N° 951

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 février 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à protéger les Français des ravages de la drogue,

(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. François JOLIVET, M. Henri ALFANDARI, Mme Béatrice BELLAMY, M. Thierry BENOIT, Mme Agnès FIRMIN LE BODO, M. Pierre HENRIET, M. Xavier LACOMBE, M. Thomas LAM, M. Jean MOULLIERE, Mme Béatrice PIRON, Mme Anne-Cécile VIOLLAND,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

La sécurité, condition première de la liberté, est au cœur des attentes des Français. Ces derniers, comme en témoignent les élections européennes et législatives de 2024, expriment une exigence croissante d’ordre et de justice. Dans ce contexte, il est impératif de réaffirmer l’autorité de l’État face aux défis posés par la consommation de stupéfiants et le trafic qui s’ensuit, véritables fléaux pour la santé publique et la cohésion nationale. Le marché de la drogue alimente la haute criminalité : les vendeurs de drogues, sont les vendeurs d’êtres humains, les vendeurs d’armes et les financeurs du terrorisme.

Ces criminels tirent leurs revenus de la vente de la drogue. Les acheteurs de stupéfiant alimentent financièrement les criminels et rendent donc possibles les atteintes aux valeurs de la République.

Cette proposition de loi a pour objectif d’assécher le marché des drogues en renforçant notre arsenal pénal.

Elle vise à banaliser l’usage des amendes forfaitaires délictuelles (AFD) comme outil efficace pour dissuader et sanctionner la consommation de stupéfiants. Les résultats obtenus depuis leur instauration en 2018 sont probants mais insuffisants.

Cette proposition de loi permet aux policiers municipaux et gardes champêtres, en sus de la police nationale et de la gendarmerie, de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles pour usage de stupéfiant. En outre, le texte rend automatique l’inscription de l’amende forfaitaire délictuelle au casier judiciaire (B2) du délinquant. Pour les délinquants qui assument des missions qui exigent un extrait de casier judiciaire vierge, l’employeur vérifie la compatibilité de la mission confiée et la consommation de stupéfiant.

L’amende est recouvrée sur toutes les ressources du délinquant, nul ne peut s’y soustraire quelle que soit l’origine de ses ressources, prestations sociales comprises.

Cette proposition de loi poursuit l’objectif de restaurer l’égalité devant la loi. Nul ne doit se soustraire au paiement d’une amende pénale en raison de l’origine de ses ressources.

Ce texte est un signal fort : la République protège et punit avec la même exigence. L’ordre républicain n’est pas une option, mais une nécessité.

L’article 1er prévoit d’élargir le champ d’application de l’amende forfaitaire délictuelle aux jeunes âgés de plus de 16 ans qui commettent le délit d’usage de stupéfiants et précise que les amendes forfaitaires doivent être acquittées par les personnes exerçant l’autorité parentale. L’objectif est ici de responsabiliser les parents.

L’article 2 prévoit de rendre saisissables toutes les ressources pour acquitter le paiement des amendes forfaitaires délictuelles.

L’article 3 prévoit de supprimer la possibilité de minorer le montant de l’amende forfaitaire délictuelle en cas de paiement immédiat. Les auteurs de la proposition de loi s’interrogent sur le signal envoyé aux consommateurs, en particulier dans les quartiers les plus aisés et donc susceptibles de s’acquitter directement du montant de l’amende. Ils souhaitent que le montant minimal de l’amende soit de 300 euros.

L’article 4 prévoit de permettre aux policiers municipaux et garde‑champêtres de prononcer des amendes forfaitaires délictuelles pour usage de stupéfiant. L’objectif est de mobiliser toutes les forces de sécurité intérieure contre le financement des réseaux qui s’attaquent aux valeurs de la République. C’est le seul moyen pour armer notre pays contre le financement de la grande délinquance. Tous les acteurs publics se doivent d’être mobilisés pour contrer et faire reculer ce fléau qui gangrène la santé des Français et alimente les réseaux de grande criminalité.

L’article 5 prévoit l’inscription de toute amende forfaitaire délictuelle relative à l’usage de stupéfiants au casier judiciaire pour une durée de deux ans, sous réserve de non‑récidive. En cas de récidive dans ce délai, le dossier est automatiquement transmis au Parquet pour des poursuites éventuelles.

L’article 6 prévoit que si le délinquant est un agent public ou participe à une mission de service public, l’extrait de casier judiciaire est transmis à son employeur par l’autorité ayant prononcé l’amende forfaire délictuelle. L’employeur vérifie si la condamnation est compatible avec les missions confiées. Il s’agit là de mettre en ordre de marche tout le secteur public qui doit faire front face à ce fléau, et de ce fait, être exemplaire.

L’article 7 introduit un dispositif renforcé pour lutter contre la consommation de stupéfiants, en donnant aux forces de l’ordre la possibilité de procéder à des dépistages sur toute personne présente dans un lieu public. Cet article prévoit également une obligation de prise de sang immédiate en cas de refus du test salivaire, avec des frais d’analyse imputés à la personne concernée ou, pour les mineurs, à leurs représentants légaux. Cela signifie qu’à l’instar des contrôles alcootests pour les automobilistes, des barrages pourraient être constitués dans tous les lieux publics et dans tous les lieux dont les manifestations ont été autorisées. Cet article a pour objectif de faire prendre conscience aux consommateurs, même occasionnels, de l’absence totale d’impunité et de la possibilité d’être sanctionné bien longtemps après la consommation de drogue.

Ces mesures sont complémentaires et interdépendantes.

 


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proposition de loi

Article 1er

L’article 495‑17 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le délit a été commis par un mineur de plus de 16 ans, le montant de l’amende forfaitaire délictuelle est fixé à 150 euros. L’amende forfaitaire délictuelle doit alors être acquittée par la personne exerçant l’autorité parentale sur le mineur dans les conditions prévues à l’article 495‑18. »

Article 2

Le dernier alinéa de l’article 495‑18 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée : « Par dérogation à l’article L. 553‑4 du code de la sécurité sociale, une part plafonnée des prestations sociales, dans la limite d’un plafond défini par décret et ne pouvant excéder le revenu de solidarité active, peut être imputée aux fins de recouvrement des amendes pénales prononcées à l’encontre du bénéficiaire ou des personnes à sa charge. »

Article 3

Le deuxième alinéa de l’article 495‑18 du code de procédure pénale est supprimé.

Article 4

L’article L. 511‑1 du code de la sécurité intérieure est complété par deux alinéas ainsi rédigés :

« Les agents de police municipale et les gardes‑champêtres prononcent les amendes forfaitaires délictuelles pour usage de stupéfiants, conformément aux dispositions prévues à l’article 495‑17 du code de procédure pénale.

« Un décret en Conseil d’État fixe les modalités de leur formation. »

Article 5

L’article 495‑17 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Toute amende forfaitaire délictuelle pour usage de stupéfiants fait l’objet d’une inscription au bulletin n° 2 du casier judiciaire national. Cette inscription est automatiquement effacée à l’issue d’un délai de deux ans, sous réserve qu’aucune nouvelle infraction de même nature n’ait été constatée dans cet intervalle. En cas de récidive constatée dans ce délai, le dossier du contrevenant est transmis au procureur de la République pour suite à donner. »

Article 6

L’article L. 3421‑1 du code de la santé publique est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsqu’une amende forfaitaire délictuelle pour usage de stupéfiants est prononcée à l’encontre d’un agent public ou d’une personne participant à une mission de service, l’autorité ayant prononcé cette sanction transmet, sans délai, l’extrait de casier judiciaire correspondant à l’employeur du délinquant. Ce dernier vérifie si les faits relevés sont compatibles avec les missions confiées et prend, le cas échéant, les mesures nécessaires pour garantir le respect des obligations liées à la fonction exercée. »

Article 7 

Après l’article 495‑19 du code de procédure pénale, il est inséré un article 495­‑19­‑1 ainsi rédigé :

« Art. 495191. – Toute personne peut faire l’objet d’un dépistage de consommation de stupéfiants en tous lieux accueillant du public et à tout moment. « En cas de refus, la personne concernée fait immédiatement l’objet d’une prise de sang aux fins d’analyse destinée à rechercher l’usage de stupéfiants. Les analyses sont prises en charge par le contrôlé ayant refusé de satisfaire aux tests salivaires. S’il n’est pas majeur, ces analyses sont prises en charge par les détenteurs de l’autorité parentale. »

Article 8

La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.