 

 

proPOSITION DE LOI

 

visant à lutter contre le dumping social sur le transmanche,

 

 

 

 

ADOPTÉE PAR L’ASSEMBLÉE NATIONALE
EN premiÈre lecture

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

L’Assemblée nationale a adopté la proposition de loi dont la teneur suit :

 

 Voir les numéros : 798 et 1005.


1

Article 1er

Le livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par un titre IX ainsi rédigé :

« Titre IX

« Conditions sociales applicables
à certaines dessertes internationales

« Chapitre Ier

« Champ d’application

« Art. L. 55911.  Le présent titre est applicable aux navires transporteurs de passagers assurant des lignes régulières internationales touchant un port français. Ces lignes sont déterminées selon des critères d’exploitation, notamment la fréquence de touchée d’un port français par un navire, fixés par un décret en Conseil d’État pris après avis du Conseil supérieur de la marine marchande.

« Art. L. 55912. – Le présent titre s’applique aux contrats de travail des salariés mentionnés à l’article L. 5592‑1, quelle que soit la loi applicable à ces contrats.

« Chapitre II

« Droits des salariés

« Art. L. 55921. – Pour la détermination du salaire minimum horaire, les dispositions légales et les stipulations conventionnelles applicables aux salariés employés sur les navires mentionnés à l’article L. 5591‑1 sont celles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d’activité établies en France.

« Le premier alinéa du présent article s’applique également aux salariés mis à disposition par les services privés de recrutement et de placement de gens de mer mentionnés à l’article L. 5546‑1‑1.

« Le présent article ne s’applique que pour les périodes au cours desquelles les navires sont exploités sur les lignes régulières internationales mentionnées à l’article L. 5591‑1.

« Art. L. 55922 (nouveau).  Dans l’intérêt de la sécurité de la navigation et de la lutte contre les pollutions marines, l’organisation du travail applicable aux salariés employés sur les navires mentionnés à l’article L. 5591‑1 est fondée sur une durée de repos à terre au moins équivalente à la durée de leur embarquement.

« Un décret en Conseil d’État détermine la durée maximale de l’embarquement, en prenant en compte les critères d’exploitation des lignes concernées.

« Chapitre III

« Documents obligatoires

« Art. L. 55931. – La liste des documents qui sont tenus à la disposition des membres de l’équipage et affichés dans les locaux réservés à l’équipage ainsi que les langues dans lesquelles ces documents doivent être disponibles sont fixées par décret.

« Art. L. 55932. – La liste des documents qui sont tenus à la disposition des agents mentionnés à l’article L. 5595‑1 et dont ils peuvent prendre copie, quel que soit le support, est fixée par décret.

« Chapitre IV

« Sanctions pénales

« Art. L. 55941. – Lorsque le navire est dans les eaux intérieures ou dans une installation portuaire située en dehors de ces eaux, est puni d’une amende de 7 500 euros le fait pour l’employeur de verser un salaire minimum horaire inférieur à celui résultant de l’article L. 5592‑1. La même peine est applicable à l’armateur du navire à bord duquel est employé le salarié.

« La récidive est punie de six mois d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

« Les infractions donnent lieu à autant d’amendes qu’il y a de salariés concernés.

« À la troisième infraction constatée, une interdiction d’accoster dans un port français est prononcée à l’encontre des navires appartenant à la compagnie maritime en infraction. Un décret en Conseil d’État précise la durée de l’interdiction.

« Art. L. 5594-2 (nouveau).  Lorsque le navire est dans les eaux intérieures ou dans une installation portuaire située en dehors de ces eaux, est puni d’une amende de 7 500 euros le fait pour l’employeur de ne pas respecter les obligations en matière de durée de repos à terre résultant de l’article L. 55922. La même peine est applicable à l’armateur du navire à bord duquel est employé le salarié.

« La récidive est punie de six mois d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

« Les infractions donnent lieu à autant d’amendes qu’il y a de salariés concernés.

« Chapitre V

« Constatation des infractions

« Art. L. 55951. – Les infractions au présent titre sont constatées par :

«  Les officiers et les fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer ;

«  Les personnes mentionnées aux 2°, 3°, 8° et 10° de l’article L. 52221.

« Art. L. 55952. – Pour l’exercice des missions mentionnées à l’article L. 55951, les personnes mentionnées au même article L. 55951 sont habilitées à demander à l’employeur, à l’armateur ou à la personne faisant fonction ainsi qu’à toute personne employée à quelque titre que ce soit à bord d’un navire de justifier de son identité, de son adresse et, le cas échéant, de sa qualité de salarié à bord du navire.

« Chapitre VI

« Sanctions administratives
(Division nouvelle)

« Art. L. 55961 (nouveau).  Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi peut, sur le rapport des agents de contrôle de l’inspection du travail mentionnés à l’article L. 8112‑1 du code du travail, des officiers et des fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer et des personnes mentionnées aux 1° à 4°, 8° et 10° de l’article L. 5222‑1 du présent code, sous réserve de l’absence de poursuites pénales, prononcer à l’encontre de l’armateur une amende en cas de manquement :

«  Au versement du salaire minimum horaire prévu à l’article L. 55921 ;

« 2° À l’organisation du travail prévue à l’article L. 5592‑2.

« Art. L. 55962 (nouveau). – Lorsqu’une amende est prononcée en application de l’article L. 5596‑1, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi informe par tout moyen le procureur de la République des suites données au rapport des agents mentionnés au même article L. 5596‑1.

« Art. L. 55963 (nouveau).  Le montant maximal de l’amende prononcée en application de l’article L. 5596‑1 est de 4 000 euros et peut être appliqué autant de fois qu’il y a de salariés concernés. 

« Le plafond de l’amende est porté au double en cas de nouveau manquement constaté dans un délai de deux ans à compter de la notification de l’amende concernant un précédent manquement de même nature.

« Il est majoré de 50 % en cas de nouveau manquement constaté dans un délai d’un an à compter de la notification d’un avertissement concernant un précédent manquement de même nature.

« Art. L. 55964 (nouveau). – Pour fixer le montant de l’amende prévue à l’article L. 5596‑1, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur ainsi que les ressources et les charges de celui‑ci.

« Art. L. 55965 (nouveau). – Avant toute décision, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi informe par écrit l’armateur de la sanction envisagée, en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l’invitant à présenter ses observations dans un délai d’un mois.

« À l’expiration de ce délai, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi peut, par décision motivée, prononcer l’amende prévue à l’article L. 5596‑1 et émettre le titre de perception correspondant.

« Art. L. 55966 (nouveau). – La décision d’infliger une amende administrative ne peut être prise plus de deux ans après le jour où le manquement a été commis.

« Art. L. 55967 (nouveau). – La décision d’infliger une amende administrative ne peut pas faire l’objet d’un recours hiérarchique.

« Art. L. 55968 (nouveau). – L’amende prononcée en application de l’article L. 5596‑1 est recouvrée selon les modalités prévues pour les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. »

Article 1er bis (nouveau)

Le chapitre VI du titre VI du livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par des articles L. 55663 et L. 55664 ainsi rédigés :

« Art. L. 55663.  Est puni de 7 500 euros d’amende le fait pour l’armateur ou l’employeur de payer :

« 1° Des salaires inférieurs au salaire minimum de croissance prévu aux articles L. 3231‑1 à L. 3231‑12 du code du travail ;

«  Des rémunérations inférieures à la rémunération mensuelle minimale prévue à l’article L. 3232‑1 du même code ;

« 3° Des salaires inférieurs à ceux fixés par la convention collective ou l’accord collectif étendu applicables aux navires battant pavillon français et exerçant dans la même activité.

« La récidive est punie de six mois d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

« Les infractions donnent lieu à autant d’amendes qu’il y a de salariés concernés.

« Art. L. 55664.  Est puni de 7 500 euros d’amende le fait pour l’armateur ou l’employeur de méconnaître les stipulations conventionnelles relatives aux accessoires du salaire prévus par la convention collective ou l’accord collectif de travail étendu applicables aux navires battant pavillon français et exerçant dans la même activité.

« La récidive est punie de six mois d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.

« Les infractions donnent lieu à autant d’amendes qu’il y a de salariés concernés. »

Article 1er  ter (nouveau)

Le titre VI du livre V de la cinquième partie du code des transports est complété par un chapitre VIII ainsi rédigé :

« Chapitre VIII

« Sanctions administratives

« Art. L. 55681.  Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi peut, sur le rapport des agents de contrôle de l’inspection du travail mentionnés à l’article L. 8112‑1 du code du travail, des officiers et des fonctionnaires affectés dans les services exerçant des missions de contrôle dans le domaine des affaires maritimes sous l’autorité ou à la disposition du ministre chargé de la mer et des personnes mentionnées aux 1° à 4°, 8° et 10° de l’article L. 5222‑1 du présent code, sous réserve de l’absence de poursuites pénales, prononcer à l’encontre de l’armateur une amende en cas de manquement :

« 1° Aux règles relatives aux dispositions légales et aux stipulations conventionnelles applicables aux salariés employés par les entreprises de la même branche d’activité établies en France pour les matières mentionnées à l’article L. 5562‑1, à l’exception du salaire minimum, et sur le contrat d’engagement mentionné à l’article L. 5562‑3 ;

« 2° Aux règles relatives à la protection sociale et à la déclaration des accidents survenus à bord mentionnées aux articles L. 5563‑1 et L. 5563‑2 ;

« 3° Aux règles relatives aux personnels désignés pour aider les passagers en situation d’urgence mentionnées à l’article L. 5564‑1 ;

« 4° Aux règles relatives aux documents obligatoires mentionnés aux articles L. 5565‑1 et L. 5565‑2.

« Art. L. 55682. – Lorsqu’une amende est prononcée en application de l’article L. 5568‑1, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi informe par tout moyen le procureur de la République des suites données au rapport des agents mentionnés au même article L. 5568‑1.

« Art. L. 55683. – Le montant maximal de l’amende prononcée en application de l’article L. 5568‑1 est de 4 000 euros et peut être appliqué autant de fois qu’il y a de manquements constatés au titre du 4° du même article L. 5568‑1 ou qu’il y a de travailleurs concernés au titre des 1° à 3° dudit article L. 5568‑1.

« Le plafond de l’amende est porté au double en cas de nouveau manquement constaté dans un délai de deux ans à compter de la notification de l’amende concernant un précédent manquement de même nature.

« Il est majoré de 50 % en cas de nouveau manquement constaté dans un délai d’un an à compter de la notification d’un avertissement concernant un précédent manquement de même nature.

« Art. L. 55684. – Pour fixer le montant de l’amende prévue à l’article L. 5568‑1, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi prend en compte les circonstances et la gravité du manquement, le comportement de son auteur ainsi que ses ressources et ses charges.

« Art. L. 55685. – Avant toute décision, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi informe par écrit l’armateur de la sanction envisagée, en portant à sa connaissance le manquement retenu à son encontre et en l’invitant à présenter ses observations dans un délai d’un mois.

« À l’expiration de ce délai, le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi peut, par décision motivée, prononcer l’amende prévue à l’article L. 5568‑1 et émettre le titre de perception correspondant.

« Art. L. 55686. – La décision d’infliger une amende administrative ne peut être prise plus de deux ans après le jour où le manquement a été commis.

« Art. L. 55687. – La décision d’infliger une amende administrative ne peut pas faire l’objet d’un recours hiérarchique.

« Art. L. 55688. –  L’amende prononcée en application de l’article L. 5568‑1 est recouvrée selon les modalités prévues pour les créances de l’État étrangères à l’impôt et au domaine. »

Article 2

Le code des transports est ainsi modifié :

1° Le 1° de l’article L. 5523‑6 est complété par les mots : « ou dans les conditions prévues à l’article L. 5521‑1‑1 lorsque le certificat d’aptitude médicale est établi à l’étranger » ;

2° L’article L. 5785‑1 est ainsi modifié :

a) La vingttroisième ligne du tableau du second alinéa du I est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 5523‑5

Résultant de la loi n° 2013‑619 du 16 juillet 2013

 

 

L. 5523‑6

Résultant de la loi n°     du     

 » ;

 

b) Après la quatorzième ligne du tableau du second alinéa du II, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 5523‑1

Résultant de l’ordonnance n° 2010‑1307 du 28 octobre 2010

 

 

L. 5523‑6

Résultant de la loi n°     du     

 » ;

 

3° L’article L. 5795‑1 est ainsi modifié :

a) La vingttroisième ligne du tableau du second alinéa du I est remplacée par deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 5523‑5

Résultant de la loi n° 2013‑619 du 16 juillet 2013

 

 

L. 5523‑6

Résultant de la loi n°     du     

 » ;

 

b) Après la quatorzième ligne du tableau du second alinéa du II, sont insérées deux lignes ainsi rédigées :

 

«

L. 5523‑5

Résultant de la loi n° 2013‑619 du 16 juillet 2013

 

 

L. 5523‑6

Résultant de la loi n°     du     

 »

Article 3 (nouveau)

Dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur l’état des pratiques relatives au dumping social sur les lignes régulières de ferries au sein de l’Union européenne.

Article 4 (nouveau)

Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport recensant les besoins humains et financiers des services chargés de l’inspection du travail maritime pour assurer leurs missions, notamment la lutte contre le phénomène de dumping social.

Le rapport précise également les pistes d’amélioration de la formation des agents de ces services en matière de droit du travail maritime.

 

 

Délibéré en séance publique, à Paris, le 28 mars 2023.

 

 La Présidente,

Signé : Yaël BRAUN-PIVET