N° 954

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 février 2025.

PROPOSITION DE LOI

visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire,

(Renvoyée à la commission des affaires économiques, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)

présentée par

M. Stéphane TRAVERT, M. Julien DIVE,

députés.


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EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,

Depuis plusieurs années, la filière agroalimentaire est fragilisée par une guerre des prix menée au détriment des producteurs. Cette course effrénée à la réduction des coûts a contribué à déstabiliser les maillons essentiels de nos chaînes de valeur, compromettant leur capacité à investir, à innover et à répondre aux attentes croissantes des consommateurs.

C’est dans ce contexte qu’a été introduit, par la loi Egalim I, le seuil de revente à perte majoré de 10 % (SRP+10), prolongé par la loi ASAP. Ce dispositif impose aux distributeurs de vendre certains produits alimentaires au minimum à leur prix d’achat majoré de 10 %. Son objectif est clair : rééquilibrer les relations commerciales entre producteurs, transformateurs et distributeurs en limitant les pratiques commerciales agressives, tout en garantissant une meilleure répartition de la valeur. Depuis son entrée en vigueur, le SRP+10 a démontré son utilité, tant pour les producteurs que pour l’ensemble des acteurs de la chaîne alimentaire. Son impact peut être observé à travers plusieurs aspects :

1° Stabilisation des prix : En freinant la guerre des prix, le SRP+10 a permis de réduire la pression sur les marges des producteurs et des transformateurs, contribuant ainsi à une plus grande stabilité économique pour les filières agricoles.

2° Soutien aux filières agricoles : En améliorant la répartition des marges, le dispositif a renforcé la résilience des producteurs face aux crises successives, qu’il s’agisse de la pandémie, de l’inflation des coûts de production ou des perturbations liées aux tensions géopolitiques.

3° Concertation des parties prenantes : Le maintien de ce mécanisme est soutenu par une grande majorité des acteurs ‑ producteurs, transformateurs et, dans une large mesure, distributeurs ‑, témoignant de son rôle structurant pour la filière.

Malgré ces avancées, l’absence d’intervention législative entraînerait l’expiration du SRP+10 au 15 avril 2025, conformément au VIII de l’article 125 de la loi ASAP. Un tel scénario risquerait de provoquer un retour à des pratiques commerciales déstabilisantes, caractérisées par une pression accrue sur les prix et des demandes de compensation de marges au détriment des producteurs.

La présente proposition de loi vise à prolonger le SRP+10 jusqu’au 15 avril 2028, afin de répondre aux enjeux suivants :

1° Renforcer la visibilité pour les acteurs économiques : la prolongation du SRP+10 garantit un cadre juridique stable, indispensable pour permettre aux producteurs, transformateurs et distributeurs de planifier leurs investissements et d’adopter des stratégies à long terme.

2° Préserver les équilibres commerciaux : en soutenant une répartition plus équitable des marges, le dispositif joue un rôle clé pour préserver l’équilibre des relations commerciales, enjeu central pour la pérennité des filières agricoles françaises.

3° Poursuivre l’évaluation des impacts : une prolongation de trois ans constitue une opportunité de mesurer, avec plus de recul, les effets du SRP+10 sur les différents maillons de la chaîne alimentaire. Ces enseignements permettront de décider, en toute connaissance de cause, de sa pérennisation ou d’une adaptation future. La prolongation du SRP+10 doit également ouvrir la voie à des réflexions complémentaires sur l’encadrement des pratiques commerciales. Elle offre une occasion de travailler à des dispositifs visant à prévenir les marges abusives et à renforcer la transparence sur l’utilisation des revenus supplémentaires générés par ce mécanisme. Une attention particulière devra être portée à la protection des producteurs les plus vulnérables et à l’équilibre global des filières.

Dans un contexte marqué par des crises multiples, la protection des filières agricoles et l’équité des relations commerciales demeurent des enjeux essentiels pour la souveraineté alimentaire et la compétitivité de notre pays. Prolonger le SRP+10 jusqu’en 2028 est une mesure de responsabilité, qui permettra de consolider les acquis tout en offrant un cadre propice à l’adaptation des filières aux défis à venir.

En parallèle, cette proposition de loi prévoit de supprimer l’encadrement des promotions sur les produits de droguerie, parfumerie et hygiène (DPH). Ces produits, à la différence des denrées alimentaires, ne présentent pas les mêmes enjeux en matière de souveraineté ou de protection des producteurs. L’encadrement actuel limite les capacités des distributeurs à répondre aux attentes des consommateurs en termes de compétitivité des prix. Sa suppression vise à redonner une plus grande liberté commerciale, tout en veillant à ne pas perturber les relations entre fournisseurs et distributeurs.

Cette mesure permettra de soutenir les ménages dans un contexte d’inflation élevé sur les produits de consommation courante.

Enfin, cette proposition de loi aligne la date de la fin de l’expérimentation de l’encadrement des promotions des produits alimentaires sur celle de la fin de l’expérimentation du SRP+10, à savoir le 15 avril 2028.

 


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proposition de loi

Article unique

I. – L’article 125 de la loi n° 2020‑1525 du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique est ainsi modifié :

1° Le II est ainsi modifié :

a) À la fin du A, les mots : « produits de grande consommation au sens du I de l’article L. 441‑4 du code de commerce » sont remplacés par les mots : « denrées alimentaires ou de produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie » ;

b) Au 2° du C, les mots : « produits de grande consommation » sont remplacés par les mots : « denrées alimentaires ou de produits destinés à l’alimentation des animaux de compagnie » ;

2° Le III est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « produits de grande consommation pour lesquels » sont remplacés par les mots : « denrées ou catégories de denrées alimentaires pour lesquelles » ;

b) Au 1°, les mots : « produits de grande consommation concernés » sont remplacés par les mots : « denrées ou catégories de denrées alimentaires concernées » ;

c) Au début de la seconde phrase du 2°, les mots : « Pour les denrées ou les catégories de denrées alimentaires, » sont supprimés ;

3° Le VIII est ainsi rédigé :

« VIII. – Les I, II et le IV sont applicables jusqu’au 15 avril 2028. »

II. – Le I du présent article entre en vigueur le 1er juillet 2025.