N° 883
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 février 2025.
PROPOSITION DE LOI
relative à la déclaration de domiciliation,
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
Mme Virginie DUBY-MULLER, Mme Josiane CORNELOUP, M. Thibault BAZIN, Mme Sylvie BONNET, M. Jean-Luc BOURGEAUX, M. Pierre CORDIER, Mme Justine GRUET, M. Vincent JEANBRUN, M. Nicolas RAY, M. Jean-Pierre VIGIER, M. Eric LIÉGEON, M. Patrick HETZEL,
députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
L’article 104 du code civil permet à tout Français de déclarer son changement de domicile auprès de la municipalité quittée ou de celle où il s’installe. Cependant, cette déclaration reste facultative et n’est pas une obligation légale.
Historiquement, le décret n° 47‑2410 du 31 décembre 1947 imposait cette déclaration aux ressortissants étrangers, mais il a été abrogé par le décret n° 2006‑1378 du 15 novembre 2006. En Alsace‑Moselle, des ordonnances des 15, 16 et 18 juin 1883 rendent toujours obligatoire la déclaration de domicile auprès de l’autorité communale, bien que les sanctions associées aient été supprimées en 1919.
En Europe, la déclaration domiciliaire est largement répandue et obligatoire, comme l’a souligné une étude du service de la législation comparée du Sénat publiée en novembre 2004. Cette étude montre que des pays comme l’Allemagne, l’Autriche, la Belgique ou encore l’Italie imposent des obligations similaires, assorties de sanctions. La France apparaît donc comme une exception en matière de suivi domiciliaire.
Cette absence de déclaration obligatoire nuit à une connaissance précise et actualisée de la population des communes. Elle limite également l’efficacité des politiques publiques et des financements accordés par l’État aux collectivités locales, qui reposent sur des recensements quinquennaux parfois éloignés de la réalité.
Le but de la présente proposition de loi est de mettre en place un dispositif clair et moderne de déclaration domiciliaire obligatoire, pour répondre aux enjeux suivants :
‑ Garantir une meilleure connaissance de la population communale grâce à des registres continuellement mis à jour ;
‑ Améliorer la gestion des services publics locaux, tels que les infrastructures scolaires, les activités périscolaires et culturelles, ou encore les dispositifs sociaux ;
‑ Assurer une répartition plus équitable des financements publics, basée sur des données démographiques actualisées ;
‑ Faciliter les démarches administratives des résidents, grâce à la délivrance d’un récépissé de déclaration unique servant de justificatif de domicile.
La proposition retient la notion de domicile, définie à l’article 102 du code civil, plutôt que celle de « résidence principale », issue du droit fiscal. Elle prévoit la création d’un récépissé délivré lors de la déclaration, nécessaire pour toute démarche liée à l’installation dans une commune, comme l’inscription sur les listes électorales, l’accès aux services municipaux ou encore le raccordement aux réseaux (eau, électricité, etc.).
Un délai transitoire de trois ans est prévu pour permettre aux résidents actuels de se conformer à cette obligation. Afin de simplifier les démarches, les mairies seront chargées d’informer automatiquement la commune de départ en cas de changement de domicile.
Par ailleurs, pour garantir la pertinence des registres, des mécanismes de gestion informatiques sécurisés seront mis en place, respectant les dispositions de la loi n° 78‑17 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.
Enfin, l’objectif à terme est de substituer les données issues de ces registres à celles des recensements pour tous les calculs démographiques, notamment ceux relatifs aux dotations de l’État.
L’article 1er réécrit l’article 103 du code civil visant à instaurer une obligation légale de déclaration de domicile, incluant les changements d’adresse au sein d’une même commune. Cet article modifie également l’article 104 du même code instituant la remise d’un récépissé de déclaration, indispensable pour diverses démarches administratives locales. Enfin, il réécrit l’article 105 du même code qui encadre l’enregistrement des données recueillies.
L’article 2 laisse une période transitoire de trois ans pour laisser aux habitants le temps de se mettre en conformité avec la présente.
L’article 3 harmonise le système sur l’ensemble du territoire national, y compris dans les départements d’Alsace et Moselle.
L’article 4 adapte en fonction de cette proposition de loi la définition et la comptabilité des résidents d’une commune.
L’article 5 prévoit qu’un décret en Conseil d’État précise les modalités d’exécution de cette proposition de loi.
L’article 6 désigne la date d’entrée en vigueur de la présente loi.
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proposition de loi
Article 1er
Le titre III du livre Ier du code civil est ainsi modifié :
1° L’article 103 est ainsi rédigé :
« Art. 103. – Toute personne qui établit ou transfère son domicile dans une commune ou dans un arrondissement de Paris, Lyon ou Marseille doit en faire la déclaration auprès des services de la mairie de cette commune ou de cet arrondissement.
« Les services de la mairie qui recueillent la déclaration en informent, le cas échéant, les services de la mairie de la commune ou de l’arrondissement de Paris, Lyon ou Marseille où la personne était domiciliée auparavant.
« Doit également être déclaré tout changement de domicile au sein de la même commune ou du même arrondissement. »
2° L’article 104 est ainsi rédigé :
« Art. 104. – Un récépissé de déclaration de domicile est remis au déclarant par les services de la mairie de la commune ou de l’arrondissement de Paris, Lyon ou Marseille qui enregistrent la déclaration. Il constitue l’unique justification de domicile à produire pour l’accomplissement de toute formalité. »
3° L’article 105 est ainsi rédigé :
« Art. 105. – Dans chaque mairie, sont recueillis les éléments relatifs à l’identité, à la date de naissance et à l’adresse des personnes venues déclarer avoir établi leur domicile sur le territoire de la commune ou, pour Paris, Lyon et Marseille, de l’arrondissement, ainsi que des personnes qui composent leur foyer.
« Les registres nominatifs créés au titre du recueil d’informations mentionné au premier alinéa sont tenus dans le respect de la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Le droit d’accès et de correction des données nominatives est assuré conformément aux dispositions de la loi n° 78‑17 précitée. Ces données nominatives ne peuvent être consultées que par les agents chargés de la mise en œuvre de ce recueil. La diffusion de ces données à des personnes non autorisées à y accéder ou leur détournement sont passibles des peines prévues aux articles 226‑16 à 226‑24 du code pénal.
« Ces informations sont recueillies, transmises et utilisées dans des conditions garantissant leur confidentialité et selon des modalités fixées par décret en Conseil d’État pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »
Article 2
Les personnes ayant déjà établi leur domicile dans une commune à la date d’entrée en vigueur de la présente loi disposent de trois années à compter de cette date pour effectuer la déclaration prévue à l’article 103 du code civil.
Article 3
La présente loi annule et remplace les dispositions relatives à la déclaration et au fichier domiciliaires applicables dans les départements du Bas‑Rhin, du Haut‑Rhin et de la Moselle.
Article 4
À compter du 1er janvier 2030, le nombre de personnes ayant leur résidence habituelle sur le territoire d’une commune est le nombre de personnes qui y sont domiciliées, calculé à partir des éléments recueillis en application de l’article 105 du code civil.
Article 5
Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application de la présente loi.
Article 6
La présente loi entre en vigueur le 1er janvier 2027.