N° 850
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 janvier 2025.
PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE
visant à rétablir un cumul des mandats pour les députés et sénateurs exerçant une fonction de maire dans les communes de 10 000 habitants ou moins ou une fonction d’adjoint au maire,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
M. Fabien LAINÉ, M. Anthony BROSSE, M. Didier PADEY, M. Christophe NAEGELEN, M. Nicolas FORISSIER, M. Jean-Luc BOURGEAUX, M. Didier LEMAIRE,
députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Suite au renforcement des pouvoirs du parlement après la réforme constitutionnelle de 2008 et aux lois de décentralisation ayant successivement renforcé les pouvoir des exécutifs locaux, il paraissait judicieux d’adopter une loi obligeant les parlementaires à devoir davantage s’investir dans leur mandat national et éviter qu’ils ne soient trop absorbés par leur mandat de maire. La loi organique n° 2014‑125 du 14 février 2014 interdisant le cumul des fonctions exécutives locales a ainsi mis fin aux fonctions de « député‑maire » et de « sénateur‑maire ». Pour l’exécutif de l’époque, cette réforme visait à « libérer les parlementaires de responsabilités importantes au sein des exécutifs de collectivités territoriales ou des intercommunalités », afin qu’ils puissent « se consacrer pleinement aux missions qui leur sont dévolues ». Cette mesure avait pour ambition de « renforcer la place du Parlement, en le confortant notamment dans son rôle de contrôle du Gouvernement. »
Ce projet de loi organique s’inscrivait dans un contexte de moralisation de la vie publique, motivé par une perte de confiance des français envers leurs représentants politiques. Aujourd’hui, 10 ans après sa promulgation, quel bilan peut‑on en tirer ?
En réalité, jamais le procès en déconnexion des représentants de la nation n’a été aussi fort. Toutefois, il serait malhonnête d’affirmer que cette déconnexion trouve son origine dans la loi organique de 2014 sur le non cumul des mandats. Le problème est protéiforme et nécessite sans doute une réflexion approfondie sur le fonctionnement de nos institutions. Mais comme l’affirmait Emmanuel Macron : « Quand ils étaient députés ou sénateurs, les maires relayaient au niveau national les choses et réciproquement, il y avait un va‑et‑vient ». Ils étaient ainsi de véritables rouages de transmissions entre la province et Paris. Le fait que les députés et sénateurs ne puissent plus exercer de fonctions exécutives locales n’est sans doute pas étranger à ce sentiment croissant de déconnexion. Bien que cela ne donnait pas aux députés et aux sénateurs concernés une légitimité plus grande que ceux sans mandat exécutif, leur expérience locale apportait une vision enrichissante à leurs collègues moins aguerris sur les politiques locales. Au moment de la crise des gilets jaunes, Olivia Grégoire reconnaissait que ses collègues qui avaient été maires avaient « senti plus tôt ce qui se passait ».
Certains mettent en avant un renouvellement inédit du personnel politique à l’Assemblée nationale depuis l’entrée en vigueur de la loi organique de 2014. Ce renouvellement, intervenue aux élections législatives de 2017, est bien évidemment une bonne nouvelle pour notre démocratie, mais la réalité est qu’il découle davantage de l’émergence du Macronisme et de la volonté pour les français de redéfinir les clivages politiques que de l’interdiction du cumul des mandats.
Enfin, on reprochait aux députés‑maires et aux sénateurs‑maires d’être des « cumulards », terme péjoratif qu’on leur affublait pour les accuser d’avoir comme unique but de percevoir à la fois les indemnités liées à leur mandat parlementaire et aux fonctions exécutives. Or, il existait les règles légales d’écrêtement qui n’autorisaient ce cumul que dans la limite d’une fois et demie le montant de l’indemnité parlementaire de base.
Conscients du caractère trop restrictif de cette loi, plusieurs parlementaires, sénateurs et députés, ont tenté d’assouplir la loi organique de 2014, sans la remettre totalement en cause. Ainsi, le député Karl Olive a proposé d’autoriser à nouveau le cumul des mandats en portant l’autorisation à des mandats parlementaires avec des mandats locaux limités mais sans définir de seuil. D’autres propositions, comme celles d’Hervé Marseille et Pierre Morel‑À‑l’Huissier ont respectivement limité le cumul à des communes de 10 000 habitants et 25 000 habitants ou moins. Enfin, la dernière proposition de loi en date à ce sujet est celle de Henri Alfandari qui proposait la possibilité de cumuler à nouveau un mandat national avec un exécutif local, à l’exception de la fonction de maire.
Pour ma part, comme l’a proposé notre collègue du Sénat Hervé Marseille en 2021, je propose de rétablir les fonctions de député‑maire et sénateur‑maire pour les communes de 10 000 habitants ou moins. Ce seuil n’est pas défini au hasard. Il se rencontre fréquemment en droit des collectivités territoriales, et semble marquer une frontière entre le monde urbain et le monde rural. Les communes dont la population excède ce seuil sont soumises à des obligations plus lourdes et elles disposent également de moyens plus importants.
Aussi, je propose d’autoriser un cumul pour les adjoints au maire, quel que soit la taille de la commune.
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proposition de loi ORGANIQUE
Article unique
Après la première occurrence du mot : « maire », la fin du 1° de l’article L.O. 141‑1 du code électoral est ainsi rédigée : « d’une commune de plus de 10 000 habitants, de maire d’arrondissement, de maire délégué et d’adjoint au maire d’une commune de plus de 10 000 habitants ; ».