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N° 957
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ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
DIX-SEPTIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 février 2025.
PROPOSITION DE LOI
visant à mieux lutter contre le harcèlement scolaire,
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, à défaut de constitution d’une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée par
Mme Naïma MOUTCHOU, M. Paul CHRISTOPHE, M. Xavier ALBERTINI, M. Henri ALFANDARI, Mme Béatrice BELLAMY, M. Thierry BENOIT, M. Sylvain BERRIOS, M. Bertrand BOUYX, M. Jean-Michel BRARD, Mme Nathalie COLIN-OESTERLÉ, Mme Agnès FIRMIN LE BODO, Mme Félicie GÉRARD, M. François GERNIGON, M. Pierre HENRIET, M. François JOLIVET, M. Loïc KERVRAN, M. Xavier LACOMBE, M. Thomas LAM, Mme Anne LE HÉNANFF, M. Didier LEMAIRE, Mme Lise MAGNIER, M. Jean MOULLIERE, M. Jérémie PATRIER-LEITUS, Mme Béatrice PIRON, M. Christophe PLASSARD, M. Jean-François PORTARRIEU, Mme Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK, Mme Isabelle RAUCH, M. Xavier ROSEREN, Mme Laetitia SAINT-PAUL, M. Vincent THIÉBAUT, M. Frédéric VALLETOUX, Mme Anne-Cécile VIOLLAND, M. Antoine ARMAND, M. Thibault BAZIN, Mme Béatrice BELLAY, M. Hervé BERVILLE, M. Philippe BONNECARRÈRE, M. Ian BOUCARD, M. Xavier BRETON, M. Joël BRUNEAU, Mme Françoise BUFFET, M. Jean-René CAZENEUVE, Mme Constance DE PÉLICHY, M. Julien DIVE, M. Philippe FAIT, M. Olivier FALORNI, M. Moerani FRÉBAULT, M. Bruno FUCHS, M. Philippe GOSSELIN, Mme Justine GRUET, M. Michel HERBILLON, M. Sébastien HUYGHE, M. Harold HUWART, M. Vincent LEDOUX, Mme Sandrine LE FEUR, M. Mathieu LEFÈVRE, Mme Constance LE GRIP, Mme Pauline LEVASSEUR, M. Laurent MAZAURY, Mme Joséphine MISSOFFE, M. Christophe NAEGELEN, Mme Sophie PANTEL, Mme Maud PETIT, M. Aurélien PRADIÉ, M. Nicolas RAY, Mme Mereana REID ARBELOT, Mme Anne-Sophie RONCERET, Mme Nicole SANQUER, M. Raphaël SCHELLENBERGER, M. Olivier SERVA, Mme Violette SPILLEBOUT, M. David TAUPIAC, M. Antoine VERMOREL-MARQUES, Mme Annie VIDAL, Mme Corinne VIGNON, M. Stéphane VIRY, M. Éric WOERTH, Mme Caroline YADAN, Mme Estelle YOUSSOUFFA,
députées et députés.
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EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
« Je suis de mon enfance comme d’un pays », écrivait Antoine de Saint‑Exupéry. L’enfance est ce territoire où se dessinent les premiers repères, mais l’enfance est aussi une période de grande vulnérabilité. L’école, qui devrait être un sanctuaire, est aujourd’hui le théâtre de violences croissantes, dont le harcèlement scolaire est la plus insidieuse. Chaque année, 800 000 élèves en sont victimes en France, avec des conséquences dramatiques : décrochage scolaire, troubles psychologiques, et parfois même suicides.
Les dispositifs existants (programme pHARe, numéro d’urgence 3018, formation des personnels) ont posé des jalons mais doivent être complétés par d’autres mesures. L’extension du harcèlement au cyberespace aggrave encore le phénomène, rendant nécessaire une réponse plus ferme et coordonnée. Trop souvent, ce sont encore les victimes qui doivent fuir leur établissement, tandis que les harceleurs échappent aux sanctions ou récidivent.
L’article 1er prévoit un panier de soins remboursés pour les victimes de harcèlement scolaire, comprenant un suivi psychologique, psychiatrique et nutritionniste, pris en charge par l’Assurance maladie et les complémentaires santé. Cette mesure vise à garantir un accompagnement adapté aux élèves touchés, en attendant une réforme plus large de la médecine scolaire. L’article 2 introduit une peine complémentaire obligatoire de suivi psychologique d’un an pour les auteurs de harcèlement scolaire en cas de condamnation, afin de prévenir la récidive et de favoriser leur réhabilitation.
L’amélioration du climat scolaire passe par la valorisation des comportements responsables. L’article 3 prévoit l’instauration d’une note de vie scolaire intégrée aux épreuves du brevet et du baccalauréat. Cette note prendra en compte le respect du règlement intérieur, l’assiduité et les compétences socio‑comportementales, ces dernières étant essentielles à la réussite scolaire et professionnelle. Plusieurs études, notamment celles de l’économiste Yann Algan, ont démontré l’impact positif de ces compétences sur l’insertion des jeunes. Face au retard accumulé par la France dans leur enseignement, cette mesure contribuera à rééquilibrer les priorités du système éducatif.
La responsabilisation des parents est un levier essentiel dans la lutte contre le harcèlement. L’article 4 impose la convocation systématique des parents d’élèves auteurs présumés de harcèlement scolaire par le chef d’établissement. L’article 5 prévoit, en cas de condamnation, une peine complémentaire obligatoire de stage de responsabilité parentale, tel que prévu par l’article 131‑5‑1 du code pénal. Ce stage permettra d’impliquer directement les parents dans la prévention et la prise en charge des situations de harcèlement.
L’article 6 gage financièrement ces mesures afin d’assurer leur mise en œuvre effective.
La lutte contre le harcèlement scolaire ne peut être dissociée d’un engagement plus large en faveur du respect de l’autorité et de la restauration d’un cadre éducatif protecteur. L’école doit redevenir un lieu d’apprentissage et d’émancipation, où chaque élève peut évoluer en sécurité et s’épanouir pleinement. Il est temps d’agir avec détermination pour briser la spirale du harcèlement et protéger nos enfants.
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proposition de loi
Article 1er
I. – Le titre III du livre Ier de la deuxième partie du code de la santé publique est complété par un chapitre VII ainsi rédigé :
« Chapitre VII
« Parcours de soins dédié aux enfants victimes de harcèlement scolaire
« Art. L. 2137‑1. – Chaque agence régionale de santé met en place un parcours qui associe des professionnels médicaux et des psychologues hospitaliers et libéraux, dans le cadre d’une approche pluridisciplinaire visant à mieux accompagner les enfants victimes de harcèlement scolaire.
« Ce parcours a pour objectifs de développer la formation des professionnels médicaux sur les conséquences psychologiques du harcèlement scolaire, d’améliorer l’orientation des enfants, et de leurs parents, qui y sont confrontés, de faciliter leur accès à un suivi psychologique et d’améliorer leur suivi médical. Il vise à systématiser l’information des familles sur les risques psychologiques liés au harcèlement scolaire et sur les dispositifs de suivi médical et d’accompagnement psychologique disponibles. »
II. – L’article L. 160‑14 du code de la sécurité sociale est complété par un 32° ainsi rédigé :
« 32° Pour les frais liés à la prise en charge des mineurs victimes de harcèlement scolaire. »
III. – Le I s’applique à compter du 1er septembre 2025, après recensement, par les agences régionales de santé des modalités de prise en charge spécifiques mises en place par les établissements et les professionnels de santé de leur ressort pour accompagner les enfants victimes de harcèlement scolaire.
Article 2
Le livre IV de la troisième partie du code de la santé publique est ainsi modifié :
1° Le chapitre III du titre Ier est complété par un article L. 3413‑5 ainsi rédigé :
« Art. L. 3413‑5. – Chaque fois que l’autorité judiciaire enjoint à une personne condamnée pour des faits de harcèlement scolaire de se soumettre à une mesure d’injonction thérapeutique qui consiste en une mesure de soins psychologiques, elle en informe le directeur général de l’agence régionale de santé.
« Celui‑ci fait procéder dans les meilleurs délais à une évaluation socio‑psychologique par un psychologue habilité par le directeur général de l’agence régionale de santé. Cette habilitation doit notamment résulter de la justification d’une formation ou d’une expérience professionnelle dans le domaine de la prise en charge du harcèlement scolaire. Le directeur général de l’agence régionale de santé fait également procéder, s’il y a lieu, à une enquête sur la vie familiale et sociale de l’intéressé, le cas échéant à la demande du psychologue désigné. S’il n’est pas donné suite à cette demande, le professionnel désigné peut en aviser l’autorité judiciaire afin qu’elle se prononce sur l’opportunité de cette enquête.
« À l’issue de cette phase d’évaluation, le psychologue désigné fait connaître sans délai à l’autorité judiciaire son avis motivé sur l’opportunité de la mesure d’injonction thérapeutique. » ;
2° Le chapitre V du titre II est complété par un article L. 3425‑3 ainsi rédigé :
« Art. L. 3425‑3. – La juridiction de jugement peut, à titre de peine complémentaire, astreindre les personnes ayant commis le délit prévu à l’article 222‑33‑2‑3 du code pénal à se soumettre à une mesure d’injonction thérapeutique, selon les modalités définies à l’article L. 3413‑5 du présent code. La durée de la mesure est de douze mois au plus. »
Article 3
Le titre III du livre III de la deuxième partie du code de l’éducation est ainsi modifié :
1° Le dernier alinéa de l’article L. 332‑6 est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il comporte également une note de vie scolaire. » ;
2° À la seconde phrase de l’article L. 333‑4, après le mot : « lycée », sont insérés les mots : « ainsi qu’une note de vie scolaire ».
Article 4
Le deuxième alinéa de l’article L. 111‑6 du code de l’éducation est complété par une phrase ainsi rédigée : « Tout signalement de faits de harcèlement donne lieu à une convocation des parents des auteurs présumés. »
Article 5
L’article 222‑33‑2‑3 du code pénal est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« Le prononcé de la peine complémentaire de stage de responsabilité parentale tel que prévu à l’article 131‑5‑1 est obligatoire pour les parents ou le représentant légal d’un mineur condamné pour des faits de harcèlement scolaire au titre de l’article 222‑33‑2‑3. »
Article 6
I. – La charge pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.
II. – La charge pour les organismes de sécurité sociale est compensée à due concurrence par la majoration de l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services